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Pour

le déferer en matière

qu'il y ait

dol.

serment pouvait être attaqué lorsque, postérieurement à la sentence, on découvrait des pièces établissant qu'il y avait eu parjure de l'adversaire (1).

Quant à la fixation des dommages et intérêts par serment, elle ne de dommages peut avoir lieu que s'il y a eu dol de l'adversaire; alors le juge déet interets, il fère le serment à la partie lésée, soit cum taxatione, en fixant un maximum, soit sine taxatione, en laissant toute liberté à celui qui jure; mais dans tous les cas, on peut réduire l'évaluation faite par le demandeur (2). En principe, ce serment n'était pas défére dans les actions de droit strict. « Alias si ex stipulatu vel ex testamento aga<< tur, non solet in litem jurari (3). »

En

TITRE IV.

Force relative des preuves. A qui incombe l'obligation de prouver.

́Sommaire.
tous les cas.

--

1. Principes généraux. - 2. Admission de la preuve testimoniale dans

3. Peut-on prouver par témoins contre les actes écrits? — 4. Qui doit faire la preuve de l'intentio? — 5. A qui incombe la preuve dans les actions négatoires? 6. Dans les exceptiones.

Nous avons déjà dit comment certaines présomptions admettaient la preuve contraire, tandis que d'autres la repoussaient. Quant aux actes écrits, ils faisaient foi quand on représentait l'original; mais on en était venu à ajouter plus de foi aux actes rédigés par les tabellions, et à ceux qui avaient la subscription de trois témoins, qu'aux simples écrits intervenus entre les particuliers (4).

Enfin, on ne considérait pas comme preuves les simples mentions émanées de la partie qui voulait s'en prévaloir; ainsi, les notes, les papiers domestiques devaient être appuyés par d'autres indices; il en était de même quand le créancier mentionnait une nouvelle dette sur un chirographum qu'il avait entre les mains (5).

Sauf quelques exceptions, la preuve testimoniale était admise dans on admet la tous les cas. On disait : « In exercendis litibus, eamdem vim obtinent

principe

preuve

testimoniale

dans tous les cas.

<« tam fides instrumentorum quam depositiones testium. » On pouvait aussi suppléer par témoins à la perte des titres (6).

Mais que fallait-il décider quand il y avait contradiction entre les témoins et les actes écrits; en d'autres termes, pouvait-on prouver outre et contre le contenu aux actes écrits?

=

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(1) F. 31, de jurejuran lo. D. 12, 2. (2) F. 4, § 2-3-4. F. 5, pr., § 1-2-3-4, de in litem jurando. D. 12, 3. (3) F, 6, de in litem jurando. D. 12, 3. — (4) F. 2, de fide instrument. D. 22, 4. L. 10, Cod., si certum, 4, 2. L. 11, Cod., qui potiores, 8, 18. = (5) F. 31, de probat. D. 22, 3 L. 5, 6, 7, Cod., de probationib., 4, 19. — Novelle CXIX, ch. 1. =(6) L. 7, § 11, 15, Cod., de fide instrument., 4, 21. — L. 12, Cod, de probationib., 4, 19. L'ingénuité devait être prouvée par écrit. L. 2, Cod., de testibus, 4, 20.

On ajoute plus

écrits qu'aux témoins.

Le Fragment 10, de probationibus, D. 22, 3, porte : « Census et « monumenta publica potiora testibus esse, senatus censuit. » La de foi aux loi première au Code de testibus, 4, 20, est ainsi conçue : « Contra ⚫ scriptum testimonium, non seriptum testimonium non fertur. » C'est une restitution faite par Cujas d'après les Basiliques, mais le principe est incontestable, car Paul dit dans ses Sentences: « Testes, cum de fide tabularum nihil dicitur, adversus scripturam interrogari non possunt (1). » Il en résulte donc que, d'après les textes de la compilation justinienne, on ajoutait plus de foi aux écrits qu'aux témoignages, et cela avec raison, les preuves préconstituées étant plus rarement falsifiées en vue d'un procès futur. On pouvait, du reste, attaquer à l'aide de témoins un acte pour prouver qu'il était faux, mais il y avait une peine, tantôt de vingt-quatre solides, tantôt du double de la somme portée dans l'acte, quand on avait à tort attaqué l'acte ou dénié sa propre écriture (2).

Nous avons constaté cependant que, dans certains cas, la preuve testimoniale était admise contre les écrits; ainsi, pour l'exception non numeratæ pecuniæ, bien que le chirographum mentionne la numération des espèces, on peut établir par témoignage la fausseté de cette allégation. Il en est de même pour le § 12, de inutilibus stipulationibus, aux Institutes, liv. III, tit. xix. Encore qu'il y ait un écrit établissant la présence des contractants, on peut prouver, par des témoins honorables, per idoneos testes, qu'on a été absent tout le jour dans lequel l'écrit a été fait.

Il faut dire, en résumé, que la preuve testimoniale, admise dans presque toutes les contestations, n'était pas directement opposable aux actes écrits; mais les témoins pouvaient être appelés pour établir la fausseté du titre invoqué.

Cas

où les témoins contre

la

sont crus

les actes écrits.

A qui doit-on

imposer

prouver?

Enfin, à qui incombait le fardeau de la preuve? L'importance de cette question est extrême, puisque jusqu'à ce que la preuve soit necessite de faite, le défendeur n'a rien à redouter. Si le demandeur ne prouve pas l'existence de son droit, l'adversaire est renvoyé du procès sans qu'on examine s'il est fondé, par exemple, à détenir la chose contestée; on applique ici la maxime : « In pari causa melior est causa possidentis; » ni l'un ni l'autre des plaideurs n'a prouvé sa propriété, il n'y a pas de raison pour enlever la possession au défendeur, et pour la donner au demandeur.

les

Il y a trois points à examiner ici : 1o qui doit faire la preuve dans questions ordinaires; 2° dans les actions négatoires, données à l'occasion des servitudes; 3o dans les exceptions.

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Règle générale : Le demandeur

doit

prouver.

Preuve dans
Jes

actions

concernant les

servitudes.

Action confessoire.

Action négatoire.

La règle générale est celle-ci : « Ei incumbit probatio qui dicit, << non ei qui negat; » ce qui signifie : La preuve doit être faite par celui qui élève une prétention, et non par celui qui la repousse (1). On peut encore formuler la règle en disant : C'est à celui qui veut changer l'état de fait existant à établir qu'il en a le droit.

Cependant la question peut se compliquer, et la preuve peut paraître se déplacer, sans que l'on soit cependant en opposition avec la règle que nous venons d'établir. Ainsi, on demande à Titius une somme de dix mille sesterces; il reconnaît bien l'avoir empruntée, mais il prétend qu'il y a eu solutio ou extinction de la dette par tout autre moyen. Ici, la preuve devra être faite par le défendeur, qui devient demandeur à son tour. Puisqu'il reconnaît l'existence du mutuum, la prétention de l'adversaire est prouvée; et, puisqu'il ajoute que le droit est éteint, il faut qu'il le démontre. Justinien exige que cette preuve soit faite par écrit, ou à l'aide de cinq témoins honorables. S'il y avait eu une quittance perdue, on pouvait établir la perte par témoins, sans qu'il fût nécessaire d'en réunir un aussi grand nombre (2).

Encore une fois, dans les procès ordinaires, c'est au demandeur à faire la preuve; le défendeur n'a qu'à lui répondre et à combattre ses allégations.

Lorsqu'il s'agit d'examiner la question de preuves en matière de servitudes, il faut examiner la condition des propriétaires des fonds, et la position de ceux qui prétendent avoir droit aux servitudes.

Dans les procès sur la propriété, il n'y a pas de difficultés; le possesseur doit attendre qu'on vienne l'attaquer, et prouver que le fonds ne lui appartient pas. Il ne lui est point permis de prendre l'initiative et d'aller soutenir que Paul, par exemple, n'est pas propriétaire de la chose dont il est lui-même en possession; cette preuve ne servirait à rien. Bien plus, s'il a perdu la possession, il peut la reprendre, à l'aide des interdits recuperando possessionis.

Mais en matière de servitudes, il y a deux positions différentes. Une personne prétend avoir un droit de passage ou d'usufruit sur mon champ; pour l'établir elle intentera contre moi une rei vindicatio, désignée sous le nom d'actio confessoria, action confessoire; alors la preuve suit la marche régulière, le demandeur doit établir son droit (3).

La seconde position se présente, soit quand une personne exerce déjà sur mon fonds une servitude que je nie exister réellement, soit quand j'apprends que cette personne se prépare à user d'un prétendu

(1) F. 2, 5, § 1, de probationib. D. 22, 3. — F. 2, § 3, familiæ ercisc. D. 10, 2. -F. 2, $1, communi dividundo. D. 10, 3. — (2) L. 18, Cod., de testibus, 4, 20. = (3) F. 5, § 6, si ususfructus. D. 7, 6.

droit que j'entends lui contester. Dans ces deux cas, je puis intenter une action que les textes appellent actio negativa ou negatoria.

Ainsi un propriétaire apprend que Paul son voisin a l'inten- Exemple. tion d'élever sa maison de telle sorte qu'il se trouvera soumis à un stillicidium; il peut intenter une action négatoire pour établir que l'édifice ne doit pas être construit de telle ou telle manière; on dit alors que le demandeur est tout à la fois : « Juris possessor et pe« titor. Nam cum sit nihil innovatum, ille possidet, et ædificantem << me prohibere potest (1). »

Au contraire, le voisin peut avoir déjà bâti, alors il possède le droit : « Sed et si patiente eo ædificavero, ego possessor ero effectus ; » dans ce cas, il faut prendre l'initiative et intenter l'action negatoria.

§ 2. Æque si agat, jus sibi esse de fundo forte vel ædibus utendi fruendi, vel per fundum vicini eundi agendi, vel ex fundo vicini aquam ducendi, in rem actio est. Ejusdem generis est actio de jure prædiorum urbanorum, veluti si agat, jus sibi esse altius ædes suas tollendi, prospiciendive, vel projiciendi aliquid, vel immittendi in vicini ædes. Contra quoque de usufructu et de servitutibus prædiorum rusticorum, item prædiorum urbanorum invicem quoque proditæ sunt actiones, ut, si quis intendat, jus non esse adversario utendi fruendi, eundi agendi, aquamve ducendi, item altius tollendi, prospiciendi, projiciendi, immittendi, istæ quoque actiones in rem sunt, sed negativæ. Quod genus actionis in controversiis rerum corporalium proditum non est: nam in his is agit, qui non possidet; ei vero, qui possidet, non est actio prodita, per quam neget, rem actoris esse. Sane uno casu qui possidet, nihilominus actoris partes obtinet, sicut in latioribus Digestorum libris opportunius apparebit.

tit. VI.

Si quelqu'un agit pour établir qu'il a Instit., l. IV, un droit d'usufruit sur mon fonds ou sur ma maison, ou bien le droit de passer sur les champs de son voisin, ou d'y construire un aqueduc, c'est une action in rem. L'action pour les servitudes urbaines a le même caractère: si on prétend, par exemple, qu'on a le droit d'élever sa maison, le droit de prospect ou de saillie, ou bien encore le droit d'appuyer sa poutre sur le mur de son voisin. Par contre, on a également établi des actions pour l'usufruit, les servitudes rustiques et urbaines; de telle sorte que si on prétend en justice que l'adversaire n'a pas le droit de jouir, de passer, de conduire l'eau, d'élever sa maison, d'avoir un prospect, de construire en saillie, ou d'appuyer sa poutre, ce sont bien encore des actions in rem, mais négatoires. Ce genre d'action n'est pas admis dans les procès à l'occasion des choses corporelles, car alors c'est celui qui ne possède pas qui agit; on ne donne pas d'action pour nier que la chose soit au demandeur. Cependant il y a un cas où celui qui possède joue le rôle de demandeur, comme cela apparaîtra plus clairement dans les livres du Digeste.

Ainsi, l'action négatoire, accordée pour les servitudes, est refusée pour les choses corporelles. Cette différence s'explique historiquement autrefois, on considérait les choses incorporelles comme n'étant pas susceptibles de possession; on ne pouvait donc point y appliquer les interdits. Si quelqu'un s'empare de mon fonds, je puis me le faire rendre, soit par l'interdit uti possidetis, soit par les inter

(1) F. 6, S1, si servitus vindicetur. D. 8, 5.

Pourquoi lieu en matière servitudes.

l'action négatoire a

de

Interdits utiles créés

prétorien.

dits recuperandæ possessionis; au contraire, si on passe sur mon fonds, je n'ai pas d'autre moyen que l'action négatoire pour établir qu'il y a eu exercice illicite du droit de passage.

Avec le temps, cependant, le droit prétorien assimila à peu près par le droit la possession des servitudes à la possession des choses corporelles; c'est ce qu'on appelait la quasi juris possessio, et on donnait pour la protéger des interdicta veluti possessoria (1). Les actions négatoires restèrent en usage malgré cette innovation; on pouvait donc choisir entre les interdits et ce mode de procédure, qui, du reste, présentait encore une grande utilité, puisqu'il permettait aux personnes intéressées de prendre l'initiative et de prévenir les actes qui auraient porté atteinte à leurs droits.

Difficulté pour

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faut appliquer

Mais ce qui a fait naître des difficultés, c'est la question de preuve la preuve dans les actions négatoires. Des auteurs ont soutenu que si le propriétaire refusait de reconnaître une servitude, c'était à l'adversaire à prouver qu'elle existait réellement. On disait, pour établir ce système, que la propriété étant sortie libre des mains du Créateur, celui qui voulait la démembrer devait prouver qu'il en avait le droit. Mais ce système est tout à fait contraire aux textes du droit romain. Théophile fait très-bien remarquer, dans sa paraphrase, que l'action la regle négatoire est, en réalité, une action confessoire, dans laquelle on soutient que le fonds n'a jamais été grevé de servitude; or, «onus probandi ei incumbit qui dicit. » Ceci est, du reste, établi d'une manière irréfutable par le Fragment 15, de operis novi nunciatione, D. 39, 1. Voici ce que suppose le jurisconsulte Africain : Une personne sachant que son voisin veut bâtir lui envoie une vocatio in jus, pour établir qu'il n'a pas le droit altius tollendi, c'est intenter Exemples l'action négatoire; le défendeur ne comparaît pas. S'il veut bâtir Africain. plus tard, il faudra qu'il prenne le rôle de demandeur et qu'il éta

ordinaire.

donnés par

blisse son droit; c'est ainsi qu'on punit sa contumace. Le juriscon sulte continue en renversant l'hypothèse : Séius veut établir qu'il a le droit altius tollendi, il intente l'action confessoire, mais son adversaire ne se présente pas pour y défendre; Séius devient en quelque sorte possessor juris; pour l'empêcher de construire, il faudra qu'on intente contre lui l'action négatoire : « Eaque ratione hacte « nus is, qui rem non defenderet, punietur, ut jure suo probare « necesse haberet; id enim esse petitoris partes sustinere. » Par ce moyen, celui qui ne défend pas au procès sera puni en étant soumis à la nécessité de prouver son droit, c'est-à-dire de prendre le

rôle de demandeur

Ainsi Africain dit formellement que, dans la seconde hypothèse, celui qui exerce l'action négatoire doit faire la preuve.

(1) F. 20, de servitut. D. 8, 1 — F. Vatic, § 9C-94.

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