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La marche qu'a suivie le développement historique du droit en Allemagne entraîne, il est vrai, cette conséquence, que le droit de Justinien, c'està-dire le droit romain tel que nous le trouvons au commencement du vi° siècle de l'ère chrétienne, dans les recueils de Justinien, a pour nous l'intérêt pratique le plus immédiat (voy. ci-après, § 39). Cette circonstance explique aussi pourquoi dans les cours d'Institutes l'époque de Justinien est mise en relief sous un double rapport, et comme le point de mire auquel se rattache toute l'exposition du droit des temps antérieurs, qui n'en est, en quelque sorte, que la préparation et l'introduction, et comme le terme final auquel vient aboutir et se clore pour nous la notion du droit romain proprement dit; car tout ce qui vient après a plutôt le caractère d'une histoire littéraire ou bibliographique du droit romain.

Cependant, quand même des vues scientifiques, plus élevées ne nous feraient pas considérer l'exposition historique du droit romain privé, depuis son origine, prise aussi haut qu'il sera possible, comme la partie la plus intéressante de nos études, ce même but pratique dont nous parlions exigerait nécessairement qu'on laissât prévaloir la méthode du développement purement historique, car c'est l'unique voie pour atteindre ce but. Dans un cours d'Institutes spécialement, le principe historique peut et doit prédominer, de telle sorte que le droit de Justinien, dans ses plus nouvelles manifestations, doit rester sur l'arrière-plan, tandis qu'un cours de Pandectes doit offrir le rapport inverse1. Par là ces deux

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Voyez, sur cette distinction, la note de la page 18.
(Note du traducteur.)

cours se servent mutuellement de complément et

d'auxiliaire.

Ce qui vient d'être dit s'applique aussi bien à l'Histoire externe du droit, l'histoire des sources, qu'à l'Histoire interne, l'histoire des principes mêmes du droit. Si l'on suit dans celle-là une autre méthode que dans celle-ci, savoir, dans la première, la méthode synchronique, dans la seconde la méthode chronologique, cette inconséquence apparente se justifie par l'objet particulier du cours d'Institutes, car cette réunion des deux méthodes offre le moyen le plus simple de remplir cet objet. En effet, c'est dans le cours d'Institutes que se font particulièrement sentir l'inconvénient du synchronisme pour l'histoire interne du droit, et ses avantages pour l'histoire externe. L'inconvénient de cette méthode pour l'histoire interne consiste dans la difficulté de renouer ensemble ce qui a été exposé dans chaque période, et d'embrasser ainsi d'un seul coup d'œil l'ensemble d'une même doctrine dans son enchaînement intime. Au contraire, ses avantages pour l'histoire externe ne sont accompagnés d'aucun inconvénient semblable. D'ailleurs le but principal de la méthode synchronique, qui est de faire ressortir plus fortement l'influence mutuelle des événements sous le point de vue juridique, et la liaison d'un phénomène historique avec la marche que suit le développement simultané des diverses théories du droit; ce but, dis-je, peut aussi être atteint dans l'histoire interne, sans l'emploi de cette méthode, si l'on a soin de faire remarquer cette connexion des événements historiques et des progrès des institutions, toutes les fois que cela parait nécessaire pour obtenir une vue plus • exacte d'une doctrine.

$ 9.

Sources de la connaissance du droit romain en général.

Les sources de la connaissance du droit romain, qu'il ne faut pas confondre avec les sources du droit romain lui-même, sont tous les secours historiques par lesquels on peut acquérir la connaissance du droit romain,

Elles se rangent dans les deux classes suivantes :

1° Les monuments qui, de près ou de loin, se réfèrent à des rapports juridiques de l'état romain. Cela comprend les inscriptions sur pierre, métal, ou autres matières1; puis les titres sur parchemin ou papyrus; enfin les monnaies et médailles 2.

2o Les écrivains proprement dits. Les plus importants sont naturellement les écrivains dits juridiques, qui traitent du droit comme de leur objet spécial. Mais l'étude des écrivains non juridiques, romains et grecs, peut aussi être fort importante, parce qu'il n'est pas rare qu'ils offrent, bien que seulement en passant, des renseignements très-intéressants sur le droit romain, souvent dans des passages où l'on ne se serait pas attendu à les ren

contrer.

Peuvent être cités à cet égard, comme historiens, chez les Romains: Jules César, Cornelius Nepos,

1

Antiquitatis romanæ monumenta legalia extra libros juris romani sparsa, quæ in ære, lapide, aliave materia...... supersunt. Delectu, forma et variar um lectionum adnotatione usui expeditiori accommodavit, etc. C. G. Haubold. Opus ex adversariis defuncti auctoris, quantum fieri potuit, restituit E. Spangenberg. Berlin, 1830.

* Elles se trouvent dans les grands ouvrages numismatiques de Span

heim et Eckhel.

Salluste, Tite Live, Tacite, Suétone, et les auteurs qu'on appelle scriptores rei augusta, savoir: Ælius Spartianus, Vulcatius Gallicanus, Trebellius Pollio, Flavius Vopiscus, Ælius Lampridius, Julius Capitolinus, auxquels il faut ajouter Aurelius Victor, Eutrope, Valère Maxime et Ammien Marcellin; - chez les Grecs Polybe, Diodore de Sicile, Denis d'Halicarnasse, Plutarque, Appien, Dion Cassius, Hérodien, Zosime, Procope, Agathias, Ménandre.

Méritent d'être mentionnés comme écrivains philosophiques et comme rhéteurs: Cicéron, Sénèque, Quintilien ;

:

Comme grammairiens M. Terentius Varron, S. Pompeius Festus, Aulu-Gelle, Nonius Marcellus, Isidorus Hispalensis.

Parmi les scriptores rei rusticæ et agrariæ : M. Porcius Caton, M. Terentius Varron, Palladius, Columelle, S. Julius Frontinus, Aggenus Urbicus, Hyginus (Hygenus);

Comme commentateurs et scholiastes : Asconius Pedianus, Boethius, Donatus, Servius, Macrobe; Enfin, parmi les Pères de l'Église : Tertullien, Cyprien, Arnobe, Lactance, Augustin.

Une énumération spéciale et une appréciation caractéristique des écrivains romains ou grecs qui se sont occupés spécialement du droit romain ne peuvent remplir leur objet que réunies à l'histoire des sources mêmes qui y sont traitées; elles seront, par conséquent, entremêlées occasionnellement à l'histoire extérieure du droit, autant que le permettra le cadre de ce livre élémentaire.

HISTOIRE DES SOURCES DU DROIT ROMAIN 1.

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Caractère propre de ces sources en général, et leur division en périodes.

Tout ce qui a été dit ci-dessus, dans l'Introduction, sur la marche naturelle que suivent la formation originaire et le perfectionnement graduel de tout droit positif en général, est aussi susceptible d'une entière application à l'histoire des sources du droit

'Parmi les histoires des sources du droit romain, les suivantes méritent d'être signalées, bien que dans des directions différentes et par des motifs divers : J. G. Heineccius, Historia juris civilis romani ; 1re édit., Halle, 1733, in-8°.-J. A. Bach, Historia jurisprudentiæ romanæ ; edit. nova. observat, auxit A. C. Stockmann; Leipzig, 1807. G. Hugo, Lehrbuch der Geschichte des römischen Rechts bis auf Justinian; 11* édit., Berlin, 1830.-S. W. Zimmern, Geschichte des römischen Privatrechtes bis auf Justinian, tome I; Heidelberg, 1826.— Walter, Geschichte des römischen Rechts bis auf Justinian, 2° édit.; Bonn, 1844. — G. F. Puchta, Cursus der Institutionen, tome I; Leipzig, 1845, 2 édit.

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Entre les ouvrages dans lesquels plusieurs sources du droit romain ont été rassemblées ou éclaircies, nous devons mentionner ici : A. Augustinus, De legibus et senatusconsultis liber, adjunctis legum antiquarum et senatusconsultorum fragmentis, cum notis Fulvii Orsini; Rome, 1583, in-4°. Jac. Gothofredus, Fontes quatuor juris civilis in unum collecti, etc.; Genève, 1653, in-4°. Ant. Schulting, Jurisprudentia vetus antejustinianea; Leyde, 1717, in-4°. Jus civile antejustinianeum, codicum et optimarum editionum ope a societate jurisconsultorum curatum,' præfatus est G. Hugo; Berlin, 1815, 2 vol. in-8°. Le recueil le plus riche est le Corpus juris romani antejustinianei, præfatus est Ed. Boecking; Bonn, 1835, commencé en 1835, en plusieurs volumes in-4o, et non encore achevé.

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