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ceux des publicistes, des jurisconsultes; les travaux de MM. Pardessus, Beugnot, Troplong, Klimrath, Championnière, Giraud, Laboulaye, Laferrière, Faustin Hélie, de Rozière, et d'autres encore, ont déjà porté l'investigation historique sur diverses parties de la législation; il faut y joindre les publications de ceux d'entre nos collègues de la Faculté de droit de Paris qui ont exploré, dans de savantes dissertations, l'histoire interne de diverses spécialités du droit romain, et celle de notre collègue de la Faculté de droit de Dijon, M. Serrigny, sur le droit public et administratif des Romains; nous n'en sommes plus seulement à cette antique source du droit, nous avons avancé vers les époques qui nous touchent de plus près; l'exploration des origines et des monuments de nos propres institutions est à bon droit l'objet sur lequel a commencé à se diriger avec énergie le mouvement de notre école historique. Je ne saurais trop inviter la jeune génération qui peuple nos Facultés à s'initier à ce mouvement; il importe que cette génération apprenne à vivifier l'étude souvent aride, mais indispensable, des dispositions pratiques de la loi, par le concours fécond de la science philosophique d'abord, et de la science historique en second lieu.

J. ORTOLAN.

HISTOIRE

DE LA

LÉGISLATION ROMAINE.

1. Tout historien devrait être jurisconsulte, tout jurisconsulte devrait être historien. On ne peut bien connaître une législation sans bien connaître son histoire; mais qu'est-ce que cette histoire? le tableau aride des lois classées par ordre chronologique? Non, sans doute. Les mœurs de la nation, ses mouvements, ses guerres, son accroissement, sa civilisation, sont autant de causes qui modifient le droit dont elle se sert; développez ces causes, indiquez leur influence, présentez les variations qu'elles ont amenées. Dans ces développements, faut-il subordonner l'histoire du peuple à celle du droit, et, sans avoir égard aux autres événements, marquer les divisions de son ouvrage aux époques où la jurisprudence a éprouvé de grandes modifications? La plupart des auteurs l'ont fait ainsi. Cependant j'aimerais mieux, à l'inverse, subordonner l'histoire du droit à celle du peuple, et m'attacher pour points de division à ces grands événements politiques qui changent l'aspect d'une nation en changeant son gouvernement. Dans ces secousses, le droit public est renouvelé; et, si quelquefois les mœurs et le droit civil paraissent rester les mêmes, qu'on ne s'y trompe pas : le germe qui doit les modifier plus tard est apporté.

En suivant ce système pour le droit romain, nous aurons à le considérer dans ce résumé sous trois époques : sous les rois, sous la république, sous les empereurs (1).

(1) Je donnerai cependant, à la fin du volume, les divisions plus cominunément adoptées pour l'histoire du droit.

TOME I.

PREMIÈRE ÉPOQUE.

LES ROIS.

1. Origines de Rome.

2. L'enfance de tous les peuples est inconnue; les premières années de leur existence sont remplies par des traditions douteuses et des fables invraisemblables. C'est surtout aux Romains qu'il faut appliquer cette réflexion : leurs origines, bien qu'elles n'aient pas une haute antiquité, sont restées voilées à leurs propres yeux. Des narrations populaires, des chants héroïques, des annales pontificales où la constatation de prodiges et de faits surhumains n'était pas épargnée, ont formé, pour les Romains eux-mêmes, une base première. Là-dessus s'est assise une sorte d'histoire, que leurs poëtes, leurs historiens, leurs publicistes, leurs jurisconsultes, indistinctement, adoptent, répètent, sans hésitation, comme chose reçue et connue de tous. C'est la croyance nationale; on la trouve partout dans leur littérature.

3. Cependant la critique et le scepticisme des temps modernes se sont mis à battre en brèche ces croyances romaines, et la mode a pu venir d'en reléguer les faits et les personnages au rang des mythes, non-seulement dans la partie fabuleuse de ces narrations qui se révèle d'elle-même, mais même dans ce qu'elles ont, en apparence, de plus sérieux.

4. Les efforts ne se sont pas bornés à renverser; la critique a voulu reconstruire: elle s'est travaillée à faire surgir de sa tombe séculaire cette Rome primitive, cette Rome véritable, inconnue aux Romains eux-mêmes. L'ambition de la singularité, l'entraînement et quelquefois la richesse de l'imagination ont poussé dans une voie de hardiesses conjecturales; tandis qu'au dehors le prestige de ce qui paraît nouveauté a fait pour un temps, dans le courant des esprits fascinés, la fortune de ces sortes de conjectures.

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