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Libertini sunt, qui ex justa servitute manumissi sunt. Pr., I., 1, 5, De libertin.

S 73.

Homines sui vel alieni juris.

Tous les hommes sont soumis à la puissance publique de l'état, même les hommes libres et les citoyens. Tous les hommes sont donc égaux entre eux sous ce rapport. Mais, à côté de cette puissance de droit public, le droit romain reconnaissait encore certaines puissances, certaines dominations d'une nature fort différente, et de pur droit privé, qui appartiennent à un homme sur d'autres hommes libres ou non libres, et portent le caractère d'un simple rapport de famille.

La dénomination commune de ces puissances privées était jus, dans une acception étroite de ce mot, ou potestas, dans le sens large de cette expression.

Celui qui n'était assujetti à aucune puissance semblable, qui était ainsi complétement indépendant sous le rapport du droit privé, ne se trouvant soumis qu'à la puissance publique de l'état, s'appelait homo sui juris, suæ potestatis.

Celui-là, au contraire, qui était sous une de ces puissances privées, était appelé homo alieni juris, alieno juri subjectus.

L'expression paterfamilias, materfamilias, désigne aussi un homo sui juris, comme l'expression filiusfamilias, filiafamilias, désigne un homo alieni juris. Toutefois, ces expressions ont ordinairement une signification plus étroite: elles se restreignent au rapport de la patria potestas et de la manus, selon qu'on y est soumis ou qu'on en est exempt.

Le droit, jus, sur des hommes non libres, n'était que d'une seule espèce : c'était la dominica potestas, dont il a été traité plus haut, et à laquelle était soumis le servus proprement dit. Elle s'appliquait et aux hommes et aux femmes, et enlevait à l'homo alieni juris absolument toute capacité de droit.

Au contraire, les jura sur des hommes libres étaient de trois espèces :

La première était la patria potestas, cette sévère domination de famille, appartenant à un ascendant paternel mâle sur ses enfants, petits-enfants, arrièrepetits-enfants, etc., issus d'un mariage, sans distinction de sexe.

La seconde était la manus, ce rigoureux pouvoir de famille, qui compétait au mari sur sa femme, lorsque celle-ci in manum mariti convenerat, au moyen de certaines formalités particulières. Cette manus reçut plus tard une extension assez singulière à des cas autres que celui du mariage, en sorte qu'on pouvait avoir une femme in manu, même sans être son mari, partant autrement que matrimonii causa; mais on ne peut jamais avoir in manu qu'une femme.

La troisième était le mancipium, qui se liait étroitement aux deux autres : car la patria potestas, comme la manus, donnait à celui qui en était revêtu le droit de faire passer, par la mancipation, les personnes soumises à sa puissance, dans un état tout particulier d'asservissement à autrui. Si le chef de famille usait de ce droit, le pouvoir que le tiers acquérait sur les personnes de l'un ou l'autre sexe qui lui étaient mancipées, s'appelait mancipium.

Comme ces trois jura seront plus amplement développés à l'occasion des rapports de famille auxquels ils se lient directement, c'est-à-dire quand nous exposerons les relations entre ascendants et

descendants et le mariage, nous nous contenterons de placer ici quelques remarques comparatives.

Tous ces pouvoirs sur des personnes libres remontaient à des temps très-reculés; c'étaient des émanations et des vestiges de l'ancienne constitution patriarcale; ils étaient fondés sur le strict jus civile, tandis que la dominica potestas était déclarée par les Romains être du jus gentium.

Ces trois pouvoirs étaient très-rigoureux dans leur forme originaire; les Romains eux-mêmes les comparaient et les assimilaient souvent à la dominica potestas. Ils se rapprochaient effectivement, sur plusieurs points importants et d'une manière trèsfrappante, de la puissance du maître sur l'esclave; car les personnes qui y étaient assujetties étaient aussi incapables que les esclaves d'avoir des biens propres; comme les esclaves, tout ce qu'elles acquéraient elles l'acquéraient pour celui à qui elles étaient soumises, et elles étaient, par conséquent, privées de toute indépendance sous le rapport des biens. Cependant ces pouvoirs se distinguaient essentiellement de la dominica potestas, en ce qu'ils n'enlevaient jamais la liberté et l'ingénuité, qu'ils étaient même compatibles avec le droit de cité, et laissaient, en général, subsister la capacité d'avoir un état et une famille, jura status et familiæ. Cela était vrai même du mancipium, quoique celui-ci fût le plus dur de ces trois droits quant à ses conséquences pour la personne qui y était soumise, et plaçât cette personne dans une condition bien rapprochée de la servilis conditio. Elle était servi loco, tanquam servus, mais elle restait pourtant encore liberum caput, et était protégée contre tout traitement injurieux qu'on aurait voulu lui infliger à la manière d'un esclave.

Terminons par cette observation historique, que

tous les pouvoirs de famille sur des personnes libres perdirent peu à peu de leur sévérité, surtout depuis le régime impérial, et que même quelques-uns finirent par disparaître complétement. Cela est vrai absolument de la manus mariti, et au moins jusqu'à un certain point du mancipium, puisqu'il n'est resté de ce dernier que quelques faibles traces.

Sequitur de jure personarum alia divisio. Nam quædam personæ sui juris sunt, quædam alieno juri subjectæ. Sed rursus earum personarum, quæ alieno juri subjectæ sunt, aliæ in potestate, aliæ in manu, aliæ in mancipio sunt. GAI., 1, § 48 et 49. Sui juris sunt familiarum suarum principes, id est, paterfamilias, itemque materfamilias. ULPIAN., Fragm., IV, § 1.

Nam civium romanorum quidam sunt patresfamiliarum, alii filiifamiliarum, quædam matresfamiliarum, quædam filiæfamiliarum. Patresfamiliarum sunt, qui sunt suæ potestatis, sive puberes, sive impuberes, simili modo matresfamiliarum. Filiifamiliarum et filiæ, quæ sunt in aliena potestate. ULPIAN., fr. 4, D., 1, 6, De his, qui sui vel al.

CHAPITRE III.

DU STATUS CIVITATIS EN PARTICULIER.

$ 74.

Notion du droit de cité; manière de l'acquérir et de le perdre.

Il est dans la nature des choses que plus un état est puissant et jaloux de sa grandeur et de son indépendance, plus d'ailleurs la constitution politique accorde à chaque citoyen une part directe au gouvernement, plus aussi s'élève la valeur, l'importance du droit de cité. De là le prix qu'on attachait dans l'origine au second status, le status civitatis, dont la perte constituait la media capitis deminutio. Celui qui ne l'avait pas s'appelait peregrinus, et même ancien

nement hostis, et il était, dans le fait, primitivement assimilé à un ennemi, c'est-à-dire privé de tout droit. Plus tard, on lui reconnaissait pourtant la jouissance du jus gentium, et l'on ne lui refusait que la participation au jus civile proprement dit, comme proprium jus civium romanorum.

Les droits particuliers compris dans la civitas romana étaient les uns d'une nature politique, puisque la participation au gouvernement de l'état en dépendait, tels étaient le jus suffragii et le jus honorum; les autres plutôt d'une nature privée, notamment le jus commercii et le jus connubii. Cependant ces derniers avaient aussi, surtout dans les premiers temps, un côté politique important.

Le droit de cité romaine était acquis :

1° Par la naissance, quand les parents, ou au moins celui dont l'enfant suit la condition, étaient citoyens romains;

2° Par l'affranchissement sous certaines conditions;

3° Par une concession spéciale, accordée originairement par le peuple et le sénat, plus tard par l'empereur, tantôt en faveur de populations ou de villes entières, tantôt en faveur de particuliers.

Le droit de cité se perdait, pour des populations entières, par le retrait prononcé comme punition, pour les particuliers, soit par la perte de la liberté, base du droit de cité, soit, sans maxima capitis deminutio, par la renonciation volontaire, ce qui comprend aussi l'acceptation du droit de cité dans un état étranger, puisque celui-ci était incompatible avec la conservation du droit de cité romaine; soit enfin par suite de quelques peines, de l'aquæ et ignis interdictio dans les anciens temps, de la déportation sous les empereurs.

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