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Sources des

de même nous verrons les obligations verbis et litteris se transformer de telle sorte, que l'élément, nécessaire pour faire naître le lien sanctionné par la loi, se trouvera surtout dans le libre consentement des parties. On n'aura plus à redouter les conséquences de ce que Gaïus appelait lui-même les juris iniquitates.

Quand on recherche les sources des obligations du droit civil, on obligations. voit que les anciens jurisconsultes n'étaient pas d'accord sur la classification à adopter.

1re Source des

Suivant Gaïus : « Obligationes aut ex contractu nascuntur, aut ex << maleficio, aut, proprio quodam jure, ex variis causarum figuris. » Les obligations naissent du contrat, du délit, ou, par application d'un droit particulier, de certains faits variés (1).

Voici donc trois sources d'obligations : 1° le contrat, convention dont nous allons bientôt examiner les caractères; 2° le délit, acte illicite, classé et puni par une loi spéciale; 3° quelque chose de vague et d'indéterminé, variæ causarum figuræ, des faits qui donnent naissance à des obligations civiles, parce que le législateur trouve utile ou équitable de les sanctionner.

Modestin donne une autre division: « Obligamur, aut re, aut verbis, <«< aut simul utroque, aut consensu, aut lege, aut jure honorario, « aut necessitate, aut ex peccato. » L'obligation vient, ou d'une tradition, ou de paroles solennelles prononcées, ou de la réunion de ces deux choses, ou du consentement, ou de la loi, ou du droit honoraire, ou de la nécessité, ou d'un acte illicite (2).

Les Institutes ont adopté une troisième classification, plus simple et plus complète tout à la fois au point de vue doctrinal.

§ 2. Sequens divisio in quatuor species deducitur aut enim ex contractu sunt, aut quasi ex contractu, aut ex maleficio, aut quasi ex maleficio. Prius est, ut de his, quæ ex contractu sunt, dispiciamus. Harum æque quatuor species sunt: aut enim re contrahuntur, aut verbis, aut litteris, aut consensu.

Dans la division suivante, les obligations sont de quatre espèces : elles viennent des contrats, comme des contrats; des délits, comme des délits. Il faut d'abord traiter des contrats; il y en a quatre classes, qui sont formées, par la tradition, ou par les paroles, ou par l'écriture, ou par le simple consentement.

Il y a cependant encore une lacune dans ce paragraphe. Pour tout embrasser, il faut énumérer cinq sources des obligations : 1o la loi; 2o le contrat; 3° les actes assimilés aux contrats par leurs effets, quasi ex contractu; 4° le délit; 5o les actes assimilés aux délits, quasi ex delicto.

PREMIÈRE SOURCE DES OBLIGATIONS D'APRÈS LE DROIT CIVIL.

LA LOI.

1° LA LOI. L'obligation vient de la loi, quand on est contraint à obligations faire une chose sans qu'il y ait eu fait médiat de l'homme et sans Caractères. que la volonté intervienne: « Lex jubet, lex vetat. » Le lien juridique existe par cela seul que le législateur le veut.

Exemples.

(1) F. 4, pr., de obligat. et act. D. 44, 7. = (2) F. 52, de obligat. et act. D. 44, 7.

Nous avons déjà vu un certain nombre d'exemples d'obligations venant directement de la loi.

Dans la théorie de la famille, l'obligation alimentaire imposée à certains parents, la nécessité d'accepter une tutelle testamentaire, légitime ou dative, etc.

Dans les successions, nous avons trouvé des héritiers nécessaires soumis à toutes les charges de l'hérédité, sive velint, sive nolint. Enfin, dans les relations des particuliers avec l'État, on peut citer l'obligation du service militaire, l'impôt direct, etc., etc. Cette classe d'obligations ne peut pas donner lieu à des explications générales, c'est en étudiant chaque partie du droit qu'on voit comment la loi impose directement des actions ou des abstentions.

DEUXIÈME SOURCE DES OBLIGATIONS D'APRÈS LE DROIT CIVIL.

LE CONTRAT.

2e Source

des

obligations.

Définition.

20 LE CONTRAT. En droit romain : « Le contrat est une convention reconnue par le droit civil, qui a un nom déterminé (nomen), une Le contrat. forme spéciale (causam), et à laquelle est attachée une action. » Toutes les expressions contenues dans cette définition demandent une explication particulière.

Le contrat est une convention. On entend par convention la réunion de deux ou plusieurs volontés sur un même point; les Romains disaient « Conventionis verbum generale est. Nam sicuti conve«nire dicuntur qui ex diversis locis in unum locum colliguntur et << veniunt, ita et qui ex diversis animi motibus in unum consentiunt, <«< id est in unam sententiam decurrunt (1). » Le mot convention est général; car, de même qu'on applique le verbe convenire aux personnes qui, partant de divers endroits, se réunissent dans un même lieu, ainsi le fait-on pour celles qui, poussées par des motifs divers, réunissent cependant leurs volontés, c'est-à-dire arrivent à avoir une même pensée.

Il n'y a pas contrat sans cette réunion des deux volontés, c'est le premier élément qui caractérise cette source des obligations : « Nul«lum esse contractum, nullam obligationem quæ non habeat in se « conventionem, Pedius ait. » En droit français, la convention suffit pour faire naître le contrat, si telle est l'intention des parties; en droit romain, il faut encore d'autres conditions.

Le contrat doit avoir un nomen. Pour cela, il faut que la convention rentre dans une catégorie de faits dont la loi civile a dressé la liste. Toute autre réunion des volontés ne sera pas un contrat. C'est là ce que veut dire Ulpien dans les deux textes suivants : « Sed con«ventionum pleræque in aliud nomen transeunt, veluti in em• ptionem, locationem, etc. » Mais la plupart des conventions prennent un nom spécial, comme la vente, le louage (2). « Juris (1) F. 1, § 3, de pactis. D. 2, 14. = (2) F. 1, § 4, de pactis. D. 2, 14.

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Notion du nomen.

Notion de la causa.

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y a quatre classes

1° Contrats

re.

verbis.

gentium conventiones... quæ pariunt actiones, in suo nomine « non stant, sed transeunt in proprium nomen contractus, ut em<< ptio... » Les conventions du droit des gens qui font naître des actions ne gardent pas leur nom, mais elles prennent celui qui est propre à chaque contrat, comme la vente, ete. (1).

Le contrat devait avoir une causa, cela signifie qu'il fallait, pour manifester le consentement, employer une forme extérieure déterminée. Ainsi, dans la stipulation, la causa consistait dans une interrogation suivie d'une réponse faite en se servant des mêmes termes. Si à l'interrogation: Spondesne dare centum? on avait répondu : Promitto, le contrat verbal n'était pas formé, la causa n'étant pas conforme aux règles du droit civil, qui voulait qu'on répondit ici : Spondeo.

Sous le point de vue de la causa, les contrats romains étaient de causarum. divisés en quatre classes: 1o le contrat re: convention dans laquelle la causa se manifestait par la tradition de la chose. Il ne suffit pas de la réunion des deux consentements, il faut encore qu'il y ait eu remise d'un objet. Sous le point de vue du nomen, cette classe comprenait quatre contrats. Le mutuum, le commodatum, le depositum Contrats et le pignus. 2o Les contrats verbis. La causa se trouve ici dans une formule verbale dont la teneur est arrêtée par la loi. Le nomen comprend surtout les stipulations, puis la dictio dotis et la promissio operarum faite par l'affranchi. 3° Les contrats litteris. Dans ces contrats, la causa est l'inscription de la dette et de la créance sur les registres domestiques des parties. Le nomen, pour le droit civil, comprend ce qu'on appelle précisément les nomina transcriptitia a 10 Contrats re in personam, ou bien a persona in personam. 4° Les contrats consensu. Ici, la simple convention suffit; c'est le droit des gens qui a probablement débarrassé des formes antiques lès conventions les plus usuelles; mais les autres caractères du contrat restent, et le nomen ne s'applique qu'à une série de quatre conventions: emptio venditio, locatio conductio, societas, mandatum.

3o Contrats litteris,

consensu.

Le contrat produit une action;

son caractère.

Nous avons dit enfin que la convention appelée contrat produisait une action, c'est-à-dire qu'elle donnait au créancier un moyen juridique de contraindre le débiteur à exécuter son obligation. Ordinairement, chaque contrat a une action particulière, désignée par son nom même; ainsi, pour le commodat, on a l'actio commodati directa vel contraria; pour le dépôt, l'actio depositi; pour la locatio conductio, les actions locati et conducti, etc. Cependant, dans le cas du mutuum, de la stipulation et du contrat littéral, il y a une action générique, la condictio certi ou incerti, suivant la nature de l'objet de la créance.

(1) F. 7, pr., § 1, de pactis. D. 2, 14.

du contrat.

L'acte juridique appelé contrat doit encore attirer notre attention Éléments sous le point de vue de ses éléments et de ses divers caractères. Dans tout contrat, on peut rencontrer trois sortes d'éléments : 1o les éléments essentiels, 2° les éléments naturels, 3° les éléments accidentels.

Eléments

Les éléments essentiels. Ce sont les circonstances indispensables essentiels. à l'existence du contrat; s'il en manque une, il y a absence de l'acte juridique, on dit alors que le contrat est nul. Les éléments essentiels sont au nombre de six en droit romain. Trois ont déjà attiré notre attention, ce sont: 1o le concours des deux volontés; 2o le nomen, et 3o la forme extérieure, causa. Lé quatrième élément essentiel, c'est un motif licite servant de base à la convention, on l'appelle ordinairement la cause impulsive; ce qui fait agir les parties. Si ce motif est contraire aux lois ou aux bonnes mœurs, le contrat në prend pas naissance : ainsi, une personne promet mille sesterces à une autre si elle commet un crime; le motif qui pousse le débiteur à promettre, c'est l'espoir de voir l'autre partie devenir l'auteur d'un fait coupable; la loi ne peut pas reconnaître une convention de ce genre (1). Comme cinquième élément essentiel, il faut au contrat un objet certain, ou du moins qu'on puisse facilement déterminer quand il s'agit de transférer la propriété ou de remettre la possession. Lorsqu'il y a un fait à accomplir, il doit être possible et licite; prenons des exemples: si on promet d'une manière générale une plante, un quadrupède, etc., il n'y a pas contrát, car on ne peut pas savoir sur quel objet porte la convention des parties, in idem placitum (2). Il en sera de même quand on a promis un fait impossible à exécuter. Les jurisconsultes romains disaient : « Impossibilium nulla obligatio, » et ils assimilaient l'impossibilité légale à l'impossibilité physique; dès lors, quand on a promis cœlum digito tangere, ou sacrilegium facere, la convention était considérée comme n'existant pas, les parties étaient censées n'avoir pas eu la volonté sérieuse de faire naître un lien juridique (3). Le sixième élément essentiel à tout contrat, c'est la capacité des parties, ou du moins de celle qui s'oblige; il ne faut pas oublier en effet que si une personne capable traite avec une personne incapable, celle-ci peut ordinairement exiger l'exécution de la convention ou en faire prononcer lá nullité (4).

Quand les éléments essentiels sont réunis, il y a un contrat in genere. Mais quel est-il? à quelle classe appartient-il? C'est ce qui

=

(1) F. 26, 27, 61, 123, de verb. obligat. D. 45, 1. (2) F. 94, de verb. obligat. D. 45, 1. =(3) F. 26, 27, 35, pr., § 1, de verb. obligat. D. 45, 1. -F. 31, 135, 185, de regulis juris. D. 50, 17. (4) F. 13, § 29, de act, empti. D. 19, 1. Dans ce cas, disent les commentateurs, claudicat contractus.

Eléments naturels du

contrat.

Éléments accidentels.

les

modalités.

ne peut être connu que par l'examen de la seconde catégorie des éléments qu'il contient.

Les éléments naturels du contrat résultent des circonstances qui lui donnent son individualité. La modification ou la suppression de ces éléments n'empêcherait point l'existence de la convention, mais ce ne serait plus la même. Ainsi, dans le droit romain, on entend par le mot vente un contrat dans lequel on transfère une chose à titre de propriétaire, moyennant un équivalent consistant en espèces monnayées. Cet équivalent, appelé pretium, est l'élément naturel de la vente; si on le remplace par un objet d'une autre nature, le contrat perd son nomen, prend un autre caractère, il devient un échange; si on supprime l'équivalent, la convention peut encore exister, mais non plus comme vente, ce sera une donation. Dans un autre contrat, le commodat, l'élément naturel, c'est la remise de la jouissance d'une chose à titre gratuit; si on demande en retour une somme d'argent, il y a louage; quand l'équivalent est d'une autre nature, on rentre dans la catégorie des conventions désignées, en droit romain, par les expressions præsto ut des, ut facias, etc... Ainsi, encore une fois, l'élément naturel du contrat se trouve dans la partie de la convention qui constitue son individualité.

Les éléments accidentels. Ce sont des conventions accessoires que Ce sont la volonté de l'homme joint au contrat pour en modifier l'existence, la durée ou les effets; c'est pour cela qu'on les appelle modalités. Ainsi, Séius promet mille sesterces, voici le contrat dans son expression la plus simple; mais il peut dire qu'il payera seulement dans six mois, il y a là un élément nouveau, un terme, modalité qui porte sur l'exécution de la promesse, etc. La suppression des éléments accidentels n'empêche pas le contrat d'exister avec ses caractères propres.

Effets

du contrat.

une

En résumé:

Les éléments essentiels sont les circonstances dont la réunion donne la vie au contrat; en général, si l'une d'elles disparaît, il y a nullité, absence d'acte juridique.

Les éléments naturels sont les circonstances qui donnent au contrat son individualité, qui lui impriment un caractère servant à le distinguer des autres actes du même genre.

Les éléments accidentels sont les circonstances que l'homme introduit volontairement dans la convention, pour modifier son état primitif.

Le contrat, une fois formé, a pour effet immédiat de faire naître Il fait naître une ou plusieurs obligations, tantôt certaines, tantôt éventuelles, s'il obligation. y a eu condition jointe à la convention. Si le contrat produit une seule obligation, les auteurs modernes disent qu'il est unilatéral;

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