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d'édifices ou murs, qu'entre héritages de jar. dinage, prés ou terres labourables; de quelle manière les cerquemaneurs, c'est-à-dire, les arpenteurs, doivent figurer dans cette opération; comment et combien de fois, après un premier cerquemanage ou mesurage des résultats duquel on n'est pas satisfait, on peut en requérir un nouveau, aux frais de qui se fait alors le nouvel arpentage, etc.

» Que signifie donc l'art. 4 du tit. 16 de la coutume, quand il dit qu'en matière de cerquemanage, il n'y a point de Prescription ? Il signifie, mais il signifie seulement, qu'une borne servant de séparation entre deux héritages, est une espèce de titre qui réclame sans cesse contre l'usurpateur, et que sa réclamation perpétuelle doit à jamais empêcher celui-ci de prescrire contre son voisin. Il signifie, mais il signifie seulement que, dans la coutume de Cambrai, comme dans celles de Lille, de Douai et de Valenciennes, qui contiennent littéralement la même disposition, l'on n'a pas adopté la loi dernière, C. finium regundorum, ni la loi 1, §. 1, C. de annali exceptione, qui déclarent l'action de bornage prescriptible. Et vouloir conclure de là qu'une action en compte de tutelle soit à l'abri de toute Prescription entre le successeur mobilier de l'héritier à qui elle appartenait, et l'héritier qui aurait pu en être le terme, c'est un paradoxe qui n'a pas d'exemple, et que la demanderesse n'aurait sûrement pas ose proposer à l'audience du tribunal d'appel de Douai.

» Par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu de rejeter la requête en cassation, et de condamner la demanderesse à l'amende de 150 francs ».

Sur ces conclusions, arrêt du 11 ventôse an 11, au rapport de M. Lombard, par lequel, «Attendu que le tribunal d'appel, en trouvant la decharge de la demande en reddition de compte, tant dans les clauses du contrat de mariage d'Amé Bourdon avec Marie-Guislaine de la Charité, que dans la quittance d'AnselmeFrançois-Albéric Bourdon à son père, du 31 février 1747, des comptes, titres et papiers concernant l'administration de ses biens, et dans la Prescription, n'a pas violé la loi en interprétant les clauses d'un contrat de mariage, ni en déclarant la Prescription acquise, n'ayant pas élé justifié que la succession d'Amé Bourdon était restée indivise entre ses enfans, la seule indivision pouvant empêcher le cours de la Prescription;

Le tribunal rejette le pourvoi...

.D.

§. III. 1° Une dette prescrite avant la naissance d'une autre, peut-elle être opposée en compensation à celle-ci.?

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2o Peut-on, à une dette encore exigible, opposer en compensation une dette née avant elle, mais non demandée dans l'espace de temps fixé par la loi pour sa Prescription?

V. le plaidoyer du 21 ventôse an 12, rapporté à l'article Papier-monnaie, §. 4.

S. IV, 1° Pour que la citation en conciliation devant le bureau de paix, in. terrompe la Prescription, est-il nécessaire qu'elle soit immédiatement suivie d'un ajournement?

2o Quel est, relativement à la Prescription, l'effet de la citation devant le bureau de paix, lorsqu'elle n'a été suivie d'ajournement qu'après un temps suffisant pour prescrire de nouveau l'action? 30 Quel est, relativement à la Prescription des actions qui ne durcnt, soit qu'un certain nombre de jours ou de mois, soit qu'une ou quelques années, l'effet de la discontinuation, pendant le temps requis pour les prescrire, des procédures qui l'ont interrompue?

4° En est-il, à cet égard, des matières correctionnelles et de simple police, comme des matières civiles?

I. Sur la première question, V. les plaidoyers et les arrêts des 6 vendémiaire et 22 messidor an 11, rapportés à l'article Bureau de paix, §. 5 et 6.

II.Sur la seconde, V.l'article Péremption, §.5.

III. La troisième question peut se présenter dans deux cas différens :

Dans celui où il y a eu contestation en cause, après l'ajournement;

Et dans celui où, après l'ajournement, il n'a été fait aucun acte de procédure contradictoire entre le demandeur et le défendeur.

Dans le premier cas, nul doute quoique annale ou plus courte encore par elleque l'action, même, ne devienne perpétuelle, en prenant 'ce mot dans le sens des lois romaines, c'est àdire, qu'elle ne se prolonge pendant tout le moins (en matière civile) qu'après trois ans temps requis pour la Prescription ordinaire, à écoulés sans poursuites de part ni d'autre, n'intervienne, sur la demande de la partie intéressée, un jugement qui déclare l'instance éteinte par la péremption.

Au second cas, l'ancienne jurisprudence, comme on l'a vu à l'article Bureau de paix, §. 6, faisait cesser l'effet interruptif de la Prescription, du moment qu'après l'ajournement

il

qui l'avait opéré, il s'était écoulé, sans poursuites, un temps suffisant pour que l'action eût été prescrite, si l'ajournement n'avait pas eu lieu.

Mais sur quoi était fondée cette jurisprudence ? Ce n'était certainement pas sur les règles que le droit romain avait établies relativement à l'interruption civile de la Prescription; car s'il résultait de ces règles que la contestation en cause rendait perpétuelles les actions originairement temporaires, et si, telle était, comme en conviennent tous les interpretes, le sens de la loi 139, D. de regulis juris, lorsqu'elle disait: Omnes actiones quæ tempore pereunt, SEMEL INCLUSE JUDICIO, salvæ permanent, il en résultait aussi que le simple ajournement non suivi de contestation en cause, n'opérait point d'interruption; et cependant les praticiens qui avaient introduit la maxime dont il s'agit, étaient universellement d'accord que nos usages avaient, sur ce point, dérogé au droit romain; ils reconnaissaient tous que le simple ajournement interrompait même la Prescription des actions annales ou plus courtes encore, ni plus ni moins que celle des actions trentenaires. Quelle pouvait donc être leur raison pour faire cesser, à l'égard des premières, l'effet qu'aurait eu l'ajournement d'en interrompre la Prescription, lorsqu'il s'était écoulé, sans contestation en cause, temps suffisant pour les prescrire de nouveau? On ne la devine pas, et c'est un mystère qu'aucun d'eux n'a cherché à expliquer.

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Ce n'est tout. Cette maxime était en oppas position diametrale avec l'art. 15 de l'ordonnance de Roussillon, de 1563. Car cet article, en disant que « l'instance intentée, ores (quoi) qu'elle soit contestée, si, par le laps de trois »ans elle est discontinuée, n'aura aucun effet » de proroger ou perpétuer l'action », décidait bien clairement que toute action, de quelque durée qu'elle fût par sa nature, et conséquemment l'action annale, comme l'action trentenaire, durait au moins trois ans après l'ajournement, soit qu'elle eût été contestée, soit qu'elle ne l'eût pas été, et que l'interruption que la Prescription en aurait soufferte par l'ajournement, ne pouvait cesser que par la péremption. Comment donc les praticiens pouvaient-ils soutenir leur maxime en présence de cet article? En disant que cet article ne devait s'entendre que des actions ordinaires, et qu'on ne pouvait pas l'appliquer aux actions annales? Cependant ils convenaient tous que les actions annales étaient, comme les actions ordinaires, prorogées à trois ans par la contestation en cause, et qu'au bout de trois ans, il fallait que la péremption fût déclarée ac

quise par un jugement; pour qu'elles perdissent leur effet interruptif de la Prescription. Ils convenaient donc que cet article était, en cas de contestation en cause, applicable aux actions annales comme aux actions ordinaires. Et sur quoi se fondaient-ils pour en excepter les premières, pour la restreindre aux secondes, lorsqu'il n'y avait pas contestation en cause? Sur rien, absolument sur rien. Ils distinguaient donc arbitrairement là où la loi ne distinguait pas. Ils s'érigeaient donc en législa 'teurs.

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Au surplus, cette mauvaise' jurisprudence pas survécu au Code civil. L'art. 2247 de ce Code l'a virtuellement abrogée par cela seul qu'après avoir dit que la Prescription, sans distinguer entre la plus courte et la plus longue, est interrompue par la citation en justice, n'a indiqué que trois causes qui puissent en faire regarder l'interruption comme non avenue savoir, le désistement du demandeur, la péremption de l'instance et le rejet de la demande; preuve évidente et sans réplique qu'il n'a pas été dans son intention d'attribuer au seul défaut de poursuites pendant un temps qui aurait suffi pour prescrire l'action, si la citation en justice n'avait pas eu lieu, l'effet de paralyser l'interruption opérée par la citation même.

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IV. Reste la question de savoir s'il en est, à cet égard, des matières correctionnelles et de simple police, comme des matières civiles. Fixons-nous d'abord sur l'objet de cette question.

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Suivant les art. 637 et 638 du Code d'instruction criminelle, «l'action publique et l'action » civile résultant d'un délit de nature à être » puni correctionnellement, sont prescrites après trois années révolues à compter du jour » où le délit a été commis, si, dans cet inter» valle, il n'a été fait aucun acte d'instruction »> ni de poursuites; s'il a été fait dans cet inter»tervalle des actes d'instruction ou de pour» suites non suivis de jugement, ces actions sont prescrites après trois années révolues, à » compter du dernier acte ».

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Et suivant l'art. 640 du même Code, « l'ac» tion publique et l'action civile pour une >> contravention de police seront prescrites après » une année révolue, à compter du jour où elle » aura été commise, même lorsqu'il y aura eu procès-verbal, saisie, instruction ou poursui» te, si, dans cet intervalle, il n'est point >> intervenu de condamnation; s'il y a eu juge» ment définitif de première instance, de na» ture à être attaqué par la voie de l'appel, » l'action publique et l'action civile se pres

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»

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» criront après une année révolue, à compter » de la notification de l'appel qui en aura été interjeté ».

Mais il est dit par l'art. 643 que «< ces dispositions ne dérogent point aux lois particu» lières relatives à la Prescription des actions >> résultant de certains délits ou de certaines » contraventions ».

Ainsi, d'après l'art. 8 du tit. 9 de la loi du 15-29 septembre 1791, renouvelé par l'art. 185 du Code forestier du 21 mai 1827, les délits forestiers commis dans les bois de l'Etat, se prescrivent encore par le laps de trois mois du jour où ils ont été constatés par un procèsverbal qui en indique les auteurs.

Ainsi, les contraventions à la police rurale qui ne sont pas spécialement comprises dans le Code pénal, se prescrivent encore, conformément à la loi du 29 septembre-6 octobre 1791, par le laps d'un mois sans poursuite, à compter du jour où elles ont été commi

ses.

Notre question se réduit donc à savoir si, lorsque, soit dans les trois mois de la reconnaissance d'un délit forestier commis dans les bois de l'État, soit dans le mois qui suit le jour où a été commise une contravention de police rurale, il a été fait, en l'absence du prévenu, un acte quelconque de poursuite,la Prescription est encourue par cela seul qu'il s'est écoulé trois mois pour le premier et un mois pour le second, sans que cet acte ait été continué ou suivi d'un autre.

Elle ne pourrait l'être que d'après le brocard de l'ancienne jurisprudence que j'ai retracée et combattue au no précédent; et c'est assez dire qu'elle ne l'est point. Aussi la cour de cassation a-t-elle annulé un arrêt et deux jugemens en dernier ressort, qui avaient décidé le contraire.

Jean Baillon avait été, dans les trois mois d'un procès-verbal constatant un délit forestier qu'il était inculpé d'avoir commis dans les bois de l'État, cité en police correctionnelle à la requête de l'administration forestière; mais il n'y avait pas eu d'audience au jour indiqué par l'assignation, et ce n'était que plus de six mois après, que l'administration avait fait donner au prévenu une nouvelle assignation qui rappelait la première.

Dans ces circonstances, Jean Baillon a cru pouvoir invoquer la Prescription ; et un arrêt de la cour royale de Bordeaux, du 2 mai 1816, a effectivement jugé qu'elle lui était acquise, parceque l'interruption qu'en avait opérée la première assignation, avait été neutralisée par le défaut de poursuite dans les trois mois sui

vans.

TOME XII,

Mais sur le recours en cassation de l'administration forestière, arrêt est intervenu, le 5 juillet de la même année, au rapport de M. Basire, et sur les conclusions de M. l'avocat-général Giraud-Duplessis, par lequel,

« Vu l'art. 643 du Code d'instruction criminelle....;

» Attendu que l'art. 8 du tit. 9 de la loi du 29 septembre 1791, relatif à la poursuite des délits forestiers, dispose que les actions en réparation de ces délits, sont éteintes et prescrites lorsqu'elles n'ont pas été intentées dans les trois mois où les délits ont été reconnus ;

» Qu'il ne résulte, ni de cette loi, ni d'aucune autre postérieure applicable aux actions forestières, que ces actions, lorsqu'elles ont été intentées dans le délai légal, puissent être déclarées éteintes et prescrites, parcequ'il se serait écoulé plus de six mois sans poursuites, depuis une première assignation à l'échéance de laquelle il n'y aurait pas eu d'audience;

» Que l'art. 643 précité du Code d'instruction criminelle, déclarant expressément que les dispositions de ce Code ne dérogent point aux lois particulières relatives à la Prescription résultant de certains délits, exclud l'application des art. 637, 638, et de toutes autres dispositions dudit Code sur la Prescription, aux actions en réparation des délits forestiers, dont la Prescription est réglée par la loi du 29 septembre 1791; d'où il suit que les tribunaux ne peuvent, sans contravention, déclarer ces dernières actions prescrites, parcequ'il se serait écoulé plus de six mois sans poursuites entre une première assignation donnée dans le délai légal, et une seconde assignation donnée aux mêmes fins que la première ;

>> Attendu qu'en fait, il était constant et déclaré, même par l'arrêt attaqué, que l'action en réparation du délit dont était prévenu Baillon, avait été intentée par une première assignation à lui donnée dans les trois mois où son délit avait été reconnu et conséquemment dans le délai légal ; que, dès-lors, en droit, la Prescription déterminée par la loi du 29 septembre 1791, ne pouvait pas être acquise à Baillon dans l'espèce, quoiqu'il se fût écoulé plus de six mois entre la date de cette première assignation à l'échéance de laquelle il n'y avait pas eu d'audience, et une seconde assignation dans laquelle la précédente était rappelée et qui était donnée aux mêmes fins que la première; que cependant la cour royale de Bordeaux a déclaré la Prescription acquise en faveur de Baillon; et qu'en la déclarant ainsi, elle a violé l'art. 643 du Code d'instruction criminelle;

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Le 30 octobre 1823, jugement, qui, en effet, « attendu qu'il y a eu interruption d'actes de poursuites pendant trois mois, déclare que » l'administration des forêts est non-recevable » à suivre sur son appel, et que l'action est » éteinte et prescrite

".

Mais l'administration des forêts se pourvoit en cassation; et le 6 février 1824, arrêt par lequel,

<< Ouï le rapport de M. Chantereyne et les conclusions de M l'avocat général Freteau de Pény;

Vu les art. 408, 413 et 416 du Code d'instruction criminelle, d'après lesquels la cour doit annuler les arrêts et jugemens en dernier resssort contenant violation des règles de compétence;

» Vu l'art. 8 du tit. 9 de la loi du 29 septem bre 1791, portant que les actions en réparation des délits forestiers, seront intentées au plus tard dans les trois mois du jour où ils auront été reconnus, à défaut de quoi, elles seront éteintes et prescrites;

» Vu les art. 637 et 638 du Code d'instruction criminelle, desquels il résulte qu'en matière de délits correctionnels qui n'ont point été l'objet d'une législation spéciale et contraitraire, la Prescription des délits à l'égard des quels il y a eu poursuites non suivies de jugement, n'a lieu que par le laps de trois ans, à compter du dernier acte;

» Et attendu que la loi 29 septembre 1791, en fixant un délai très-court pour intenter les actions forestières, n'a point statué que ces actions une fois intentées dans le délai de trois mois, seraient prescrites par le seul fait de l'interruption des poursuites pendant le même délai;

>> Que, dans le silence de la loi spéciale sur

(1) Bulletin criminel de la cour de cassation, tome 21, page 93.

ce point, il faut se reporter aux règles générales établies par le Code d'instruction criminelle, et que ce Code n'ayant prononcé contre tout condamné en matière correctionnelle, la déchéance de l'appel que dans le cas où la déclaration d'appeler n'aurait pas été faite au greffe dans le délai de dix jours prescrit par l'art. 203, et n'ayant établi la Prescription de tout délit correctionnel par l'interruption des poursuites qu'après trois ans d'inaction, les tribunaux ne peuvent, sans commettre un excès de pouvoir, créer, en matière de délits forestiers, une péremption qui n'est pas dans la loi, et par suite déclarer prescrite l'action résultant d'un délit qui a été l'objet de poursuites exercées dans les trois mois du jour où il a été reconnu ;

» Attendu, en fait, que l'administration forestière avait intenté son action devant le tribunal correctionnel dans les trois mois de la reconnaissance du délit de pêche dont il s'agit au procès;

» Que, depuis l'appel interjeté en son nom du jugement qui rejetait ses demandes, il n'y a point eu une interruption de poursuites qui pût entraîner la déchéance de cet appel et la Prescription de l'action dont il était l'objet ;

» Qu'il n'y avait donc pas lieu de rejeter un appel déclaré et une action intentée dans les délais de la loi ;

» Que cependant le tribunal de Versailles, tout en convenant qu'en matière d'eaux-et-forêts, la loi n'a point fixé de délai pour la péremption des poursuites sur l'appel, et sous prétexte que, depuis la déclaration d'appel faite au nom de l'administration forestière, il n'avait été fait de poursuites régulières qu'après un laps de trois mois, a déclaré cette administration non-recevable à suivre sur ledit appel, et déclaré prescrite l'action résultant du délit imputé aux nommés Drouin ;

» En quoi ce tribunal a méconnu les règles de sa compétence, fait une fausse application de l'art. 8 du tit. 9 de la loi du 29 septembre 1791, commis un excès de pouvoir encréant une péremption que la loi n'a point établie, et violé l'art. 638 du Code d'instruction criminelle;

>> Par ces motifs, la cour casse et annulle.... (1) ».

Le même jour, autre arrêt qui, dans les mêmes circonstances, a, par les mêmes motifs, cassé un jugement semblable que le même tribunal avait également rendu le 30

(1) ibid., tome 29, page 65.

octobre 1823, en faveur des nommés Tracé, aussi prévenus d'un délit de pêche (1). V. ci-après, §. 29.

§. V. 10 La Prescription a-t-elle couru contre les émigrés, pendant leur absence du territoire français ?

20 A-t-elle couru en leur faveur pendant le même temps?

I. La première question a été jugée pour la négative, par un arrêt de la cour de cassation, du 16 prairial an 12, ainsi conçu :

« Le procureur général expose qu'il croit devoir, en vertu de l'art. 88 de la loi du 27 ventose an 8, requérir la cassation d'un jugement rendu en dernier ressort, le 5 ven ôse dernier, par le tribunal de première instance de Nivelle, département de la Dyle.

» Dans le fait, Nicolas François, demeurant à Jenape, et l'un de ses frères, domicilié à Gembloux, s'étaient pourvus, en 1789, devant les juges de Nivelle, par le ministère de Charles-Alexandre Desvignes, avocat et receveur des domaines en cette ville, contre un frère commun, Charles François, domiclié à Senef.

» Charles François avait défendu à leur demande, et le procès n'avait encore reçu aucune espèce de décision en 1794 (an 2), lorsqu'à l'entrée des armées françaises dans la Belgique, Charles Alexandre Desvignes abandonna la cause de ses cliens, déserta sa patrie, se retira en pays étranger, et fut par suite inscrit sur une liste d'émigrés arrêtée par l'administration centrale du département de la Dyle, le 19 vendémiaire an 5.

» Le 5e jour complémentaire an 10, Charles-Alexandre Desvignes fit, à la préfecture du même département, une déclaration portant qu'il rentrait en France, pour profiter de l'amnistie accordée par le sénatusconsulte, du 6 floréal précédent; et il paraît que depuis il lui a été délivré un certificat d'amnistie, par le grand-juge ministre de la justice.

» En cet état, Charles-Alexandre Desvignes a fait assigner Nicolas François, en paiement de la moitié d'une somme de 336 fraucs 87 cen-times, montant des honoraires des requêtes et écritures qu'il avait faites, tant pour lui que pour son frère, dans l'instance dont il vient d'être parlé.

» Nicolas François a soutenu qu'il ne lui devait rien, qu'il l'avait payé, et qu'en tout cas il était libéré par la Prescription de deux ans, à laquelle l'art. 16 du placard de Charles-Quint

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du 4 octobre 1540 soumet tous salaires d'avo cats et procureurs, à compter du jour du service ou labeur fait, sans, après ledit temps, en pouvoir faire poursuite judiciaire, n'est qu'il y ait cédule ou lettre obligatoire.

» Charles-Alexandre Desvignes a répliqué qu'il n'avait point été payé, et qu'il défiait le défendeur d'en faire preuve ; que, suivant la jurisprudence du conseil de Brabant attestée par le président Wynants, §. 194, no 3, la Prescription biennale que celui-ci invoquait ? ne commençait à courir contre les avocats et procureurs, à l'égard de leurs honoraires, que depuis la sentence définitive, ou depuis le décès des parties, ou depuis la révocation des avocats ou procureurs. Or (a-t-il ajouté), au départ involontaire du demandeur de ce pays, comme étant attaché par état à l'ancien gouvernement, sur la fin de juin 1794, la cause n'était point jugée définitivement: elle ne l'est pas encore; il ne fut point révoqué depuis lors: lui et le défendeur sont en vie. Donc, il n'y a pas lieu à la Prescription réclamée par le défendeur.

>> Sur ces débats, jugement du 5 ventôse an 12, par lequel, attendu que la cause qui fait l'objet des honoraires réclamés, n'était pas terminée lors de l'époque où le cit. Desvignes a quitté ce pays; que, pendant son absence, il a été dans l'impuissance d'intenter son action; et qu'ainsi, les délais pour la Prescription n'ont couru contre lui que depuis son retour; qu'ainsi, le défendeur n'est pas recevable dans son exception de Prescription, doctrine professée par Pothier, en son Traité des obligations, no 690, et W'ynants, décis. 194, no 16.....; le tribunal ( de Nivelle), déclarant la partie défenderesse non-recevable dans son exception de Prescription, l'admet à prouver qu'elle a payé au cit. Desvignes les honoraires qu'il réclame, celui-ci ențier dans sa preuve contraire.

» C'est ce jugement que le procureur général croit devoir dénoncer à la cour de cassation.

» La disposition de l'art. 16 du placard du 4 octobre 1540, dans laquelle se retranchait Nicolas François, est aussi absolue que générale: elle veut que tous salaires d'avocats et procure urs soient deman dés dans les deux ans du jour du service ou labeur fait ; et elle défend, après ledit temps, d'en faire poursuite judiciaire. Elle n'excepte donc, ni le cas où la cause dans laquelle un homme de loi a prêté son ministère à une partie, n'est pas encore jugée, ni le cas où cet homme de loi s'est ab. senté pendant que cette cause était indécise.

» A la vérité, il a été rendu, pour les hom

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