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Il ne nous reste des édits prétoriens et des autres édits que des fragments qui nous ont été conservés par les écrits des classiques juridiques et non juridiques. La collection la plus complète a été donnée par Wieling (1). Les tentatives qu'on a faites plusieurs fois pour la restitution littérale de l'édit prétorien n'ont donné que des résultats fort peu sûrs (2).

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Nouveau caractère des responsa prudentium.

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Non seulement le droit romain s'était accru d'une masse considérable de matériaux, mais il se présentait aussi comme une combinaison faite avec art de sources anciennes et nouvelles, qui ne suivaient pas toutes la même direction et n'émanaient pas toutes du même esprit. Le droit romain formait ainsi un tout qu'il était difficile d'embrasser d'un coup d'œil, et sa simplification, par les travaux de la science appliqués à resserrer et à coordonner ce vaste et riche ensemble, était devenue un besoin pressant de l'époque. C'est à l'influence de ce besoin et au concours de plusieurs autres causes

(1) Fragmenta edicti perpetui. Franeker, 1733.

(2) Haubold, Instit. jur. rom. priv. hist. dogm. epitome. Leipzig, 1821, p. 137 et suiv.

naissant des circonstances du temps, que fut dû le brillant développement que prit, dans la première moitié de cette période, la science du droit romain. Dans un temps comparativement trèscourt elle s'éleva à un degré de supériorité, et quant au fond et quant à la forme, qui n'a été atteint jusqu'ici chez aucun autre peuple.

Plus la tâche des jurisconsulti était importante et difficile, plus la place qu'ils étaient appelés à occuper dans l'État, depuis le régime impérial, devait paraître honorable. Déjà, sous Auguste, le principe s'était établi que chacun ne pouvait pas, à sa volonté, comme auparavant, publice de jure respondere, mais avait besoin, pour cela, d'une concession spéciale de l'empereur. Il se forma ainsi une classe particulière de jurisconsulti ou prudentes, ainsi nommés par excellence, dans un sens étroit, c'està-dire de jurisconsultes qui étaient autorisés à répondre au nom de l'empereur, quibus permissum est jura condere, de jure respondere, sans qu'on puisse cependant savoir, avec quelque certitude historique, quels priviléges pouvaient dès lors être attachés à cette autorisation.

Sous Adrien, un rescrit établit le principe important que les avis de ces jurisconsultes, exprimés par écrit et revêtus de leur sceau, quand ils seraient unanimes, auraient force de loi, vicem legis obtinerent, sous le nom de sententiæ, et seraient pour le juge une règle formellement obligatoire.

Lorsque ces jurisconsultes étaient d'avis différents, le juge pouvait se décider d'après sa propre conviction, mais toujours en choisissant entre les divers avis exprimés, qui alors s'appelaient opiniones. Par là les responsa prudentium prirent un caractère tout à fait nouveau et presque législatif; là se trouve déposé un germe que nous verrons se développer largement sous Valentinien III et sous Justinien.

Ainsi, dès ce moment, les jurisconsultes, appelés sous ce rapport juris auctores, conditores, prirent, par leurs sententiæ et opiniones, une part active et directe au perfectionnement du droit, non plus seulement du jus civile, dont le cercle avait été à peu près fermé dès la fin de la période précédente, mais encore du jus gentium; car ils commencèrent à appliquer aussi leurs travaux, avec un zèle particulier, au jus honorarium et surtout aux édits des préteurs, comme étant la source actuellement la plus riche.

Mais, sous un autre rapport encore, l'influence indirecte des jurisconsultes se manifesta d'une manière non moins significative; car, de bonne heure, les empereurs jugèrent nécessaire de réunir autour d'eux un conseil permanent de jurisconsultes renommés, auxquels ils soumettaient les nombreuses questions de droit, souvent difficiles, dont ils étaient, par leur position, obligés de donner la solution. Il était donc difficile qu'une constitution

importante fut émise par l'empereur, sans l'avis de ces jurisconsultes, et par là s'explique aussi comment et pourquoi les constitutions des empereurs, tant qu'ils furent assistés de semblables conseillers, furent, en règle générale, si justes et si judicieuses.

Il existe aussi une relation intime entre cette position pratique des jurisconsultes et la marche que prit dès ce moment l'élaboration scientifique du droit. Déjà, avant Auguste, quelques jurisconsultes avaient essayé, soit d'écrire des ouvrages techniques sur certaines matières de jurisprudence, soit de substituer, à l'instruction purement pratique donnée auparavant aux jeunes juristes, un enseignement théorique plus régulier. Sous Auguste, deux jurisconsultes, particulièrement, attirèrent une grande foule de disciples: Labéon, élève de Trebatius, et Capiton, élève d'Ofilius. Comme ces deux professeurs, déjà très-opposés l'un à l'autre dans leurs vues politiques, suivirent une direction différente à quelques égards dans leur manière d'interpréter les sources et de traiter la science du droit, et que leurs disciples, pleins de respect pour leur personne, s'attachérent fortement à leurs doctrines et les étendirent plus loin dans le même esprit, il en résulta tout naturellement deux écoles et deux sectes de jurisconsultes d'un côté les élèves de Labéon, les Proculiens, appelés aussi Pégasiens; de l'autre, les élèves de Capiton, les Cassiens, appelés aussi Sabiniens. Ces deux écoles furent, pendant un

certain temps, fortement opposées l'une à l'autre, et les traces des nombreuses controverses de leurs adhérents restérent visibles, tant qu'un esprit scientifique continua de se montrer dans les travaux de jurisprudence. Cependant, dans le cours des temps, quelques jurisconsultes plus indépendants cherchèrent à se détacher de ces sectes et à se frayer une voie qui leur fût propre.

Cette divergence de doctrine se fit jour non-seulement dans l'enseignement oral, mais encore dans les nombreux ouvrages qui parurent alors. Ils avaient tous, à la vérité, une direction éminemment pratique, mais ils étaient de genres très-différents, quant à leur tendance immédiate et à leur forme extérieure.

Tantôt c'étaient des ouvrages élémentaires trèssuccincts, des introductions, des précis, sous le titre de Institutiones, elementa, definitiones, regulæ, enchiridia; tantôt c'étaient des ouvrages plus étendus, embrassant beaucoup de matières, et entrant dans les détails, libri juris civilis, Digesta.

Tantôt ils suivaient, surtout pour le développement des principes élémentaires, un ordre systėmatique purement scientifique; tantôt, et c'était, à ce qu'il paraît, le cas le plus fréquent, ils adoptaient l'ordre des matières qui se trouvait dans l'édit du préteur, et qui pouvait paraître le plus convenable pour le côté pratique du droit.

Tantôt c'étaient des commentaires sur quelque source importante du droit, par exemple sur l'édit,

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