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UNIVERSELLE,

PAR

CÉSAR CANTU,

SOIGNEUSEMENT REMANIÉE PAR L'AUTEUR,
ET TRADUITE SOUS SES YEUX,

PAR EUGÈNE AROUX,

ANCIEN DÉPUTÉ,

ET PIERSILVESTRO LEOPARDI.

Tome Cinquième.

PARIS,

CHEZ FIRMIN DIDOT FRÈRÉS, ÉDITEURS,

IMPRIMEURS DE L'INSTITUT DE FRANCE,

RUE JACOB, 53.

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UNIVERSELLE.

LIVRE VI.

SOMMAIRE.

Empire romain. - Les Jules.

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Les Flaviens.

Empereurs de fortune. Empereurs collègues. — Luttes et établissement du Christianisme. - Éclectisme philosophique. - Syncrétisme religieux.

CHAPITRE PREMIER.

REVUE DU MONDE.

Strabon, Pline, Ptolémée, donnèrent dans le siècle que nous abordons la description du monde connu ; ils firent comme un inventaire des pays dominés ou exploités par Rome. Nous nous proposons de les parcourir sur leurs traces, sur celles des historiens et des compilateurs, pour reconnaître le théâtre sur lequel agit l'humanité (1).

(1) Il faut ajouter à ces trois géographes DENYS PÉRIÉGÈTE, auteur d'un abrégé en beaux vers grecs, IIɛpiñuenoic oixovyévns, et PoмPONIUS MÉLA, non moins aride qu'obscur dans le sien. Le premier ne fait guère que mettre Strabon en vers; l'autre suit Ératosthène, en nous conservant des détails empruntés sans doute à des ouvrages qui n'existent plus, et dans lesquels il n'eut pas assez de critique pour faire un choix éclairé. Le naufrage qui a englouti tant d'ouvrages a épargné le Périple de la mer Rouge, d'ARRIEN, négociant romain, probablement établi à Alexandrie; et les Stathmi Parthici d'Isidore de Charax compilation ridicule sur ces peuples redoutables.

Voyez, parmi les modernes :

GossELLIN, Géographie des Grecs analysée. — Recherches sur la géographie des Grecs.

GATTERER, Géographie pour servir d'Introduction à l'hist. universelle (allemand).

T. V.

1

Asie.

Asie en deçà

Les anciens divisaient la terre en cinq zones: deux glacées, aux pôles ; une torride, entre les tropiques : toutes trois inhabitées et inhabitables; et entre elles deux zones tempérées, de l'une à l'autre desquelles il était impossible de passer. Les connaissances géographiques étaient donc limitées à notre zone septentrionale, qui, en excluant les antipodes, embrassait trois parties du globe, l'Asie, la Libye et l'Europe, environnées par l'Océan (1).

L'Asie était, au dire de Strabon, la contrée la mieux connue des géographes, grâce aux expéditions d'Alexandre; mais ils étaient abusés par la fausseté des relations, et il y avait erreur dans les méridiens auxquels ils rapportaient les lieux. Le Taurus ( et ils comprenaient sous ce nom des montagnes tout à fait distinctes de cette chaîne) traversait, selon les anciens, l'Asie entière, à commencer par le pays qui se trouvait en face de Rhodes jusqu'à Thiné, dernière limite orientale, sur une longueur de quarante-cinq mille stades de sorte que cette partie du monde s'étendait pour eux partie en deçà, partie au delà du Taurus.

L'Asie en deçà du Taurus avait pour limites le Tanaïs, les Padu Taurus. lus-Méotides, l'Euxin, l'Océan septentrional, la mer Caspienne, et la langue de terre qui la sépare de l'Euxin.

Ire région.

Au nord, les Scythes erraient sur des chars : de ce côté se trouvaient aussi les Sarmates, issus des premiers, et les Scyraces, dont quelques-uns étaient nomades et d'autres agriculteurs, ayant pour capitale Uspa, vaste amas de huttes d'osier, à trois jours de marche du Tanaïs. Sous le règne de Claude, ils furent exterminés par les Romains, aidés des Aorses, autre nation des rives septentrionales de la mer Caspienne. Elle mettait sous les armes deux cent mille cavaliers, et ses marchands s'en allaient sur des chameaux, à travers l'Arménie et la Médie, chercher les riches produits de l'Inde et de la Babylonie. Peut-être appartenait-elle à la célèbre famille des Huns (2). Diverses nations, désignées par les Grecs sous le nom de Méotes, habitaient dans le voisinage des Palus-Méotides: aux

MANNERT, Géographie des Grecs et des Romains.
MALTE-BRUN, Histoire de la Géographie.

WALCKENAER, Géographie ancienne, historique et comparée des Gaules Cisalpine et Transalpine, suivie de l'analyse géographique des itinéraires anciens; Paris, 1839.

(1) Voy. le Songe de Scipion.

(2) Denys Périégète, contemporain de Strabon, place les Ouni aux mêmes lieux où ce dernier met les Aorses. Ptolémée fait habiter les Chuni sur le Borysthène. Aior en langue scythe signifie homme, et il paraît que Hun a la même signification.

environs du Bosphore étaient les Sindes, les Aspurgiens, les Achéens et les Énioques, qui se livraient à la piraterie le long des côtes de l'Euxin, et déposaient leur butin dans les forêts de chênes de leurs montagnes escarpées. Plus à l'intérieur se trouvaient les Ziges, les Cercètes, qui peut-être sont les aïeux des Circassiens; les Macropogons, ou Longues-Barbes ; les Phthirophages ou Mange-Vers; les vaillants Soanes, dont le pays renfermait des mines d'or. Plus loin, dans la Géorgie, étaient les Ibères, divisés en quatre castes les princes, les prêtres, les guerriers et les serfs. L'Albanie avait pour habitants des peuples assez policés et enrichis par le commerce.

On n'allait plus alors dans la Colchide chercher la toison d'or, mais des toiles fines, de la cire, du goudron, et l'on n'y avait plus à redouter les terribles Amazones.

La deuxième région s'étendait de la rive orientale de la mer Caspienne jusqu'aux portions de la Scythie qui confinent à l'Inde et à l'Océan oriental. Ces pays étaient occupés, sans parler des Scythes, par les Hyrcaniens, les Sogdiens et les Bactriens; ces derniers faisaient anciennement dévorer leurs vieux parents par les chiens; mais les usages grecs finirent par s'introduire parmi eux, et alors s'embellirent leurs villes de Balk et de Maracanda (Samarkand). Les mines de l'Asie septentrionale enrichissaient ces populations et d'autres moins considérables. La Scythie propre devait se diviser en Sarmatique et en Asiatique, la première correspondant à la Tartarie, l'autre au Mogol. Les peuples qui avaient pris part aux vicissitudes des régions civilisées disparaissent de l'histoire après Mithridate; peut-être prospérèrent-ils au cœur de la Russie, jusqu'à l'époque où, les Germains et les Huns ayant abandonné la rive droite de l'Elbe, ils y revinrent, mêlés aux Sarmates, sous le nom nouveau de Suèves (1).

IIe région.

Quand de la Bactriane on venait par la Parthiène, les Portes e region Caspiennes donnaient entrée, à travers de sombres gorges infestées de serpents, dans les vastes plaines de la Médie, fécondées par mille ruisseaux. Là Ecbatane et Ragès conservaient les débris de la magnificence perse, et le mage continuait à rendre au feu un culte innocent, près des sources de naphte. Une partie de la Médie, devenue indépendante au temps d'Alexandre, a conservé jusqu'ici le nom d'Atropatène (Aderbaïdjan).

Les montagnes qui ferment la Médie à l'occident avaient pour

(1) HALLING, Gesch. der Skyten, etc.; Histoire des Scythes et des Allemands jusqu'à nos jours; Berlin, 1835.

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