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par les censeurs. Il est deux villes qui sont fédérées, dont les dîmes ne s'afferment pas, Messine et Taurominium 5. Il en est cinq, outre cela, qui, sans être fédérées, sont franches et libres, Centorbe, Halèse, Ségeste, Halicye, Palerme. Tous les autres territoires des villes de Sicile sont sujets aux dîmes, comme ils l'étaient par les ordonnances et les règlemens des Siciliens eux-mêmes, avant que les villes fussent sous la domination romaine.

Voyez maintenant la sagesse de nos ancêtres après avoir réuni à la république la Sicile, comme une province qui pouvait leur être de la plus grande ressource dans la guerre et dans la paix, jaloux de ménager et de se conserver les Siciliens, ils ont eu l'attention, non-seulement de ne mettre sur les terres aucune imposition nouvelle, mais même de ne donner aucune atteinte à la loi de l'adjudication des dîmes, de ne changer ni le temps, ni le lieu; ils ont voulu qu'on les affermât dans un certain temps de l'année, sur les lieux mêmes, dans la Sicile, enfin d'après la loi d'Hiéron 6; que les Siciliens pussent présider eux-mêmes à leurs affaires, qu'ils ne fussent pas effarouchés par une loi nouvelle, ni même par une loi qui portât un nom nouveau. Ainsi, ils ont ordonné que les dîmes seraient toujours affermées d'après la loi d'Hiéron, afin que les Siciliens s'acquittassent plus volontiers de lcur taxe, si, en changeant d'empire, ils voyaient subsister encore les établissemens et même le nom d'un roi qui leur fut cher. Les Siciliens avaient toujours joui de ce privivilége avant la préture de Verrès. C'est lui qui, le premier, sans respect pour les règlemens observés par tous les autres, les pour pour les coutumes transmises par nos ancêtres, ditions de notre amitié avec les Siciliens et les clauses de leur alliance avec nous, a osé tout changer et tout bouleverser.

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esses,

VII. Qua in re primum illud reprehendo et accuso, cur in re tam veteri, tam usitata, quidquam novi feceris. Ingenio aliquid assecutus es? tot homines sapientissimos et clarissimos, qui illam provinciam ante te tenuerunt, prudentia consilioque vicisti? Est tuum, est ingenii diligentiæque tuæ. Do hoc tibi et concedo : scio, te Romæ, cum prætor edicto tuo possessiones hereditatum 'a suis ad alienos, a primis heredibus ad secundos, a legibus ad libidinem tuam transtulisse: scio, te edicta superiorum omnium correxisse, et possessiones hereditatum non secundum eos, qui proferrent, sed secundum eos, qui dicerent testamentum factum, dedisse: easque res novas abs te prolatas et inventas magno tibi quæstui fuisse scio: eundemque te memini censorias quoque leges in sartis tectis exigendis tollere et commutare: ne is redimeret, cuja res esset: ne pupillo tutores propinquique consulerent, quo minus fortunis omnibus everteretur: exiguam diem præfinire operi, quo ceteros ab negotio excluderes, ipse in tuo redemptore nullam certam diem observares. Quamobrem novam legem te in decumis statuisse non miror, hominem in edictis prætoriis, in censoriis legibus tam prudentem, tam exercitatum : non, inquam, miror, te aliquid excogitasse : sed, quod tua sponte, injussu populi, sine senatus auctoritate, jura provinciæ Siciliæ mutaris, id reprehendo, id accuso. L. Octavio et C. Cotta consulibus senatus

A liberis ad a.

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VII. Ici, Verrès, je vous blâme d'abord et je vous accuse d'avoir donné atteinte à des pratiques aussi anciennes. Avezvous fait quelque découverte par l'effort de votre génie ? Surpassez-vous en lumières et en intelligence tous ces hommes illustres et sages qui, avant vous, ont gouverné la province? Je vous reconnais là; je reconnais votre pénétration et toute votre exactitude. Je vous l'accorde, je vous le passe. A Rome, je le sais, lorsque vous étiez préteur 7, vos ordonnances ont transporté les successions des enfans aux étrangers; des héritiers directs aux collatéraux; des héritiers institués par les lois, à ceux désignés par votre caprice : vous avez, je le sais, réformé les ordonnances de vos prédécesseurs, adjugé les successions, non à ceux qui produisaient des testamens, mais à ceux qui en supposaient. Ces nouvelles règles de votre invention, introduites par vous, vous ont procuré des profits immenses. Je me le rappelle encore, vous changiez et abolissiez les lois des censeurs sur l'entretien des édifices publics; sous votre préture, un particulier, quoique son bien y fût intéressé, ne pouvait se faire donner une entreprise; les tuteurs et les proches ne pouvaient veiller aux intérêts d'un pupille, ni empêcher qu'il ne fût entièrement ruiné: vous aviez soin de prescrire un terme fort court pour un ouvrage, afin d'empêcher les autres de l'entreprendre, tandis que vous ne marquiez aucun terme à vos entrepreneurs. Ainsi, je ne suis pas étonné qu'un homme aussi éclairé et aussi habile que vous dans les ordonnances des préteurs, dans les lois des censeurs, ait établi une loi nouvelle pour les dîmes; non, je ne suis pas étonné que vous ayez inventé quelque chose de nouveau: mais que, de votre propre mouvement, sans l'ordre du peuple, sans l'autorité du sénat, vous ayez changé les lois de la Sicile, c'est en quoi je vous blâme, c'est de quoi je vous accuse.

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permisit, ut vini et olei decumas, et frugum minutarum, quas ante te quæstores in Sicilia vendere consuessent, Romæ venderent, legemque his rebus, quam ipsis videretur, edicerent. Cum locatio fieret, publicani postularunt, quasdam res ut ad legem adderent, neque tamen a censoriis ceteris legibus recederent. Contra dixit is, qui casu tum Romæ fuit, tuus hospes, Verres, hospes, inquam, et familiaris tuus, Sthenius hic Thermitanus. Consules causam cognoverunt : cum viros primarios atque amplissimos civitatis multos in consilium advocassent, de consilii sententia pronuntiarunt, se lege Hieronica vendituros.

VIII. Itane vero? prudentissimi viri, summa auctoritate præditi, quibus senatus legum dicendarum in locandis vectigalibus omnem potestatem permiserat, populusque romanus idem jusserat, Siculo uno recusante, cum amplificatione vectigalium nomen Hieronicæ legis mutare noluerunt: tu, homo minimi consilii, nullius auctoritatis, injussu populi ac senatus, tota Sicilia recusante, cum maximo detrimento atque adeo exitio vectigalium, totam Hieronicam legem sustulisti. At quam legem corrigit, judices, atque adeo totam tollit? acutissime ac dili gentissime scriptam : quæ omnibus custodiis subjectum aratorem decumano tradit, ut neque in segetibus, neque in areis, neque in horreis, neque in amovendo, neque in asportando frumento, grano

Quæ.

Autorisés par le sénat, les consuls L. Octavius et C. Cotta avaient affermé à Rome les dîmes de vin, d'huile et de menues récoltes que les questeurs, avant vous, affermaient en Sicile; ils avaient porté à ce sujet la loi qu'ils jugeaient convenable. Lorsqu'on renouvelait le bail, les fermiers publics demandèrent qu'on ajoutat quelque chose à la loi, et que cependant on ne s'écartât point des autres lois des censeurs. Cette demande fut contredite par quelqu'un qui se trouvait pour lors à Rome, pár votre hôte, Verrès, oui, par votre hôte et votre ami intime, Sthénius de Thermes, ici présent. Les consuls examinèrent la chose. Ayant appelé, pour la délibération, plusieurs citoyens distingués et illustres, ils prononcèrent, de l'avis du conseil, qu'on affermerait d'après la loi d'Hieron.

VIII. Comment! des hommes qui avaient de grandes lumières et une autorité imposante, à qui le sénat avait accordé tout pouvoir de porter des lois pour affermer les impôts, à qui le peuple romain avait confirmé ce pouvoir, de tels hommes ont déféré à la réclamation d'un seul Sicilien; ils n'ont pas voulu, même pour augmenter les impôts, changer le nom de la loi d'Hiéron : et vous, homme sans intelligence, sans autorité, vous vous êtes permis, malgré les réclamations de toute la Sicile, au grand détriment et même à la ruine des impôts publics, vous vous êtes permis, sans être autorisé du sénat et du peuple, d'anéantir la loi d'Hiéron!

Mais quelle loi, Romains, a-t-il réformée, ou plutôt anéantie? Une loi, la plus subtilement et la plus sagement conçue, qui, par toutes les précautions imaginables, livre et soumet au décimateur l'agriculteur veillé de si près, qu'il ne peut, sans s'exposer à la plus rigoureuse peine, frustrer d'un seul grain le décimateur, ni lorsque les blés sont sur

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