Sa bouche, au sein des fleurs, savoure les délices D'un miel pur déposé sur leurs brillans calices; Goûte ces végétaux, les premiers alimens, D'une terre encor vierge utiles ornemens; Un être manque à l'homme, et manque à l'univers. POÈME SUR L'ASSEMBLÉE DES NOTABLES, COMPOSÉ EN 1787 (1). QUAND des républicains étaient maîtres du monde, Quand le Tibre, orgueilleux de leur porter son onde, (1) L'auteur avait vingt-trois ans. Fier encor de ce jour où la terre étonnée Et Brutus, héritier du vengeur des Romains, Jurant de réparer les fautes de vingt rois, « Citoyens ! qu'aujourd'hui rien ne soit oublié ; « Ajoutez, leur dit-elle, et tranchez sans pitié. Qu'en vos heureuses mains l'État se renouvelle : « Hâtez-vous d'affermir sa force qui chancelle. « Cette masse imposante, et dont l'œil est surpris, << N'étalerait bientôt que de honteux débris. Édifice du temps, c'est le temps qui l'outrage; « Plus d'un cruel abus s'appelle encore usage. « Les momens sont venus, joignez tous vos efforts. « J'ai vu les protestans bannis loin de mes bords, « De cités en cités cherchant une patrie, «Y porter des trésors, enfans de l'industrie. ༥ « Les arts et le travail accompagnaient leurs pas; « Errans, désespérés, ils me tendaient les bras. <«< Durant un siècle entier j'ai pleuré leur absence : « Roi, sèche, il en est temps, les larmes de la France. « Vengeur de l'Amérique, et protecteur des mers, « Laisse adorer ton Dieu sous des cultes divers. « L'État ne doit venger que la commune injure. «< Dieu veut-il un hommage imposteur ou parjure? « Sans prévenir, du moins, le jugement des cieux, « Rends aux fils les climats qu' 'habitaient leurs aïeux. « D'excellens citoyens fréquentaient peu nos temples; « Et sans aller bien loin te chercher des exemples, « De ton prédécesseur Maurice (1) fut l'appui : « On peut servir son roi sans penser comme lui. << L'ignorance a long-temps peuplé les monastères. <«< Humbles, pauvres d'abord, de saints célibataires, « Sous le dais, tout à coup, cherchant des protecteurs, « Honorés, agrandis, souvent usurpateurs, << Stérilement dévots, traînaient dans le silence << Des jours longs et pesans, filés par l'indolence. (1) Le maréchal de Saxe. «< Enfin l'homme stupide, à l'oubli consacré, « De citoyens vivans ces tombeaux se remplirent; « Vois-tu tous ces enfans, les victimes d'un père, « Et ces vœux sans retour qu'ils n'avaient point formés. « Martyrs ou fainéans, laisse-les disparaître ; ༥ Éteints, et non détruits, qu'ils meurent sans renaître; « L'État ne leur doit rien, ils n'ont rien fait pour lui; ༥ « Et le fisc épuisé redemande aujourd'hui « Cet or long-temps oisif, conquis sur la faiblesse. « Bientôt, juste héritier d'une injuste richesse, и Tu pourras accueillir de bienfaisans regards « Les essais du travail, les prodiges des arts. « Des moissons vont couvrir les landes infertiles; « Les cités vont s'orner de monumens utiles; « D'innombrables vaisseaux élancés de nos ports << Du Gange et de l'Indus vont chercher les trésors. |