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» traités avec les créanciers poursuivans; évi. >> tant par ce moyen les frais de justice et le » dépérissement des biens par de longues sé»questrations. Loi ubi adhùc, C. de jure do» tium ».

du

Mourgues, sur les statuts de Provence, page 418, rapporte quatre arrêts du parlement d'Aix, par lesquels il avait été jugé que, moment que la femme avait fait informer sur la pauvreté et décadence de son mari, à l'effet de répéter et assurer sa dot, la Prescription courait contre elle en faveur des tiers-possesseurs des biens qui composaient cette dot ou y étaient affectés. Les deux premiers de ces arrêts avaient été rendus le 22 avril 1617, le troisième le 20 février 1618, et le quatrième le 18 mars 1623.

Plus anciennement, le parlement de Provence faisait courir la Prescription à compter du temps où le dérangement des affaires du mari avait commencé d'être notoire; et quand il s'élevait des difficultés sur ce point,on ordonnait, avant faire droit, qu'il fût informé de l'époque précise de laquelle on devait en dater la notoriété. Mourgues, à l'endroit qu'on vient d'indiquer, en rapporte deux arrêts des 4 mars 1593 et 6 juin 1601. Mais cette jurisprudence, calquée plutôt sur la lettre que sur l'esprit de la loi 30, C. de jure dotium, avait été abandonnée presqu'en même temps qu'introduite; et l'on était convenu unanimement que l'on ne devait avoir égard, en cette matière, qu'au temps où l'insolvabilité du mari était constatée juridiquement, et par conséquent que la Prescription ne devait courir contre la femme, pour ses droits dotaux, que du jour qu'elle avait été reçue à répéter sa dot, ou que les biens de son mari avaient été mis en discussion ouverte.

Mourgues, page 419, assure que telle était, de son temps, la maxime du parlement de Pro

vence.

Elle avait été aussi approuvée par le parlement de Toulouse, lors d'un arrêt qui avait été rendu le 23 décembre 1667, et qu'on trouve dans le recueil de Catellan, liv. 4, chap. 45. Pour faire valoir, cóntre une veuve, la Prescription que l'on prétendait avoir été encourue par elle avant la dissolution du mariage, on objectait que le mari était devenu insolvable long-temps avant sa mort; mais, dit le magistrat cité, « on ne considéra pas beaucoup » ce moyen...., parcequ'on demeura d'accord » que cela ne devait avoir lieu que lorsque le >> mari a fait distribution, ou que ses biens » sont saisis, et que son insolvabilité a été pu» bliée et rendue notoire....., car la femme n'est » pas obligée d'examiner, à chaque moment,

» les facultés de son mari, ni de publier son in>> solvabilité ».

Si cette opinion avait eu besoin d'autorités ultérieures, il s'en serait présenté une bien puissante dans la loi 24 D. soluto matrimonio. Cette loi voulait dotis exactionem competere ex quo EVIDENTISSIMÈ apparuit mariti facultates ad dotis exactionem non sufficere.

Il paraît même, par une espèce rapportée dans les collections manuscrites de Julien, au mot Præscriptio, lettre H, que le parlement de Provence avait été quelquefois plus loin. Les biens d'un mari qui était marchand, avaient été saisis par plusieurs créanciers; il avait fermé sa boutique, abandonné sa demeure, et était passé dans les pays étrangers. Quinze ans après seulement, sa femme obtint une sentence de séparation de biens. Il fut alors question de savoir si, dans cette intervalle, on avait prescrit contre elle? L'arrêt qui intervint le 18 juin 1673, jugea que non.

Nous ne craignons pas le dire qu'en cela, le parlement de Provence avait cxcédé, en faveur de la femme, les termes de la loi. Certainement la saisie générale des biens du mari, la clôture de sa boutique, sa fuite, annonçaient une faillite ouverte ; son insolvabilité éclatait au grand jour, infortunium clarebat; dèslors, la femme était maîtresse de se pourvoir en séparation de biens, et d'agir en conséquence contre les tiers-possesseurs; poterat actiones suas movere : on avait donc pu, dès ce moment, prescrire contre elle.

C'est aussi ce que le parlement de Provence lui-même avait reconnu depuis l'arrêt dont nous parlons. Du moins, nous trouvons un acte de notoriété du parquet d'Aix, du 5 juillet 1684, , par lequel il est attesté « ce que, sui>> vant l'usage et commune observance de ce » parlement...., la femme souffre la Prescrip» tion de l'action hypothécaire, qui ne dure » que dix ans contre les tiers-possesseurs, lors » même qu'elle poursuit la restitution de sa » dot, si elle a été séparée en biens, ou si elle » a eu connaissance de l'insolvabilité de son » mari, par une discussion ou autrement; » parce que, dès lors, elle a pu agir, et mettre >> en assurance ses droits dotaux, comme il lui » est permis par la loi ».

§. VII. Par quel temps se prescrivent les délits ruraux et forestiers? V. l'article Délits ruraux.

§. VIII. Une requête en expertise, présentée dans l'année de l'enregistrement d'un contrat, mais signifiée seule ment après l'expiration de cette année,

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Mais il restait encore, à cette époque, des doutes dans beaucoup d'esprits, sur le cas où le séquestre avait été apposé à tout autre titre que celui de la confiscation, notamment sur celui où il avait frappé, pour cause d'indivision, les parts d'héritiers régnicoles dans une succession à laquelle l'État avait droit comme représentant d'autres héritiers émigrés.

La cour de cassation avait d'abord jugé que, dans ce cas, le séquestre n'empêchait pas la Prescription. Il existe, à cet égard, deux arrêts très-précis, l'un du 9 ventôse an 8, qui est rapporté à l'article Enregistrement, § 17; l'autre du 26 frimaire précédent, dont je crois devoir retracer ici l'espèce.

Jeanne Marguerite Charlotte Sabourin, veuve Morisseau, est décédée à Fontenay, le 15 brumaire an 2, laissant un grand nombre d'héritiers.

Quelques-uns de ces héritiers étant émigrés, le séquestre national a été apposé sur la suc

cession.

Le 24 germinal an 4, l'administration centrale du département de la Vendée a réglé les droits respectifs de l'Etat du chef des émigrés, et des héritiers résidans en France.

En conséquence, par arrêté du même jour, elle a accordé à ceux-ci la main-levée du séquestre de leurs portions.

Le 19 pluviôse an 7, la régie a décerné con

tre eux une contrainte en paiement des droits résultant de la mutation intervenue à leur profit par le décès de la veuve Morisseau.

Ils ont formé opposition à cette contrainte, sur le fondement que, du 15 brumaire an 2 au 19 pluviôse an 7, il s'était écoulé plus de cinq ans; et ils ont invoqué l'art. 18 de la loi du 5-19 décembre 1790, suivant lequel les droits des mutations par décès se prescrivaient par cinq ans, à compter du jour de leur ouverture.

La régie a répondu que la Prescription avait été interrompue pendant tout le temps qu'avait duré le séquestre ; et elle a cité l'art. 12 de la loi du 29 septembre-9 octobre 1791, la loi du 18 fructidor an 2 et l'art. 24 de la loi du 22 frimaire an 7.

Le tribunal civil du département de la Vendée n'a eu aucun égard à la défense de la régie: par jugement du 25 germinal an 7, il a déclaré la demande prescrite, attendu qu'elle n'avait pas été formée dans les cinq ans, à compter du jour du décès.

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La régie s'est pourvue en cassation; mais par arrêt du 26 frimaire an 8, rendu à la section des requêtes, au rapport de M. Rataud, son recours a été rejeté, « attendu qu'il résulte évi» demment de tous les textes de lois sur lesquels les juges du tribunal civil de la Vendée » se sont appuyés, que la Prescription de cinq >> ans, en matière de droit d'enregistrement » pour les successions, commence à courir du » jour de l'ouverture desdites successions, et » non du jour de l'expiration des délais accordés » aux héritiers pour faire leur déclaration; » et qu'ainsi, le jugement attaqué n'a fait » qu'une juste application desdites lois, d'après le fait reconnu et déclaré dans l'espèce ».

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La régie de l'enregistrement n'a pas cru que cet arrêt ni celui du 9 ventôse de la même an née dussent l'empêcher de reproduire la question, lorsqu'elle se présenterait; et bientôt elle en a trouvé l'occasion.

Louis Brancas de Villars était mort à Paris le 21 nivôse an 2. Il avait laissé une veuve à laquelle il avait assuré des gains de survie, et trois enfans dont deux étaient inscrits sur la liste des émigrés. Par suite de cette inscription, le séquestre avait été apposé sur tous ses biens.

Par arrêté du directoire exécutif du 7 pluviôse an 7, les deux enfans prévenus d'émigration ont été rayés de la liste, et le séquestre a été levé tant en leur faveur qu'en celle de leur frère et de leur mère.

La veuve et les trois enfans ayant laissé écou ler plus de six mois depuis la levée du séques tre, sans faire leur déclaration au bureau d'enregistrement et payer le droit de mutation qu'ils devaient respectivement, deux contrainles ont été décernées, l'une, le 8 ventôse an 8, contre la veuve ; l'autre, le 12 du même mois, contre les trois enfans.

La veuve et les trois enfans se sont opposés à ces contraintes, et en ont demandé la nullité, comme portant sur des droits prescrits.

Le 19 germinal an 8, jugement du tribunal civil du département de l'Aisne, qui les déboute de leur opposition,

* Attendu que l'art. 24 de la loi du 22 frimaire an 7, en accordant aux héritiers des personnes décédées en France, un délai de six mois, à compter du jour de leur décès, pour l'enregistrement des déclarations qu'ils sont tenus de passer aux termes de l'art. 27, et sous la peine du demi-droit en sus porté par l'art. 39, ajoute que ce délai ne courra que du jour de la mise en possession pour la succession d'un absent, celle d'un condamné, si ses biens sont séquestrés, et celle qui aurait été séquestrée pour toute autre cause;

Qu'ainsi, il résulte, dans le droit, que, pendant le séquestre de la succession Brancas, il n'a pu ni dû être fait aucune poursuite pour raison du droit réclamé aujourd'hui par les régisseurs; et que conséquemment le terme des cinq années exigé pour la Prescription de ce droit, n'a commencé à courir que du jour où les veuve et héritiers Brancas ont été envoyés en possession; ce qui ne permet pas d'accueillir leur opposition ».

Recours en cassation de la part des veuve et héritiers Brancas.

Deux moyens, suivant eux, doivent faire anéantir le jugement qu'ils attaquent :

10 En rejetant la Prescription, ce jugement a violé l'art. 18 de loi du 5-19 décembre 1790 et F'art. 61 de celle du 22 frimaire an 7;

20 Louis Brancas de Villars étant mort sous l'empire de la loi du 5-19 décembre 1790, c'était d'après le tarif de cette loi, et non d'après celui de la loi du 22 frimaire an 7, que le droit, en le supposant non prescrit, devait être liquidé et fixé; cependant le tribunal civil de l'Aisne l'a liquidé et fixé d'après la loi du 22 frimaire an 7; il a par conséquent violé et l'art. 73 de cette loi et le tarif annexé à celle du 5-19 décembre

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<< Attendu que, si Brancas de Villars est décédé en l'an 2, ses héritiers n'ont été mis en possession de ses biens qu'en pluviðse an 7;

» Que, suivant l'art. 18 de la loi du 5-19 décembre 1790, toute demande de droit de mutation d'immeubles est prescrite par cinq ans, à compter du jour de l'ouverture des droits; et que les droits dus pour des biens compris dans une succession séquestrée, ne sont ouverts que du moment où la levée du séquestre a donné à l'héritier naturel la possession réelle desdits biens; qu'on ne peut invoquer l'art. 61 de la loi du 22 frimaire an 7, pour en conclure que la Prescription a couru contre la régie du jour du décès de Brancas, arrivé en l'an 2, puisque l'art. 73 de la même loi porte textuellement elles (les lois rendues sur les droits d'enregistrement) continueront d'étre exécutées à l'égard des actes faits, et des mutations par décès, effectuées avant la pu blication de la présente ; qu'ainsi, le tribunal civil de l'Aisne s'est conformé aux lois, loin de les enfreindre, en écartant la Prescription opposée à la régie par les demandeurs ;

» Attendu que les seuls faits que le tribunal de l'Aisne ait établis dans son jugement, sont que Brancas est décédé en l'an 2; que ses biens ont été séquestrés à raison de l'émigration présumée de deux de ses fils, et ont été rendus à ses héritiers, aux fins d'un arrêté de radiation du 7 pluviôse an 7; et que, depuis, ceux-ci n'ont fait aucune déclaration desdits biens; que les seules dispositions de la loi que le tribunal ait citées, sont les art. 24, 27 et 39 de la loi du 22 frimaire an 7, dont aucun n'est rela tif à la quotité des droits dus; que la seule conséquence qu'il ait tirée de ces citations a été que, pendant le séquestre des biens de la succession Brancas, il n'a pu ni dû être fait aucune poursuite à raison du droit réclamé aujourd'hui par les régisseurs ; et que conséquemment le terme de cinq années exigé pour la Prescription de ce droit, n'a commencé à courir que du jour où la veuve et les héri tiers Brancas ont été envoyés en possession, ce qui ne permet pas d'accueillir leur opposition, faute par eux d'avoir fourni la déclaration prescrite ;

» Que, quoique les 'parties aient agité la question de la quotité des droits dus, il est néanmoins constant que cette question n'a pas été posée par les juges, et qu'ils n'ont cité aucune disposition de loi qui y fût relative; que, s'il résulte évidemment des considérant de leur jugement qu'elle n'a pas été examinée, les termes du dispositif de ce même jugement autorisent à dire qu'ils ne l'ont pas jugée ; qu'il

ne fait autre chose que débouter les héritiers de leur opposition, ordonner les poursuites à parfaire, et accorder un délai pendant lequel lesdits héritiers feront leur déclaration, et seront tenus de payer le droit conformément à la loi; que la loi que les héritiers Brancas devront exécuter, n'étant pas désignée, il ne peut pas y avoir, dans le jugement attaqué, fausse application de celle du 22 frimaire an 7 ; et que le tribunal s'étant borné à ordonner de payer conformément à la loi, les moyens de défense des demandeurs restent entiers, dans le cas où la régie réclamerait l'exécution d'une loi autre que celle d'après laquelle les droits dus dans l'espèce, doivent être réglés».

Cet arrêt a été suivi de deux autres de la même section, qui ont également consacré le principe que, dans le cas d'un séquestre apposé pour toute autre cause que celle de confiscation, les cinq années ne commencent à courir que du jour où ce séquestre a été levé.

Le premier de ces arrêts est du 2 ventôse an 11; le dispositif en est rapporté à l'article Enregistrement, §. 17. Je dois seulement observer que, dans l'espèce sur laquelle il a été statué, un décret de la Convention nationale, du 7 pluviôse an 2, avait ordonné que les biens du sieur Veymeranges, décédé au mois de nivôse précédent, seraient séquestrés et mis sous la main de la nation, à la diligence de l'agent du trésor public, pour sûreté de neuf millions cinq cent mille livres dus au trésor public par ce particulier et quelques autres, en remboursement de rescriptions; et que ce séquestre avait duré jusqu'en prairial an 5, époque où la main-levée en avait été prononcée par un jugement du tribunal civil du département de la Seine, en exécution d'une loi du 30 nivôse précédent, qui avait renvoyé au pouvoir judiciaire à statuer sur les prétentions du trésor public contre la succession Veymeranges. Ainsi, on ne peut douter que, dans cette espèce, il ne fût question d'un séquestre qui

n'avait été ni précédé ni suivi de confiscation.

Le second arrêt est du 3 messidor an 11. Le dispositif en est également rapporté à l'article Enregistrement, §. 17; et en voici l'espèce, telle qu'elle est exposée dans le vu de l'arrêt d'admission de la requête sur laquelle il a statué définitivement.

« Charles Livenne, décédé à Saintes, le 20 thermidor an 3, a laissé des biens dans lesquels la république avait des droits, comme représentant des héritiers émigrés dudit Livenne. Ces droits ont été liquidés par un partage fait devant l'administration centrale du département de la Charente-Inférieure,le 14 germinal an 7. TOME XII.

» Les biens ont été sous le séquestre,' et l'indivis n'a cessé qu'à l'époque du partage; les biens dépendans de la succession, situés dans l'arrondissement du bureau de Chalais, département de la Charente, sont échus en totalité aux héritiers républicoles. » Thérèse-Pélagie Livenne, épouse du cit. Soutras, a recueilli ces biens l'effet du partage; elle a été avertie par le receveur au bureau de Chalais, d'en faire la déclaration et d'en payer les droits d'enregistrement. Cet avertissement étant resté sans effet, il a été décerné, contre elle et son mari, le 9 germinal an 9, une contrainte signifiée le 23 messidor suivant.

par

» Le 29 du même mois, la dame Livenne et son mari ont formé opposition à cette contrainte.

» L'instance portée devant le tribunal de Barbézieux, et d'après les mémoires respectivement signifiés, il a été rendu, le 8 fructidor an 9, un jugement qui déclare l'administration non recevable dans sa demande, et relaxe la cit. Livenne, épouse Soutras, attendu que la Prescription fixée par l'art. 61 de la loi du 22 frimaire an 7, §. 3, est acquise par le laps de cinq années, à compter du jour du décès de Charles Livenne, décédé le 20 thermidor an 3,. en faveur de la cit. Pélagie Livenne, fille du dit Charles Livenne,et épouse du cit.Soutras».

C'est ce jugement que la cour de cassation a annulé le 3 messidor an II.

Voilà donc, depuis la réorganisation de la cour de cassation, opérée en exécution de la loi du 27 ventôse an 8, trois arrêts qui décident, le premier en confirmant un jugement du tribunal civil de l'Aisne, les deux autres en cassant des jugemens des tribunaux de première instance de Paris et de Barbézieux, que le simple séquestre apposé, sans confiscation, sur les biens d'une hérédité, suspend en faveur de la régie de l'enregistrement, la Prescription quinquennale à laquelle sont soumis les droits de mutation qu'elle est chargée de recouvrer et percevoir.

C'est assez dire que la jurisprudence de la cour actuelle de cassation est parfaitement fixée sur ce point; et je dois ajouter qu'elle est conforme aux véritables règles de la matière.

Pour le démontrer, je crois devoir envisager la question sous deux aspects, c'est-à-dire, et par rapport aux successions ouvertes sous l'empire de la loi du 22 frimaire an 7, et par rapport du 5-19 décembre 1790. aux successions ouvertes sous l'empire de la loi

Quant aux premières, l'art. 24 de la loi du 22 frimaire an 7 tranche la difficulté, en décla rant que le délai de six mois dans lequel les héritiers sont tenus de faire leur déclaration et

de payer le droit, ne courra que du jour de la mise en possession pour la succession.... d'un condamné, si les biens sont séquestrés, et celle qui aurait été SÉQUESTRÉE POUR TOUTE AUTRE CAUSE. Il est certain, en effet, d'une part, que la Prescription ne peut pas courir contre une action, tant que celui à qui elle appartient, ne peut pas l'exercer, contrà non valentem agere non currit prescriptio ; de l'autre, que la régie ne peut poursuivre les héritiers à fin de déclaration et de paiement du droit, que lorsqu'est expiré le délai qui leur est accordé pour ce double objet : qui a terme, ne doit rien. Inutile de dire que l'art. 61 admet purement et simplement la Prescription pour les successions non déclarées,après cinq années à compter du jour du décès. L'arrêt du 3 messidor an II répond victorieusement à cette objection, « Les art. 24 et 61 (porte-t-il) doivent être regardés comme n'en faisant qu'un, sans quoi » leur exécution, dans certains cas, serait impossible; car les préposés de l'enregistrement » ne pouvant, aux termes de l'art. 24, faire la » demande des droits, que six mois après la >> mise en possession des héritiers, à l'égard >> des successions séquestrées au profit de la république, s'il était vrai que la Prescription >> eût couru contre eux pendant le séquestre, >> il s'ensuivrait nécessairement que, toutes les >> fois que la mise en possession aurait lieu après quatre ans et six mois, à compter du décès, l'action des préposés ne durerait pas pendant les cinq ans accordés par l'art. 61; » ce qui serait absurde ».

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Inutile encore d'objecter que l'art. 61 fait courir les cinq ans du jour du décès, même pour les successions non séquestrées, quoique la régie ne puisse pas agir pendant les six premiers mois. La seule conséquence raisonnable que l'on puisse tirer de là, c'est que la loi n'a voulu accorder à la régie qu'un espace de quatre ans et six mois pour exercer son action. Pousser cette conséquence plus loin, et aller jusqu'à dire que la Prescription court contre la régie, avant que la régie puisse agir, c'est prêter à la loi une disposition qui répugne à tous les principes, c'est lui faire tenir un langage qui est aussi loin de sa penséc, que contraire à la saine raison.

Plus inutilement encore oppose-t-on, dans l'arrêt du ventôse an 8, 9 que le séquestre ́n'empêche pas la régie de faire tous les actes conservatoires pour le paiement des droits de mutation. Où est-il écrit que des actes conservatoires sont nécessaires pour suspendre la Prescription d'une action que l'on est dans l'impuissance d'exercer par l'effet de la maxime, qui a terme, ne doit rien? Non seulement

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cela n'est écrit nulle part, mais le contraire a toujours été reconnu comme une sorte de dogme judiciaire: Illud autem plus quàm manifestum est (dit la loi 7, §. 4, de proescriptione 30 vel 40 annorum au Code), quod in omnibus contractibus in quibus sub aliquá conditione, VEL SUB DIE CERTA VEL INCERTA, stipulationes et promissiones vel pacta ponuntur, post conditionis exitum, VEL POST INSTITUTE DIEI CERTÆ VEL INCERTE LAPSUM, præscriptiones 30 vel 40 annorum quæ personalibus vel hypothecariis actionibus opponuntur, initium accipiunt. Et Godefroy, dans ses notes sur ce texte, en présente ainsi l'analyse : Proscriptio in obligationibus conditionalibus et IN DIEM, incipit currere adveniente conditione VEL DIE...., NON ANTÈ. Cur? Præscriptio non currit antequàm incipiat actio competere.

Ce n'est pas avec plus de fondement que l'on cherche à argumenter de l'art. 32 de la loi du 22 frimaire an 7. Cet article porte, il est vrai, que la nation aura action sur les revenus des biens à déclarer, en quelques mains qu'ils se trouvent, pour le paiement des droits dont il faudrait poursuivre le recouvrement; mais que prétend-on inférer de là? Que la régie aurait dû, pendant la durée du séquestre, agir contre elle-même et se payer par ses propres mains sur les revenus qu'elle percevait? C'est abuser manifestement du texte de la loi. La loi n'a eu en vue, dans la disposition dont il s'agit, que d'assurer les droits de l'Etat contre les tiers-détenteurs des biens qui ont éprouvé les mutations auxquelles est due l'ouverture de ces droits. Elle n'a nullement songé à attribuer à l'Etat lui-même une action sur des revenus qu'il toucherait directement par l'effet d'un séquestre; et ce qui le prouve d'une manière sans réplique, c'est que, par l'art. 24, elle ne fait, dans le cas du séquestre, courir le délai pour la déclaration et le paiement du droit, que du jour de la mise en possession des héritiers: disposition qui serait absolument illusoire et sans objet, si par l'effet du séquestre, l'État devait se faire à lui-même la déclaration des biens; si, par l'effet du séquestre, il devait se payer à lui-même le droit de mutation, puisqu'une fois la déclaration faite, une fois le droit payé à l'État par l'État lui-même, il n'y aurait plus de déclaration à faire, plus de droit à payer, par les héritiers, après leur mise en possession.

Par là tombe à l'avance un autre argument que l'on oppose à la régie, et qui consiste à dire que l'Etat se trouvant à la fois débiteur des revenus qu'il a touchés en exécution du séquestre, et créancier d'un droit de mutation, il y a eu, dans sa personne, un concours de

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