Page images
PDF
EPUB

des copartageants la chose jusque-là commune, il naît, à proprement parler, de cette res judicata une obligatio, pour l'autre copartageant, de faire au premier la tradition de sa part de la chose. Cependant cette tradition est ici superflue; l'effet qu'elle produirait résulte de la res judicata elle-même, puisque la copropriété antérieure est changée immédiatement en propriété exclusive. A cet égard, Fadjudicatio se rattache très-naturellement à la tradition, et a, comme elle, la nature d'un mode d'acquisition dérivé.

Quod autem istis judiciis (divisoriis) alicui adjudicatum sit, id statim ejus fit, cui adjudicatum est. § 7, J., iv, 17, De officio jud.

$ 96.

Acquisition des accessoires, accessiones.

Il résulte déjà de la seule notion générale de la propriété que tout ce qui est produit immédiatement par les forces organiques de notre chose tombe de soi-même, dès sa naissance, dans notre propriété en l'augmentant, comme une accessio, un accrois

sement.

Mais le droit romain a donné, par des règles positives, une extension considérable à ce principe. Car certaines choses qui n'ont pas été produites par les forces organiques de notre chose, mais qui y ont été unies d'une manière permanente, accidentellement ou exprès, par un événement naturel ou par l'action de l'homme, sont aussi considérées comme de simples accroissements, accessiones, de notre chose, qui, par un motif quelconque, se trouve jouer le rôle principal et former la chose principale; et en cette qualité elles nous sont attribuées dès l'instant de

leur union. A cette dernière espèce d'accession appartiennent nommément les cas suivants.

1. L'augmentation, l'agrandissement de notre fonds par alluvio, par vis fluminis, par insula in flumine publico nata, et enfin par ce qu'on appelle alveus derelictus. Toutes ces accessions dues à l'eau présupposent que notre fonds, comme ager arcifinius, a, du côté d'un flumen publicum, ses limites naturelles au fleuve même, sans que l'état lui ait assigné d'autres limites artificiellement fixées

arpentage.

par un

2. Tout ce qui par construction, ensemencement et plantation, est uni à notre sol d'une manière permanente, augmente, comme accession, notre propriété foncière.

3. Il est des cas où la chose mobilière de l'un est unie à celle de l'autre en telle sorte que, par l'effet de cette union, les deux choses, devenues parties intégrantes d'un même tout, au sein duquel l'une des choses a disparu complétement, forment maintenant un seul corps. Alors celui dans la chose duquel vient se perdre ainsi la chose d'un autre, parce que la première figure, sous un certain rapport, comme la partie principale du nouveau tout, celui-là, dis-je, acquiert, en sus de la propriété de sa chose primitive, la propriété de la chose d'autrui qui s'y est jointe. Cela peut arriver pour des matières ou sèches, ou liquides, et la question de savoir quelle est celle des deux choses unies qui doit être ensuite considérée comme la chose principale, quelle est, au contraire, celle qui doit être considérée comme une simple accessio, et qui, par conséquent, est absorbée dans l'autre, se décide soit par la destination naturelle des choses, soit par des règles positives. Les jurisconsultes romains eux-mêmes avaient par

fois des manières de voir divergentes sur des cas particuliers d'acquisition de ce genre.

Item ea, quæ ex animalibus dominio tuo subjectis nata sunt, eodem jure tibi adquiruntur.

Præterea quod per alluvionem agro tuo flumen adjecit, jure gentium tibi adquiritur. Est autem alluvio incrementum latens. Per alluvionem autem id videtur adjici, quod ita paulatim adjicitur, ut intelligere non possis, quantum quoquo momento temporis adjiciatur. Quodsi vis fluminis partem aliquam ex tuo prædio detraxerit, et vicini prædio appulerit, palam est, eam tuam permanere. Plane si longiore tempore fundo vicini hæserit, arboresque, quas secum traxerit, in eum fundum radices egerint, ex eo tempore videntur vicini fundo adquisitæ esse.

Insula, quæ in mari nata est, quod raro accidit, occupantis fit; nullius enim esse creditur. At in flumine nata, quod frequenter accidit, siquidem mediam partem fluminis teneat, communis est eorum, qui ab utraque parte fluminis prope ripam prædia possident, pro modo latitudinis cujusque fundi, quæ latitudo prope ripam sit. Quod si alteri parti proximior sit, eorum est tantum, qui ab ea parte prope ripam prædia possident.

. Quodsi, naturali alveo in universum derelicto, alia parte fluere cœperit, prior quidem alveus eorum est, qui prope ripam ejus prædia possident, pro modo scilicet latitudinis cujusque agri, quæ latitudo prope ripam sit. § 18-24, I., 1, 2, De rer. divis. In agris limitatis jus alluvionis locum non habere constat. FLORENTINUS, fr. 16, D., XLI, 1, De adq, rer. dom.

Qnum in suo solo aliquis ex aliena materia ædificaverit, ipse dominus esse intelligitur ædificii, quia omne, quod inædificatur, solo cedit.

Si Titius alienam plantam in suo solo posuerit, ipsius erit; et ex diverso, si Titius suam plantam in Mævii solo posuerit, Mævii planta erit, si modo utroque casu radices egerit.

Litteræ quoque, licet aureæ sint, perinde chartis, membranisque cedunt, ac solo cedere solent ea, quæ inædificantur, aut inseruntur.

Si quis in aliena tabula pinxerit, quidam putant, tabulam picturæ cedere, aliis videtur pictura, qualiscunque sit, tabulæ cedere. Sed nobis videtur, melius esse, tabulam picturæ cedere. Ridiculum est enim, picturam Apellis vel Parrhasii in accessionem vilissimæ tabulæ cedere. $ 29, 31, 33 et 34, I., 1, 2, De rer. divis.

S 97.

Acquisition des fruits d'une chose appartenant à autrui.

En règle générale et par la nature même de sou droit, le propriétaire de la chose a seul le droit de s'en approprier les fruits. Il les acquiert, en vertu de son droit de propriété, par leur production même et dès le moment qu'ils sont produits (voy. le paragraphe précédent).

Cependant il peut exceptionnellement arriver que, par des raisons particulières, on soit autorisé à s'approprier les fruits de la chose d'autrui.

Le plus simple des cas de ce genre est celui où l'on perçoit les fruits avec le consentement du propriétaire de la chose. Tel est le cas de l'usufruitier, du fermier, de l'emphytéote.

On acquiert alors dans le fait, la propriété entière et illimitée des fruits, non pas par leur production, mais seulement par leur séparation, c'est-àdire du moment où ils sont détachés physiquement de la chose principale, et deviennent ainsi des choses indépendantes. Car la chose frugifère reste toujours chose d'autrui à l'égard de celui qui acquiert les fruits.

Souvent même il faut encore pour cela, la perception, c'est-à-dire l'appréhension que celui qui a droit de jouir fait de la possession juridique des fruits détachés.

La simple séparation suffit lorsque celui-ci, d'après l'espèce de droit qui lui appartient, est traité comme possesseur juridique de la chose frugifère, et a ainsi, même avant leur séparation, la possession juridique des fruits, en même temps que de

la chose principale. Mais, quand le droit romain ne lui attribue qu'une simple possession naturelle sur la chose principale, il doit alors manifester sa volonté de s'approprier les fruits, par un acte particulier de prise de possession, par la perception. Car ce n'est que par là qu'il obtient la possession juridique des fruits séparés, nécessaire pour l'acquisition de la propriété de ces fruits.

Celui qui, sans le consentement du propriétaire, et comme malæ fidei possessor, recueille les fruits de la chose d'autrui, n'acquiert naturellement ainsi aucun droit à ces fruits. Il doit absolument les restituer au propriétaire de la chose sur sa demande, ou, s'il les a déjà consommés, payer leur valeur. Au contraire, celui qui les a recueillis comme bonæ fidei possessor, les acquiert, au moins en ce sens qu'il est pleinement autorisé à les consommer et n'est plus par conséquent responsable des fruits consommés de bonne foi, envers le propriétaire qui revendique la chose principale 1.

Naturellement il peut aussi, quand il ne consomme pas ces fruits, en acquérir, par l'usucapion3, une propriété complète et irrévocable.

Si quis a non domino, quem dominum esse crediderit, bona

Je suis convaincu, contre l'opinion commune, que, du temps des jurisconsultes classiques, le possesseur de bonne foi n'était pas tenu de restituer les fruits non consommés, et que par la perception il faisait ces

fruits siens irrévocablement.

Voy. mon Commentaire du livre VI des Pandectes (à la suite de l'Exposé des principes sur la propriété, cité plus haut), sur la L. 48, D., De rei vindicatione, p. 305-312. (Note du traducteur.)

2 L'usucapion, dans mon opinion, est ici tout à fait superflue : les fruits ont appartenu complétement au possesseur dès le moment de la perception faite de bonne foi. Lana... quoniam in fructu est, nec usu capi debet, sed statim (bonæ fidei) emptoris fit, dit Paul, L. 4, § 19, D., XLI, 3, De usurp. et usucap. (Note du traducteur.)

« PreviousContinue »