<< hâte de louer en abrégé, en annonçant que dans << un autre ouvrage on louera plus en détail; com<< ment, et toujours dans le même but, on mêle à << de grands événemens de petites anecdotes; com<< ment on érige son avilissement en culte; com«< ment on espère qu'un homme si utile et si grand « voudra bien avoir long-temps pitié de l'univers; «< comment enfin, dans un court espace, on trouve « l'art d'épuiser toutes ces formules et tous ces <<< tours de la bassesse, il n'y a qu'à lire ces soixante «< pages, et surtout les vingt dernières. Le pané<< gyriste de Tibère devait l'être de Séjan; aussi, << dans le même ouvrage, Séjan est-il peint comme <«< un grand homme; on nous apprend qu'il fut << choisi pour seconder Tibère, parce que c'est la règle que des hommes supérieurs emploient « des hommes de génie; enfin, dans les dernières << lignes, la servitude à genoux implore haute<«< ment tous les dieux de Rome pour demander, « au nom de l'univers, la conservation de qui? «< de l'empoisonneur de Germanicus, et du monstre « de Caprée. On dit que ce Velleïus Paterculus << fut enveloppé dans la disgrâce de Séjan et pé<«< rit avec lui. Ainsi, pour salaire de ses men<< songes, il eut l'ingratitude d'un tyran, une vie << honteuse, une mort sanglante et le déshonneur « de la postérité. C'était bien là la peine d'être <<< vil!»> Nous ne nous permettrons aucune réflexion, nous rappellerons seulement que le plus célèbre de nos critiques n'a pas craint d'ajouter foi aux assertions d'un tel écrivain; il fallait, ce me semble auparavant, attaquer le jugement de Thomas, s'inscrire en faux, prouver que Velleïus Paterculus était excusable d'avoir loué Auguste, Tibère et Séjan; alors il eût eu le droit bien acquis de blâmer Juvénal de n'avoir pas fait brûler quelque encens sur l'autel de l'astucieux Octave. D'un siècle corrompu la publique impudence, Les affranchis par l'or achètent la naissance, Trafique impudemment du nom de la vertu. Par de faux cheveux blonds son front est ombragé; Ce jugement, conforme à la saine raison, à la justice, ne diffère qu'en un seul point de celui de Boileau; Chénier ne parle point de l'injuste reproche fait à Juvénal par le satyrique français; mais son silence est expressif, et l'on voit avec plaisir qu'à mesure que la nation française abandonne cette frivolité qui lui fit tant d'ennemis en Europe, les auteurs graves et sévères de l'antiquité sont mieux appréciés par elle. En vain La Harpe a-t-il voulu faire renaître parmi nous cet esprit de légèreté, d'insouciance, de persiflage même, que l'on veuille me passer cette expression, elle peut seule bien rendre ma pensée; le marivaudage a été proscrit, et l'école de Dorat n'a pu se soutenir : comme ces jolis insectes dont parle Aristote, que le même jour voit naître et mourir, on ne l'a vue jouir que d'un moment d'existence. Le bon goût a prononcé son arrêt de mort, et c'est peut-être à Chénier que nous devons notre retour à ces principes sévères qui font rentrer notre littérature dans le cercle duquel jamais elle n'aurait dû s'écarter. RAOUL. Ce littérateur estimable que je viens enfin de lire dans sa préface, attaqué d'une manière indirecte les détracteurs de Juvénal. En comparant les deux satiriques latins, il a suivi le plan tracé par M. Dussault; mais il n'a pas osé lutter contre M. de DISSERTATION SUR JUVÉNAL. La Harpe ou il ne fallait pas faire une préface, ou bien il fallait montrer à la plupart des littérateurs modernes séduits par le style du moderne Quintilien, qu'on pouvait bien ne pas laisser sans réponse ses arguties spirituelles, mais faibles et dénuées de preuves. Je crois avoir rempli cette tâche, même avec énergie, sans cependant porter atteinte aux droits M. de La Harpe peut avoir que à notre admiration. |