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Tant sur ce globe affreux, transitoire séjour, L'homme, atôme où l'orgueil se loge pour un jour, L'homme sait faire à l'homme, émule en félonie, D'une courte existence une longue agonie!

Par ce Cain, rival à mon sort attaché,
Qu'à ce nom de confrère Abel trop alléché
Je porte à vos banquets ma prudence endormie,
Il voudra près de moi singer la bonhomie,

Et les mets, grâce à lui, me viendront par monceaux :
Puis il ira demain m'arracher les morceaux....

En attestant le vin, gage de confiance

Qui de l'homme et du ciel consacra l'alliance,
Il aura pour témoin la fausse vérité
Qu'enferme le traiteur dans son jus frelaté,
Et me dira: « Buvons! » avec un mot étrange
Emprunté d'un pays qui n'a point de vendange
Et qui vit de brouillard, de porter et d'ennui ;
Un TOAST!... Fi de son mot, de son vin et de lui!
Les convives latins, pour chanter le Massique,
N'allaient point demander au langage punique
Ces mots dont la rudesse et le goût de terroir
Auraient flétri chez eux les présents du pressoir.

Pour moi, s'il faut trinquer, je veux qu'une bouteille Grosse depuis longtemps des œuvres de la treille, M'infuse, par la main d'un ami reconnu,

De son flanc généreux le nectar ingénu.

Je veux en mots français vanter les vins de France;
Je veux que mon discours, libre et plein d'assurance,
Raisonne ou déraisonne, au hasard épanché,
Sans craindre que plus tard il me soit reproché.
Si vos banquets, du moins, favorables comices,
D'un fraternel accord m'assuraient les prémices,
Mon cœur avec élan s'y mettrait de moitié,
Et voudrait avec vous s'enivrer d'amitié.

Peut-être un tel espoir n'a rien d'illégitime;

J'en sais plus d'un chez vous que j'aime et que j'estime ;
Mais si, prenant sa part et d'azyme et de vin,

Judas, qui trahissait le convive divin,

Prévalut à lui seul sur tous les vrais apôtres,

Pourquoi, dans vos banquets, moi, vous-mêmes, les vôtres,
En allant nous asseoir ne trouverions-pas,
Tout prêt à nous trahir, chacun notre Judas?

Ah! fermez le cénacle et renversez la table;

La haine d'un confrère est un mal incurable,
Et ce n'est point la paix que l'on trouve en ce lieu:
Entre deux jours de bruit c'est la TRève de Dieu.

Tant qu'ils ont sous la dent ce qu'on leur donne à tordre,
C'est juste ce temps-là qu'ils restent sans se mordre,
Et les vins généreux dont-ils sont abreuvés
Sont déjà démentis avant d'être cuvés.
Que dis-je ? à ces banquets où siége l'artifice,
Sentiments et discours, et vins, tout est factice.
Je vois, au branlement de ces nez papelards,
La contradiction des cœurs et des regards;
Je sens, comme un dessert de pralines plâtrées,
Le chicotin des faits sous leurs phrases sucrées;
Et leurs doux toasts, aigris par leurs vœux intestins,
D'un mensonge éternel farcissent leurs festins.
Donc ne m'annoncez plus vos agapes trompeuses.
S'il vous plaît d'être assis à des tables pompeuses,
Attirés par l'espoir d'un splendide menu,
Courez à vos banquets.... moi, j'en suis revenu!

ENVOI

A LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES MORALES DE SEINE-ET-oise.

Auditeurs indulgents, aristarque multiple

Dont je suis le confrère,.... ou plutôt le disciple,

Ensemble quelquefois nous fimes des repas
Qu'avec ceux de mes vers vous ne confondrez pas.
Des banquets de l'esprit la suite hebdomadaire
Fait circuler pour nous la coupe solidaire

Qui rend plus éclairés, plus heureux et meilleurs.
Commensaux de l'Étude, on peut encore ailleurs,
Tournant vers d'autres soins une ame délassée,
Joindre le pain du corps au pain de la pensée;
Et quand Ville-d'Avray sous son ombrage vert
De sa main positive a mis notre couvert,
Le champêtre banquet, image souriante,
De vos banquets savants n'est qu'une variante
Où nous symbolisons, sous l'espèce du vin,
Des Lettres et des Arts le breuvage divin.
Or, si j'entends là-bas le bruit de vos assiettes,
Moi qui toujours, ici, ne ronge que vos miettes,
J'irai dire aux amis sur vos pas entraînés,
Qu'au monde il est encor d'agréables dînés.

Versailles, le 9 février 1854.

ERRATA

DU MÉMOIRE SUR LA VIE ET L'OEUVRE DE JEAN HOUDON.

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L'Extrait du Livret de l'année 1779 a été omis à la note de la page 64,

nous le rétablissons ici :

N.o 216, M. de Nicolaï, premier président de la Chambre des Comptes; N. 217, M. de Caumartin, prévôt des marchands, buste en terre cuite; N.o 218, Molière. Il est tiré du cabinet de M. de Miromesnil, garde-dessceaux; N.° 219, Voltaire. Ces deux bustes sont exécutés en marbre, et placés dans le foyer de la Comédie-Française; N.o 220, J.-J. Rousseau, appartenant à M. le marquis de Girardin; N.o 221, buste de M. Franklin; N." 222, statue de Voltaire, représenté assis. Cette figure est exécutée en bronze doré; N.o 223, autre buste de Voltaire, drapé à la manière des anciens. Il est exécuté en marbre. Ces deux objets sont placés dans le cabinet de l'Impératrice de Russie.

НЕСА

TABLE DES MATIÈRES.

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MÉMOIRES.

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Notice sur la Vie et les Ouvrages de Philippe de Champagne,
par M. BOUCHITTÉ, ancien Recteur, membre titulaire.
Mémoire sur la Vie et l'OEuvre de Jean Houdon, par MM.
Émile DÉLEROT et Arsène LEGRELLE, correspondants.

Rapport sur les Fouilles exécutées par la Société archéologique

de Rambouillet, dans un cimetière de la commune de Vicq

(Seine-et-Oise), par M. Auguste MOUTIÉ, correspondant

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IAN

POÉSIE.

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Versailles.— Imp. de MONTALANT-BOUGLEUX, 6, avenue de Sceaux.

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