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que le peuple pût blâmer ou approuver le choix impérial. Il prenoit pour règle de conduite la maxime : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu'on te fasse ; » il avoit ordonné qu'elle fût gravée dans son palais et sur les murs des édifices publics. Quand le crieur châtioit un coupable, il lui répétoit la sentence favorite d'Alexandre1: une seule parole de l'Évangile créoit un prince juste au milieu de tant de princes iniques.

Mais les jurisconsultes placés dans les conseils et dans les charges de l'état, Sabin, Ulpien, Paul, Modestin étoient ennemis des disciples de la croix; leur culte paroissoit à ces magistrats amateurs et gardiens du passé, une nouveauté destructive des anciennes lois 2 et des vieux autels. Ulpien avoit formé le septième livre d'un traité sur le devoir d'un consul, des édits

fieri in provinciarum rectoribus, quibus et fortunæ hominum committerentur et capita. (Lamprid., Hist. Aug., pag. 345.)

1 Clamabatque sæpiùs quod à quibusdam sive judæis, sive christianis audierat et tenebat; idque per præconem, cum aliquem emendaret, dici jubebat : quod tibi fieri non vis, alteri ne feceris: quam sententiam usquè adeò dilexit, ut et in palatio et in publicis operibus præscribi juberet. (Lamprid., Hist. Aug., pag. 350.)

2 At enim puniendi sunt qui destruunt religiones..... (Lat. Divin. Inst., lib. v, pag. 417.)

statuant les délits à punir, et les peines à infliger aux chrétiens.

Ulpien, préfet du prétoire, égorgé de la main de ses soldats, avoit été disciple de Papinien. On compte ensuite Paul et Modestin à ce dernier s'éteint le flambeau de cette jurisprudence dont les oracles furent recueillis par Théodose le jeune et par Justinien. Au surplus si les belles lois attestent le génie d'un peuple, elles accusent aussi ses mœurs, comme le remède dénonce le mal. Au commencement les Romains n'eurent point de lois écrites: sous leurs trois derniers rois, une quarantaine de décisions furent recueillies sous le nom de code Papirien 1.

1 C'est le plus ancien monument de la jurisprudence romaine. Sous Tarquin le superbe, Sextus Papirius rassembla dans un seul volume les lois des rois, qui leges regias in unum contulit, dit Pomponius, au sujet de la seconde loi du Digeste. Ces lois royales étoient écrites dans la vieille langue latine ou la langue osque conservée dans l'inscription de la colonne de Duïlius, sur la table de Scipion, fils de Barbatus, et dans le senatus-consulte pour l'abolition des Bacchanales. Les quatre voyelles a, e, i, o, u, prenaient un dà la fin d'un mot, quand ce mot surtout était à l'ablatif. L'e et l'i se mettaient souvent ensemble, ou l'un pour l'autre. L'o remplaçait l'e, l'u s'écrivait ou, ou simplement o, ou encore uo, ou enfin oi. Le d se prononçait du et s'écrivait du. La consonne g n'existait pas et était rem

Les douze Tables composant en tout cent cinquante textes (soit qu'elles aient été ou non

placée par le c; fociont ou fouciount ou foicioint pour fugiunt, montre ces transformations. La consonne m se retranchait souvent quand elle se trouvait à la fin d'un mot, ou prenait une voyelle : urbe pour urbem, tama pour tam. L'r se changeait souvent en s ou plutôt elle ne s'employait qu'à la fin ou au commencement des mots, on a toujours dit roma et non pas soma; mais au milieu des mots l'r que l'on surnommait canina, pour exprimer sa rudesse, se prononçait et s'écrivait s : asa pour ara. x, y, z, étaient des consonnes inconnues dans la langue osque. Les consonnes ne se redoublaient point. A l'exemple de Joseph Scaliger, Antoine Terrasson, dans son histoire de la jurisprudence romaine, a restitué quinze textes du droit papirien. Voici l'exemple du premier :

Jou' papeisianom.

I

Mensa. Deïcatam. Asai. veice. peasestase. jous. estod. utei. endo. Templod. Jounonei'. Poploniai. Aucousta.

mensa. est.

Lisez :

Jus papirianum.

I

Mensam dedicatam aræ vicem præstare jus esto, templo Junonis Populoniæ augusta mensa est.

ut in

empruntées à la Grèce et expliquées par l'exilé Hermodore 1), suffirent à la république tant qu'elle conserva la vertu. Vinrent ensuite, toujours sous la république, le droit Flavien et le droit Elien. Avec Auguste commença, sous l'empire, la loi Regia qu'on a niée, et successivement s'entassèrent les diverses constitutions des empereurs jusqu'aux codes Grégorien et Hermogénien. Alors les Romains corrompus n'eurent plus assez des sénatus-consultes, des plébiscites, des édits des princes, des édits des préteurs, des décisions des jurisconsulies et du

1 Les anciens glossateurs du droit romain racontent sérieusement que les Grecs, avant de faire part de leurs lois aux députés romains, envoyèrent à Rome un philosophe pour savoir ce que c'était que Rome. Ce philosophe, arrivé dans cette ville inconnue, fut mis en rapport avec un fou qui, par de certains signes des doigts, lui indiqua la Trinité. Le philosophe rendit compte de sa mission aux Grecs, et les Grecs trouvèrent que les Romains étaient dignes d'obtenir les lois qui ont fait le fond des douze Tables. Quemdam stultum ad disputandum cum Græco posuerunt, ut si perderet, tantum derisio esset. Græcus sapiens nutu disputare cœpit, et elevavit unum digitum, unum Deum significans. Stultus, credens quod vellet eum uno oculo excæcare, elevavit duos, et cum eis elevavit etiam policem, sicut naturaliter evenit, quasi cœcare eum vellet utroque. Græcus autem credidit quod Trinitatem ostenderet.

droit coutumier. La famille en vieillissant multiplioit les cas de jurisprudence; l'esprit des tribunaux se subtilisoit, à mesure que s'enchevêtroient les rapports des choses et des individus. Deux mille volumes, compilés par Tribonien, forment le corps du droit Romain sous le nom de Code, de Digeste ou Pandectes, d’Institutes et de Novelles, sans parler du droit Grec-Romain, ou de la paraphrase de Théophile, et des sept volumes in-folio des Basiliques, ouvrage des empereurs Basile, Léon le philosophe et Constantin Porphyrogénète; solide masse qui a survécu à Rome, mais qui n'a pu l'arc-bouter assez pour l'empêcher de crouler. La société vit plus par les mœurs que par les lois, et les nations qui se sauvent avec leur innocence périssent souvent avec leur sagesse.

Pendant les règnes de Sévère, de Caracalla, de Macrin, d'Élagabale, et d'Alexandre, le pape Zéphirin succéda à Victor martyr, Calixte à Zéphirin, Urbain à Calixte, et Pontien à Calixte. Minutius Félix écrivit son dialogue pour

défense du christianisme. Minutius se promène un matin, au bord de la mer à Ostie, avec Octavius, chrétien, et Cécilius attaché au paganisme les trois interlocuteurs regardent d'abord des enfants qui s'amusoient à faire glisser des cailloux aplatis sur la surface de

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