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2. L'invention et l'appropriation de choses mobilières inanimées qui n'appartiennent à personne.

Un des principaux cas de ce genre d'acquisition est la découverte d'un trésor, thesaurus, c'est-à-dire de choses précieuses enfouies depuis longtemps, dont on ne peut plus aujourd'hui reconnaître le propriétaire, et qui, en conséquence, peuvent être réputées sans maître. Cependant la doctrine des trésors a varié plusieurs fois dans le droit romain, suivant que les empereurs faisaient prévaloir les intérêts du fisc, ou ceux de l'inventeur et du propriétaire du fond. D'un autre côté, les principes de l'occupation des choses sans maître n'ont jamais été appliqués ici complétement, car le trésor n'est pas considéré uniquement comme une chose sans maître, mais en même temps comme étant une accession du fonds.

3. La conquête et le butin fait à la guerre, selon le principe que l'ennemi n'a aucun droit. Le pays conquis devenait toujours le partage de l'état, tandis que les choses mobilières restaient ordinairement au particulier qui avait fait le butin. Quoique les Romains reconnaissent ce principe et en souffrent l'application contre eux-mêmes, ils l'adoucissent cependant, en faveur des citoyens ro mains, par le postliminium qu'ils ont admis à l'égard de certaines choses.

4. Si quelqu'un, en travaillant une matière appartenant à autrui, a fabriqué pour lui-même une nouvelle espèce, species, en lui donnant une forme qu'elle n'avait pas, la matière élaborée cesse d'exister comme telle, et la nouvelle species n'a point encore de propriétaire, elle est res nullius. Elle échoit donc par occupation à celui qui, au moyen de cette transformation, l'a créée pour lui-même : seu

lement il faut supposer que la nouvelle espèce ne peut pas être ramenée à sa forme primitive.

Nec tamen ea tantum, quæ traditione nostra fiunt, naturali nobis ratione adquiruntur, sed etiam quæ occupando ideo nacti fuerimus, quia antea nullius essent. GAI., II, § 66.

Feræ igitur bestiæ, et volucres, et pisces, id est omnia animalia, quæ in terra, mari, cœlo nascuntur, simul atque ab aliquo capta fuerint, jure gentium statim illius esse incipiunt. Quod enim ante nullius est, id naturali ratione occupanti conceditur. Nec interest, feras bestias et volucres utrum in suo fundo quisque capiat, an in alieno.

Item lapilli et gemmæ et cetera, quæ in littore inveniuntur, jure naturali statim inventoris fiunt. § 12 et 18, I., 1, 2, De rer. divis

Thesauros, quos quis in suo loco invenerit, divus Hadrianus, naturalem æquitatem secutus, ei concessit, qui invenerit. Idemque statuit, si quis in sacro, aut in religioso loco fortuito casu invenerit. At, si quis in alieno loco, non data ad hoc opera, sed fortuitu invenerit, dimidium domino soli concessit. § 39, I., 1, 2, De rer. div.

Thesaurus est vetus quædam depositio pecuniæ, cujus non exstat memoria, ut jam dominum non habeat. Sic enim fit ejus, qui invenerit, quod non alterius sit. PAULUS, fr. 31, § 1, D., XLI, 1, De adq. rer. dom.

Item ea, quæ ex hostibus capimus, jure gentium statim nostra fiunt; adeo quidem, ut et liberi homines in servitutem nostram deducantur, qui tamen, si evaserint nostram potestatem, et ad suos reversi fuerint, pristinum statum recipiunt. S 17, I., I, 2, De rer. divis.

Postliminium est jus amissæ rei recipiendæ ab extraneo et in statum pristinum restituendæ, inter nos ac liberos populos regesque moribus, legibus constitutum. Nam quod bello amisimus, aut etiam citra bellum, hoc si rursus recipiamus, dicimur postliminio recipere. PAULUS, fr. 19, pr., D., XLIX, 15, De captivis et postliminio.

Quum quis ex aliena materia speciem aliquam suo nomine fecerit, Nerva et Proculus putant, hunc dominum esse, qui fecerit, quia, quod factum est, antea nullius fuerat. GAI., fr. 7, S7, D., XLI, 1, De adq. rer. dom.

Quum ex aliena materia species aliqua facta sit ab aliquo, quæri solet, quis eorum ex naturali ratione dominus sit, utrum is, qui

fecerit, an potius ille, qui materiæ dominus fuerit. Ut ecce, si quis ex alienis uvis, aut olivis, aut spicis vinum, aut oleum, aut frumentum fecerit.... Et post multam Sabinianorum et Proculianorum ambiguitatem placuit media sententia existimantium, si ea species ad priorem et rudem materiam reduci possit, eum videri dominum esse, qui materiæ dominus fuerit; si non possit reduci, eum potius intelligi dominum, qui fecerit. Ut ecce, vas conflatum potest ad rudem materiam æris, vel argenti, vel auri reduci, vinum autem, vel oleum, aut frumentum ad uvas, vel olivas, vel spicas reverti non potest. Quod si partim ex sua materia, partim ex aliena speciem aliquam fecerit quis, veluti ex suo vino et alieno melle mulsum miscuerit, aut ex suis et alienis medicamentis emplastrum aut collyrium, aut ex sua lana et aliena vestimentum fecerit, dubitandum non est, hoc casu eum esse dominum, qui fecerit, quum non solum operam suam dederit, sed et partem materiæ præstiterit. § 25, I., 1, 1, De rerum divi

sione.

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Tradition.

La tradition est le plus important des modes dérivés d'acquisition de la propriété ; elle forme la base de tout le commerce. Il est, en effet, de l'essence de la propriété que le propriétaire d'une chose ait le droit de renoncer à sa propriété, et de la transférer à un autre, en lui abandonnant la possession de cette chose.

Pour que ce but soit atteint, il faut, avant tout, que celui qui livre, l'auctor, soit propriétaire, et propriétaire capable de disposer de la chose, ou du moins, ait, à quelque autre titre, le pouvoir de l'aliéner.

Il faut ensuite qu'il ait l'intention de transférer sa propriété à l'autre, et que, de son côté, celui à qui la chose est livrée ait l'intention d'acquérir la propriété. A cela se lie ce principe du droit romain, que la tradition doit être fondée sur une justa causa.

Cela veut dire qu'il doit exister une circonstance extérieure, qui dénote et motive suffisamment, en droit, cette intention des deux parties.

Enfin il faut que, conformément à cette justa causa, qui, par ce motif, doit précéder la tradition, et est dite aussi causa præcedens, la possession de la chose soit transférée à l'acquéreur, ou bien, s'il l'avait déjà auparavant, lui soit laissée en vue de le rendre propriétaire.

Au reste, aucune formalité particulière n'est maintenant exigée en aucun cas, dans le transport de la possession de la chose, depuis l'assimilation des civiles et naturales acquisitiones, ainsi que des mancipi et nec mancipi res.

Per traditionem quoque, jure naturali, res nobis adquiruntur. Nihil enim tam conveniens est naturali æquitati, quam voluntatem domini, volentis rem suam in alium transferre, ratam haberi. Et ideo, cujuscunque generis sit corporalis res, tradi potest, et a domino tradita alienatur. § 40, I., п, De rer. div.

Nihil autem interest, utrum ipse dominus tradat alicui rem, an, voluntate ejus, alius. § 42, I., cod.

Accidit aliquando, ut qui dominus non sit, alienare non possit, et contra, qui dominus non sit, alienandæ rei potestatem habeat. Nam dotale prædium maritus, invita muliere, per legem Juliam prohibetur alienare, quamvis ipsius sit, dotis causa ei datum.... Contra autem creditor pignus ex pactione, quamvis ejus ea res non sit, alienare potest. Pr. et § 1, I., 11, 8, Quib. alienare licet.

Traditio nihil amplius transferre debet vel potest ad eum, qui accipit, quam est apud eum, qui tradit. Si igitur quis dominium in fundo habuit, id tradendo transfert, si non habuit, ad eum, qui accipit, nihil transfert. ULPIAN., fr. 20, pr., D., XLI, 2, De udq. rer. dom.

Numquam nuda traditio transfert dominium, sed ita, si venditio, aut aliqua justa causa præcesserit, propter quam traditio sequeretur. PAULUS, fr. 31, pr., D., eod.

Traditionibus et usucapionibus dominia rerum, non nudis pactis transferuntur. DIOCLETIANUS, c. 20, C., 11, 3. De pactis.

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Adjudication.

Il arrive souvent que, dans un procès sur la propriété, le juge, en rendant sa sentence, prononce que quelqu'un a la propriété en vertu de quelque cause légale. Mais ce prononcé du juge ne fonde pas une nouvelle propriété indépendante. Car, bien que le contenu d'un jugement ayant force de chose jugée soit réputé la vérité, cet effet est restreint aux personnes qui étaient parties dans le procès. Par cette raison même un jugement peut donner naissance à de nouvelles obligations entre les parties, parce que ces obligations ne doivent produire leurs effets qu'entre les deux personnes intéressées, le créancier et le débiteur; mais il ne peut donner naissance à un nouveau droit de propriété, ni à d'autres droits généralement obligatoires, parce que celui à qui ils seraient attribués par le juge, ne pourrait invoquer efficacement cette sentence contre un tiers, par qui il voudrait faire reconnaître son droit. Toutefois, dès qu'une res judicata a fondé une obligation tendante à obtenir une chose, cette obligation peut être la base d'une justa causa pour la tradition, et alors la propriété peut prendre naissance, selon les principes de la tradition.

Néanmoins, dans un cas, le prononcé même du juge remplace la tradition et fonde par lui seul une nouvelle propriété. Lorsque, par suite d'un procès en partage, d'un judicium divisorium, sur la demande de copropriétaires, il est procédé en justice à la division d'une chose qui est reconnue leur appartenir en commun, et que, pour faire cesser cette indivision, la sentence judiciaire adjuge en totalité à l'un

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