Page images
PDF
EPUB

C. La condemnatio.

Elle existe dans toutes les formules autres que les actions préjudicielles; sous le système formulaire, elle est essentiellement pécuniaire.

§ 48. Omnium autem formularum quæ condemnationem habent, ad pecuniariam æstimationem condemnatio concepta est; itaque et si corpus aliquod petamus, velut fundum, mancipium, vestem, mutatum, judex non ipsam rem condemnat eum, cum quo actum est, sicut olim fieri solebat, sed æstimata re, pecuniam eum condemnat.

S 49. Condemnatio autem vel certæ pecuniæ in formula ponitur, vel incertæ.

Dans toutes les formules où il y a Gaius, C. IV. une condamnation, elle est ramenée à une estimation pécuniaire; c'est pourquoi, lors même que nous demandons un corps quelconque, comme un fonds, un esclave, un vêtement, le juge ne condamne pas, comme autrefois, le défendeur à rendre la chose, mais bien à payer son estimation en argent.

Dans la formule, la condamnation contient, soit une somme certaine, soit une somme incertaine.

Ordinairement, le caractère de la condemnatio dépend de celui de l'intentio; quand celle-ci sera incertaine, la condemnatio le sera également. Toutefois, la proposition réciproque n'est pas toujours vraie; même quand l'intentio est certaine, la condemnatio pourra présenter des caractères d'incertitude bien marqués. Ainsi, quand on soutient rem suam esse ex jure Quiritium, le magistrat dira au juge de condamner quanti ea res erit; mais encore ici la liberté laissée au juge pourra être plus ou moins grande.

§ 51. Incertæ vero condemnatio pecuniæ duplicem significationem habet; est enim una cum aliqua præfinitione quæ vulgo dicitur cum taxatione, veJuti si incertum aliquid petamus : nam illic ima pars formulæ ita concipitur: JUDEX NUMERIUM NEGIDIUM AULO AGERIO DUNTAXAT X MILLIA CONDEMNA, SI NON

PARET, ABSOLVE. Diversa est quæ infinita est, velut si rem aliquam a possidente nostram esse petamus, id est, si in rem agamus vel ad exhibendum; nam illic ita est: QUANTI EA RES ERIT, TANTAM PECUNIAM NUMERIUM NEGIDIUM AULO AGERIO CONDEMNA; SI NON PARET, ABSOLVITO.

La condamnation peut être incertaine dans un double sens; elle peut d'abord être renfermée dans une limite appelée ordinairement taxatio; par exemple, quand nous demandons quelque chose d'incertain; car, alors, la formule est ainsi conçue : «< Juge, condamne Numérius Négidius, envers Aulus Agérius, jusqu'à concurrence de dix mille; s'il ne te paraît pas devoir, absous-le. »> Sous une autre point de vue, la condamnation peut être infinie; si, par exemple, nous réclamons notre chose possédée par un tiers, c'est-à-dire si nous intentons l'action en revendication ou ad exhibendum; car, alors, on dit « Juge, condamne Numérius Négidius, envers Aulus Agérius, à une somme aussi considérable que cela devra être. >>

Dans les actions in personam, il peut encore arriver que la condamnation soit incertaine, bien que l'intentio contienne un certum; ainsi dans le cas de la deductio: « Utique bonorum emptore agente, « qui, licet de certa pecunia agat, incerti tamen condemnationem <«< concipit (1). »

(1) G. C. IV, S 68.

Gaïns, C. IV.

Mais quand le juge a examiné l'affaire, il faut que sa sentence soit toujours certaine.

§ 52. Judex, si condemnat, certam pecuniam condemnare debet, etsi certa pecunia in condemnatione posita non sit debet autem judex attendere, ut cum certæ pecuniæ condemnatio posita sit, neque majoris, neque minoris summa petita condemnet; alioquin litem suam facit. Item si taxatio posita sit, ne pluris condemnet quam taxatum sit; alias enim similiter litem suam facit minoris autem damnare ei permissum est.

Si le juge condamne, il doit toujours condamner à une somme certaine, même quand elle ne serait pas déterminée dans la condemnatio de la formule. Le juge doit bien faire attention quand la condamnation contient une somme fixe à ne pas accorder au demandeur plus ou moins, car il ferait le procès sien. De même, s'il y a une taxatio, il ne faut pas condamner à plus, car autrement il ferait encore le procès sien; mais on lui permet de condamner à une somme moindre.

Il arrivait cependant quelquefois que le juge n'avait pas les éléments nécessaires pour faire l'estimation. Il se contentait alors de prononcer la condamnation, et les parties demandaient au magistrat de nommer des arbitri, dont la mission consistait à faire le calcul des sommes à payer.

D. L'adjudicatio.

Nous savons que l'adjudicatio est limitée aux trois actions : familiæ erciscundæ, communi dividundo et finium regundorum.

E. La præscriptio.

Enfin la præscriptio pouvait se rencontrer dans toutes les actions in jus ou in factum, civiles ou prétoriennes; c'était un accident résultant des circonstances de la cause. Gaïus nous apprend qué, dans certains cas, la præscriptio remplaçait la demonstratio.

§ 136. Item admonendi sumus, si cum ipso agamus qui incertum promiscrit, ita nobis formulam esse propositam, ut præscriptio inserta sit formulæ loco demonstrationis, hoc modo: JUDEX ESTO; QUOD AULUS AGERIUS DE NUMERIO NEGIDIO INCERTUM STIPULATUS EST, CUJUS REI DIES FUIT, QUIDQUID OB EAM REM NUMERIUM NEGIDIUM AULO AGERIO DARE FACERE OPORTET, et reliqua.

Nous devons également avertir que si nous agissons contre une personne qui nous a promis une somme indéterminée, on nous donne une formule dans laquelle la præscriptio remplace la demonstratio; par exemple : « Sois juge; comme Aulus Agérius a stipulé une somme indéterminée de Numérius Négidius, et que le terme est arrivé, tout ce que tu croiras que Numérius Négidius doive faire ou donner pour cela à Aulus Agérius, etc. »

Il faut remarquer qu'autrefois les præscriptiones avaient lieu, soit pour le demandeur, soit pour le défendeur; mais avec le temps, ce dernier dut employer à leur place les exceptions introduites par le droit prétorien (1).

(1) G. C. IV, S 133.

CHAPITRE II.

DIVISIONS DES ACTIONS REPOSANT SUR LEUR BUT, LEUR NATURE ET LES POUVOIRS ACCORDÉS AU JUGE.

Sommaire.-4. Actions rei vel pœnæ persequendæ.

-2. Actions au simple, au double,

au triple et au quadruple. 3. Actions de droit strict et de bonne foi.
arbitraires.

- 4. Actions

Sous le point de vue de leur nature et du but auquel elles tendent, les actions se divisent en trois classes.

§ 16. Sequens illa divisio est, quod quædam actiones rei persequendæ gratia comparatæ sunt, quædam pœnæ persequendæ, quædam mixtæ sunt.

§ 17. Rei persequendæ causa comparatæ sunt omnes in rem actiones. Earum vero actionum, quæ in personam sunt, hæ quidem, quæ ex contractu nascuntur, fere omnes rei persequendæ causa comparatæ videntur : veluti quibus mutuam pecuniam, vel in stipulatum deductam petit actor, item commodati, depositi, mandati, pro socio, ex empto vendito, locato conducto. Plane, si depositi agetur eo nomine, quod tumultus, incendii, ruinæ, naufragii causa depositum sit, in duplum actionem prætor reddit, si modo cum ipso, apud quem depositum sit, aut cum herede ejus ex dolo ipsius agetur: quo casu mixta est actio.

Actions rei persequenda pœnæ, persequenda

mixto.

tit. VI.

Les actions se divisent en actions ac- Instit., I. IV, cordées pour réclamer une chose, actions qui ont pour but de faire prononcer une peine, et actions mixtes.

Toutes les actions in rem ont pour objet de réclamer une chose. Parmi les actions in personam, celles qui naissent des contrats ont presque toutes le même caractère; ainsi, les actions du mutuum, de la stipulation, du commodat, du dépôt, du mandat, de la société, de la vente, du louage. Cependant, si on agit à l'occasion du dépôt fait dans le cas de tumulte, incendie, ruine, naufrage, le préteur donne une action au double si on poursuit le dépositaire lui-même ou son héritier, s'il a commis un dol; dans ce cas, l'action est mixte.

Le mot fere, dont se sert le jurisconsulte à l'occasion des actions personnelles, fait allusion à des cas assez rares, où le demandeur obtient plus que la chose elle-même; ainsi dans l'action rédhibitoire, qui est quelquefois au double (1).

§ 18. Ex maleficiis vero proditæ actiones aliæ tantum pœnæ persequendæ causa comparatæ sunt, aliæ tam pœnæ, quam rei persequendæ, et ob id mixtæ sunt. Pœnam tantum persequitur quis actione furti: sive enim manifesti agatur quadrupli, sive nec manifesti dupli, de sola pœna agitur nam ipsam rem propria actione persequitur quis, id est suam esse petens, sive fur ipse eam rem possideat, sive alius quilibet; eo amplius adversus furem etiam condictio est rei.

A la suite des actes illicites, il y a des actions dont les unes sont purement pénales, et les autres tout à la fois persécutoires de la peine et de la chose, aussi dit-on qu'elles sont mixtes. Dans l'action de vol, on poursuit seulement la peine, peu importe qu'on agisse au quadruple pour le vol manifeste ou au double pour le vol non manifeste; car, pour la chose elle-même, on a une action particulière, on la revendique, soit contre le voleur, soit contre tout détenteur; contre le voleur, on a en outre la condictio de la chose.

Nous avons expliqué, en traitant du vol, l'utilité qu'il y avait à pouvoir intenter, soit la rei vindicatio, soit la condictio furtiva.

(1) F. 48, de ædilitio edicto. D. 21, 1.

Les actions pénales ne

S 19. Vi autem bonorum raptorum actio mixta est, quia in quadruplum rei persecutio continetur, pæna autem tripli est. Sed ex legis Aquilia actio de damno mixta est, non solum, si adversus inficiantem in duplum agatur, sed interdum et si in simplum quisque agit. Veluti si quis hominem claudum aut luscum occiderit, qui in eo anno integer et magni pretii fuerit: tanti enim damnatur, quanti is homo in eo anno plurimi fuerit, secundum jam traditam divisionem. Item mixta est actio contra eos qui relicta sacrosanctis ecclesiis, vel aliis venerabilibus locis legati vel fideicommissi nomine dare distulerint usque adeo, ut etiam in judicium vocarentur : tunc etenim et ipsam rem vel pecuniam, quæ relicta est, dare compelluntur, et aliud tantum pro pœna, et ideo in duplum ejus fit condemnatio.

L'action des biens enlevés par violence est mixte, parce que dans la poursuite au quadruple il y a la valenr de la chose, et la peine est au triple. L'ac tion de la loi Aquilia est également mixte, non-seulement lorsqu'elle croît au double contre celui qui nie, mais encore souvent lorsqu'on agit au simple. Par exemple, si on tue un esclave boiteux ou borgne, qui, dans le courant de l'année, était entier et avait une grande valeur, on est condamné, comme nous le savons, à payer son plus haut prix. De même est mixte l'action dirigée contre ceux qui ont retardé jusqu'à l'ajournement en justice, de payer les legs et les fideicommis laissés, soit aux églises, soit aux autres lieux vénérables; car, alors, ils doivent payer non-seulement la chose ou la somme laissée, mais encore une fois autant à titre de peine; donc, la condamnation est aux double.

L'intérêt de la division qui nous occupe était fort grand en pra:

passent pas tique; il se trouvait dans la possibilité ou l'impossibilité de pour

contre

les héritiers. suivre les héritiers du débiteur.

Instit., 1. IV, tit. XII.

§ 1. Non autem omnes actiones, quæ in aliquem aut ipso jure competunt, aut a prætore dantur, et in heredem æque competunt, aut dari solent. Est enim certissima juris regula, ex maleficiis pœnales actiones in heredem non competere, veluti furti, vi bonorum raptorum, injuriarum, damni injuriæ. Sed heredibus hujusmodi actiones competunt, nec denegantur, excepta injuriarum actione, et si qua alia similis inveniatur. Aliquando tamen etiam ex contractu actio contra heredem non competit, cum testator dolose versatus sit, et ad heredem ejus nihil ex eo dolo pervenerit. Pœnales autem actiones, quas supra diximus, si ab ipsis principalibus personis fuerint contestatæ, et heredibus dantur, et contra heredes transeunt.

Toutes les actions qu'on a contre une personne d'après le droit civil ou le droit prétorien ne passent pas également contre ses héritiers. Il y a, en effet, un principe incontestable en droit, c'est que les actions pénales ne passent pas contre les héritiers; ainsi l'ac tion de vol, des biens enlevés par violence, des injures, de la loi Aquilia. Mais ces actions compètent très-bien aux héritiers des créanciers, à l'exception de l'action d'injure et de celles qui pourraient lui ressembler. Quelquefois l'action venant même d'un contrat n'est pas donnée contre l'héritier; par exemple, quand le testateur a commis un dol, sans que l'héritier en ait aucunement profité. Les actions pénales dont nous venons de parler passent aux héritiers, et contre eux, s'il y a eu litis contestatio entre les principaux intéressés.

La règle posée dans ce paragraphe est facile à comprendre. En principe, toutes les actions naissant ex contractu ou quasi ex contractu sont transmises aux héritiers ou contre les héritiers, soit du créancier, soit du débiteur. Nous avons cependant signalé quelques exceptions à cette règle. Ainsi, 1o la querela inofficiosi testamenti ne passe aux héritiers de l'enfant exhérédé qu'autant qu'il y a eu litis

instauratio (1); 2° la femme divorcée ne transmet l'action rei uxoriæ à ses successeurs que si elle a mis le mari en demeure (2); 3o l'action résultant de la sponsio et de la fidepromissio s'éteignait avec les auteurs de la promesse (3).

Erreur

pour

le dol.

Il y a cependant quelque chose dans le texte des Institutes qui dans le texte paraît contraire à la généralité de ce principe. Il semble que l'action =en indemnité résultant du dol d'un testateur ne passe pas contre ses héritiers; mais c'est une erreur que les rédacteurs ont commise en voulant remplacer par une autre proposition ce que Gaïus disait des sponsores, dans le § 113 de son quatrième Commentaire. Voici la véritable règle posée par Ulpien: « In contractibus, succes« sores ex dolo eorum quibus successerunt, non tantum in id quod < pervenit, verum etiam in solidum tenentur, id est unusquisque pro ea parte qua heres est (4). » Dans les contrats, les héritiers de ceux qui ont commis un dol en sont responsables, non pas seulement pour ce qui leur est parvenu, mais bien pour le tout, c'est-à-dire chacun proportionnément à ce qu'il prend dans la succession. Le seul sens qu'on puisse donner aux Institutes, c'est que les héritiers, tout en étant tenus pécuniairement du dol de leur auteur, n'ont pas à craindre d'être notés d'infamie pour

1

cet acte.

En matière d'actions pénales, celui qui a souffert du délit transmet son droit à ses héritiers, si ce n'est pour le cas d'injure, dans lequel on considère le silence gardé jusqu'à la mort comme une dissimulatio, c'est-à-dire une renonciation à la poursuite (5).

Dans tous les cas, si les héritiers de l'auteur du délit ne sont pas tenus criminellement, ils doivent toutefois rendre ce qu'ils ont acquis à la suite de l'acte illicite. « Nam est constitutum turpia << lucra heredibus quoque extorqueri, licet crimina extinguan« tur (6). » Il est établi qu'on doit enlever aux héritiers les bénéfices venant d'actes illicites, bien que les poursuites criminelles soient éteintes.

La fin du paragraphe rappelle qu'il y a exception à ce principe quand les parties ont commencé le procès. C'est là un des effets de la litis contestatio, dont nous aurons bientôt à nous occuper. Dioclétien et Maximien résument les deux règles dans la constitution suivante : « Post litis contestationem, eo qui vim fecit, vel concus<«<sionem intulit, vel aliquid deliquit, defuncto, successores ejus « in solidum alioquin in quantum ad eos pervenit conveniri juris

[ocr errors]

(1) F. 6, § 2. F. 8, de inofficioso. D. 5, 2. =(2) Ulp. Reg., tit. vi, § 7. (3) G. C. III, $ 120. (4) F. 457, § 2.-F. 152, § 3, de regulis juris. D. 50, 17. F. 49, de oblig. et act. D. 44, 7, (5) F. 13, de injuriis. D. 47, 40. (6) F. 5, de calumniatorib. D. 3. 6.-. de oblig. et act. D. 44, 7. - F. 4, § 2, de incendio ruina. D. 47, 9.

-F. 35,

« PreviousContinue »