EPISTRES DISCOURS AU ROY. EPISTRE 11. lestoit presque jour, et le ciel sousriant, Blanchissoit de clairté les peuples d'Orient; L'aurore aux cheveux d'or, au visage de [roses, Desja, comme a demy descouvroit toutes choses; Et les oyseaux perchez en leur feüilleux séjour, Commençoient, s'esveillant, à se plaindre d'amour : Quand je vis en sursaut une beste effroyable, Chose estrange à conter, toutesfois véritable! Qui plus qu'une hydre affreuse à sept gueules meu[glant, Dans ce discours allégorique, l'auteur loue Henri le Grand d'avoir dissipé la ligue, et étouffé les guerres civiles qui désoloient le royaume de France. Cette pièce parut dès la première édition, en 1608. 2 Quand je vis en sursaut.] Quand je songeai que je voyois en sursaut, avec frayeur. 3 La ligue. Avoit les dents d'acier, l'œil horrible et sanglant; Tout y reluisoit d'or, et sur la broderie La mer aux deux costez cest ouvrage bordoit, * Une nymphe fuyante.] La France. Malherbe avoit de l'aversion pour les fictions poétiques, et après avoir lu cette pièce, il demanda à Regnier en quel temps cela étoit arrivé, disant qu'il avoit toujours demeuré en France depuis cinquante ans, et qu'il ne s'étoit point aperçu que la France se fût enlevée hors de sa place. Vie de Malherbe, page 14. Malgré toute l'autorité de Malherbe, cette allégorie ne me semble ni obscure ni déplacée. 5 Henri le Grand. S'employant.] C'est ainsi qu'on lit dans la première édition, de 1608; dans celles de 1612 et 1613 il y a s'em→ ployoient. D'avecque l'espagnol le françois héritage', Ce prince, ainsi qu'un Mars, en armes glorieux, 7 Les Pyrénées. 8 De Leucate.] Toutes les éditions faites pendant la vie de l'auteur portent l'Aucate avec une apostrophe. Leucate, village de France près de Perpignan, sur la Méditerranée. 9 Qui la greve.] Qui l'afflige, l'inquiète; du latin gravare. N'est plus d'usage dans ce sens. L'infinitif grever est encore employé en jurisprudence. 10 Allusion à la bataille de Coutras, gagnée par Henri IV, alors roi de Navarre, sur le duc de Joyeuse, le 20 octobre 1587. Le matin en chemise il surprit les tranchées 11 ̧ Plus bas, dessus le ventre, au naïf contrefaite, Estoit, prés d'Amiens, la honteuse retraite 11 Henri IV, s'étant campé sous le canon de Dieppe avec quatre mille cinq cents hommes, empêcha la prise de cette place, et battit le duc de Mayenne, qui vouloit l'attaquer avec dix-huit mille hommes dans ses retranchements. Ce fut un mardi matin, 20 septembre 1589, six semaines après la mort de Henri III. 12 Le roi d'Espagne s'étant déclaré ouvertement pour la ligue le 8 mars 1590, Henri IV assiégea Paris au mois de mai suivant, el cette ville fut remise au pouvoir de Sa Majesté par le comte de Brissac, qui en étoit gouverneur, le 22 mars 1594. 13 La bataille d'Ivry, près de Mantes, fut gagnée par le roi sur le duc de Mayenne, le 14 mars 1590. Du Bartas a fait un cantique sur la victoire d'Ivry. 14 Au dieu de la bataille appendoit les escus.] Au dieu des batailles consacroit les boucliers. 45 Ville de Bourgogne, près de laquelle Henri IV, avec environ deux cents chevaux, défit quinze mille hommes commandés par le duc de Mayenne et par le connétable de Castille, le 3 juin 1595. Cette victoire acheva de déconcerter la ligue: le duc de Mayenne et le duc de Nemours son frère, qui en étoient les chefs, furent contraints d'avoir recours à la clémence du roi. Du puissant archiduc 16, qui craignant son pouvoir, Aux rebelles vaincus il usoit de douceur : Vertu rare au vainqueur, dont le courage extresme 19 Maint puissant ennemy, domté par sa vertu, Languissoit dans les fers sous ses pieds abbatu, Tout semblable à l'envie, à qui l'estrange rage De l'heur de son voisin enfielle le courage Hideuse, bazanée, et chaude de rancœur Qui ronge ses poulmons, et se masche le cœur. Après quelque priere, en son cœur prononcée, 20 16 La ville d'Amiens ayant été surprise par les Espagnols, Henri IV en forma le siége. L'archiduc d'Autriche parut pour la secourir avec une armée de dix-huit mille hommes de pied et de quatre mille chevaux, mais il fut vigoureusement repoussé; les assiégés capitulèrent, et cette place revint au pouvoir du roi en 1597. 17 L'en rendoit.] Il faut lire ainsi, comme il y a dans la première édition, et non pas s'en rendoit, qui est dans toutes les autres. 18 La couronne de chêne étoit décernée à celui qui avoit sauvé la vie à ses concitoyens, ob cives servatos. 19 Enfielle le courage. Remplit le cœur de fiel et d'amer tume. 20 Rancœur. Vengeance. Inusité aujourd'hui. Rancune l'a remplacé incomplétement. |