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monde, et son empire, des lieux qu'embrasent les feux du ciel, jusqu'à ceux que désole un hiver éternel.

<< Mais je ne présage ces glorieuses destinées aux braves enfans de Romulus qu'à une condition : que jamais une pitié mal entendue, et trop de confiance dans leurs forces, ne les porte à relever les murs proscrits de leur ville natale. Relevée sous de funestes auspices, Troie éprouverait bientôt un pareil destin: c'est moi qui dirigerais contre elle mes phalanges victorieuses, moi, l'épouse et la sœur de Jupiter! En vain Apollon lui-même la ceindrait trois fois d'un mur d'airain : trois fois mes Grecs le renverseraient, et trois fois les veuves troyennes pleureraient leurs époux et leurs fils ravis à leur tendresse.... >>

Mais où s'égare ton vol, Muse téméraire? de pareils sujets conviennent-ils à une lyre badine? Cesse de profaner, en essayant de les rapporter, les entretiens des dieux, et d'attenter à leur majesté par la faiblesse de tes accords.

Horace 1.

AMAR.

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IV.

AD CALLIOPEN.

DESCENDE cœlo, et dic, age, tibia,
Regina, longum, Calliope, melos ;
Seu voce nunc mavis acuta,

Seu fidibus citharave Phobi.
AUDITIS? an me ludit amabilis
Insania? audire et videor pios
Errare per lucos, amœnæ

Quos et aquæ subeunt et auræ. ME fabulosa, Vulture in Appulo, Altricis extra limen Apuliæ,

Ludo fatigatumque somno,

Fronde nova puerum palumbes TEXERE; mirum quod foret omnibus, Quicumque celsæ nidum Acherontiæ, Saltusque Bantinos, et arvum Pingue tenent humilis Ferenti;

Ur tuto ab atris corpore viperis Dormirem, et ursis; ut premerer sacra Lauroque collataque myrto,

NON sine Dis animosus infans.
VESTER, Camœnæ, vester in arduos
Tollor Sabinos; seu mihi frigidum

Præneste, seu Tibur supinum,
Seu liquida placuere Baiæ.

IV.

A CALLIOPE.

DESCENDS du ciel, et fais entendre sur ta flûte, ô Calliope, reine des Muses, un chant de longue haleine. Si tu le préfères, n'emploie que ta voix brillante, ou marie ses accens aux cordes sonores et à la lyre d'Apollon!

L'entendez-vous? ou est-ce une aimable illusion qui me trompe?... Oui, je crois l'entendre, je crois errer dans les bois sacrés, où la fraîcheur des ruisseaux se mêle à la douce haleine du zéphyr.

Dans mon enfance, un jour que, fatigué de mes jeux, je dormais sur ce coteau du Vulture qui s'étend hors de l'Apulie, ma terre natale, des colombes, messagères divines, vinrent me couvrir de feuillage nouveau.

Ce fut un prodige pour les habitans des hauteurs escarpées d'Achérontie, pour ceux qui peuplent les forêts de Bantia et les fertiles vallons de Férente.

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Voyez, disait-on, comme il dort sans craindre l'ours et la vipère! voyez comme il repose, couché sous cet amas de myrte et de laurier, cet enfant céleste qui doit son courage à la protection des dieux ! »

C'est sous vos auspices, Muses, que je m'élève sur les monts du pays sabin; c'est sous vos auspices que je dirige mes pas capricieux vers la fraîche Préneste, ou les collines de Tibur, ou les rivages fertiles de Baïes.

VESTRIS amicum fontibus et choris

Non me Philippis versa acies retro,

Devota non extinxit arbor,

Nec Sicula Palinurus unda. UTCUMQUE mecum vos eritis, libens Insanientem navita Bosphorum

Tentabo, et arentes arenas

Litoris Assyrii viator :

VISAM Britannos hospitibus feros,
Et lætum equino sanguine Concanum ;
Visam pharetratos Gelonos,

Et Scythicum inviolatus amnem. Vos Cæsarem altum, militia simul Fessas cohortes abdidit oppidis, Finire quærentem labores

Pierio recreatis antro :

Vos lene consilium et datis, et dato
Gaudetis almæ.... Scimus ut impios
Titanas, immanemque turmam
Fulmine sustulerit caduco,

Qui terram inertem, qui mare temperat
Ventosum, et urbes, regnaque tristia,
Divosque, mortalesque turbas

Imperio regit unus æquo.

MAGNUM illa terrorem intulerat Jovi

Fidens juventus horrida brachiis,
Fratresque tendentes opaco

Pelion imposuisse Olympo.

SED quid Typhoeus, et validus Mimas, Aut quid minaci Porphyrion statu,

C'est parce que j'aime vos sources pures, vos chœurs harmonieux, que j'ai échappé au désastre de Philippes, à la chute d'un arbre maudit, et aux rochers de Palinure, battus par les flots de Sicile.

Partout où vous serez avec moi, j'affronterai, pilote audacieux, le Bosphore en fureur : je m'élancerai, hardi voyageur, dans les sables brûlans du rivage assyrien ;

Je visiterai sans péril le Breton si cruel pour ses hôtes, le Concanien qui boit avec délices le sang des coursiers, le Gélon armé du carquois, et le fleuve de Scythie.

C'est vous qui charmez le grand César, lorsqu'il ramène dans le sein de nos villes ses cohortes fatiguées des combats; lorsqu'il cherche à oublier ses travaux, c'est vous qui le délassez sous vos grottes riantes.

C'est vous qui lui conseillez la clémence, et qui vous réjouissez de lui donner de si douces leçons.

Nous savons comment il écrasa sous sa foudre vengeresse les impies Titans et leur sacrilège cohorte, ce dieu puissant qui gouverne seul, dans son équité, la terre immobile, la mer agitée, les villes, les royaumes sombres, les dieux et la foule immense des mortels.

Ils avaient rempli Jupiter d'un profond effroi, ces enfans de la Terre, fiers de leur force, agitant leurs bras monstrueux, et s'efforçant d'entasser Pélion sur les sombres sommets de l'Olympe.

Mais que pouvaient Typhée, le robuste Mimas, Porphyrion à la menaçante stature, Rhétus, Encelade lan

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