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qu'il a intelligemment exploré à Montarlot. Une somme a été votée en vue de complèter cette fouille.

Sous le modeste titre de notes, M. Georges Boyer présente un consciencieux travail sur la provenance et la dispersion de galets silicatés et quartzeux dans l'intérieur et sur le pourtour des monts Jura. M. Boyer s'est livré à une étude méthodique et intelligente sur la marche des glaciers qui ont couvert la région, sur la formation des moraines, le convoyage et l'échouage des cailloux, galets et débris que ces puissants moteurs ont répandu à travers notre contrée. A côté des hypothèses de géologues connus sur la présence, dans les environs de Besançon, de galets quartzeux, M. Boyer inscrit les résultats de ses observations. Il ne nous appartient pas de trancher les différends qui peuvent exister entre savants sur ces grandes questions; mais nous avons été frappés de la manière claire et intéressante avec laquelle M. Boyer traite les sujets qui, trop souvent, sont difficilement compréhensibles pour les lecteurs peu versés dans le langage de la géologie.

La Société d'Emulation du Doubs est non-seulement une société ouverte à toutes les bonnes volontés des hommes laborieux; mais c'est encore une société mondaine qui, répondant aux invitations qu'on lui adresse, va visiter ses amis et ses voisins. Montbéliard a été le but du premier voyage de ses délégués ; ils y ont trouvé accueil cordial, séance solennelle pleine d'intérêt et hospitalité complète.

Plus tard, en Suisse, sur le bord des eaux bleues du lac de Neuchâtel, au pied du Jura, la Société d'histoire a reçu nos envoyés et leur a fait entendre des lectures extrêmement remarquables, l'une traitant de l'histoire communale de Bevaix, l'autre donnant des fragments très intéressants des archives de l'ancienne famille Osterwal. MM. Alfred de Chambrier et Philippe Godet, professeurs à l'Académie de Neuchâtel, manient avec élégance la langue française et ont fait preuve d'une grande érudition, Nos relations avec la

Société neuchâteloise d'histoire et d'archéologie datent de loin. Les délégués de cette compagnie nous viennent chaque année et comptent au nombre de nos meilleurs amis.

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La Société helvétique des sciences naturelles nous a également conviés au congrès réuni au Locle: botanistes, géologues, naturalistes le plus en renom, dignes successeurs des Saussure, des Agassiz, des Desor, ont exposé les résultats de leurs recherches et leurs appréciations sur plusieurs problèmes scientifiques. La Société d'Emulation du Doubs a été mise en relief par la conférence très écoutée de M. Sire. Les intéressantes et judicieuses observations de notre savant confrère sur l'école d'horlogerie du Locle et les facilités données à la fabrique, sont heureusement consignées dans le récit de sa mission. — Vos délégués ont été à même de constater la haute estime accordée à notre compagnie chez nos voisins : l'accueil qui leur a été fait, les réceptions cordiales de nos hôtes, en sont les sûrs garants.

Nul de vous, Mesdames, Messieurs, n'a perdu le souvenir du tournoi scientifique motivé par la découverte d'un oppidum gaulois situé sur les hauteurs qui dominent le Lison. Un homme à imagination vive, à conceptions enthousiastes, séduits par la similitude des configurations du sol, la concordance des noms et les découvertes nombreuses de vestiges gaulois, crut pouvoir réclamer pour le plateau d'Alaise l'emplacement de la lutte suprême de Vercingétorix contre César.

Le conseil municipal d'Alaise a voulu consacrer un monument durable au souvenir de l'architecte Alphonse Delacroix ; il a décidé que son buste ornerait une fontaine publique. La Société d'Emulation ne pouvait qu'applaudir et prendre large part à cette démonstration honorant un de ses fondateurs. Le 9 août dernier, une nombreuse députation de notre société s'est rendue à Alaise pour assister et participer à l'inauguration du buste, sur le piédestal duquel se trouve gravée l'inscription suivante :

ALPHONSE DELACROIX, NÉ A DOLE LE 10 JANVIER 1807, MORT A BESANÇON LE 7 JANVIER 1878. SA DÉCOUVERTE ARCHÉOLOGIQUE D'ALAISE A FAIT REVIVRE EN FRANCE LE CULTE DES SOUVENIRS DE L'ANCIENNE Gaule. MONUMENT ÉRIGÉ, AVEC LE CONCOURS DE LA SOCIÉTÉ D'ÉMULATION DU DOUBS, PAR LA COMMUNE D'ALAISE; M. MARTIAL BORDY ÉTANT

MAIRE. M DCCC LXXXV.

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Cette fête, favorisée par un temps splendide, a été l'occasion d'une touchante manifestation des habitants du plateau d'Alaise. M. le Maire, en souhaitant la bienvenue à la Société d'Emulation, a exposé les motifs de l'érection du monument qui se dresse, élégant dans sa simplicité, sur la place du village. M. Castan a rappelé avec distinction l'historique de la question d'Alaise, dans laquelle il avait joué luimême un rôle si marquant; puis il a rendu un juste tribut d'éloges et de regrets à celui dont la calme et intelligente figure était si heureusement reproduite par la main de son petit-fils M. Alphonse Voisin-Delacroix. M. Ducat, au nom de la Société des architectes du Doubs, a retracé les principaux traits du caractère puissant d'Alphonse Delacroix et rappelé la place importante que son confrère avait tenue dans cette compagnie. Un banquet, servi sous les vieux tilleuls du plateau, au milieu d'un paysage calme et grandiose, témoin peut-être des dernières luttes de la Gaule indépendante, a terminé cette journée dont le récit détaillé a sa place dans nos annales.

La mort a fait des vides sensibles dans nos rangs.

Nous avons perdu, presque au même moment, MM. Charles Marion, Pétey et Pescheloche, tous trois excellents et dévoués. Dans une autre enceinte, j'ai rappelé déjà la bonté affable du premier, la vivacité enjouée du second. Qu'il me soit permis de dire, au sujet du troisième, que la fabrique bisontine d'horlogerie vient de voir disparaître, en M. Pescheloche, un artiste ingénieux doublé d'un homme de cœur.

Un collaborateur, un modeste savant, dont la Société a

publié les travaux géologiques et archéologiques, M. Achille Bouillerot, de Cintrey, a également disparu.

M. Paul Michelot, ingénieur en chef des ponts et chaussées, membre correspondant de notre compagnie, nous a été enlevé il y a peu de temps. Il comptait parmi nos collaborateurs, et, par notre entremise, avait doté les collections publiques de la ville d'un certain nombre de portraits qui se rattachent à l'histoire littéraire de la Franche-Comté. Petitfils, par sa mère, de l'académicien Joseph Droz, il avait épousé la fille aînée du général d'artillerie Hubert Lyautey qui a si puissamment encouragé les manifestations et entre prises de la Société d'Emulation. Il nous appartenait donc à bien des titres, et, comme nous l'a dit M. Castan, << son souvenir a le droit d'être inscrit dans les fastes de notre compagnie, car il est celui d'un compatriote érudit, d'un homme excellemment digne et parfaitement bon. >>

Plus récemment, nous avons vu s'éteindre à la fleur de l'âge M. Albert Travelet, ingénieur des ponts et chaussées, qui se rattachait par des liens de parenté au bibliothécaire Charles Weiss, de sympathique mémoire. Allié à une honorable famille de la Franche-Comté, sa province natale, M. l'ingénieur Travelet nous avait donné les meilleurs gages d'une collaboration qui promettait d'être féconde. L'une de ses dernières pensées a été pour notre association, car son testament nous lègue les objets d'histoire naturelle et d'archéologie recueillis par ses soins. La Société tiendra à se montrer digne de cette preuve d'une confiance dont elle est honorée.

Il y a quelques jours à peine, un cruel accident foudroyait un de nos confrères à qui son intelligence, son esprit libéral et serviable avaient su conquérir de nombreuses sympathies. M. Gustave Mairot était un bibliophile; il se plaisait dans la lecture des livres sérieux et savait en causer avec ses amis. Il laisse des regrets qui ne se comptent pas.

Hier enfin, nous avons accompagné à sa dernière demeure

M. Eugène Bretillot. En lui, se personnifiait l'esprit bienveillant et la sympathique indulgence propres aux esprit d'élite. Lui aussi était un lecteur assidu, aimant à se tenir au courant des progrès de la science et des lettres.

Avant de terminer, permettez-moi, Mesdames, Messieurs, de saluer et de vous présenter M. le docteur Dufour, délégué de la Société helvétique des sciences naturelles.

Notre savant voisin a bien voulu distraire quelques heures du temps qu'il consacre aux malheureux pour nous visiter et nous entretenir de ses observations scientifiques. Français de race, Français de cœur, qu'il soit le bienvenu parmi nous!

J'ai énuméré bien longuement, ce me semble, Mesdames, Messieurs, les principaux travaux, les fêtes et les tristesses de notre compagnie pendant l'année qui va finir.

Durant cette période, nous n'avons rien négligé pour maintenir la Société d'Emulation du Doubs dans ses traditions laborieuses, et pour accélérer sa marche vers le but élevé poursuivi si heureusement jusqu'ici par nos prédécesseurs, et que résume si bien notre devise: Utinam Maxima Sequanorum!

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