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SECONDE ACTION

CONTRE

C. VERRÈS,

TRADUCTION D'ATH. AUGER,

REVUE PAR J. B. LEVÉE.

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APRÈS un long et magnifique préambule, où il montre quel fardeau il s'est imposé en accusant un Verrès coupable de toutes les sortes de crimes, et combien il doit être ennemi d'un pareil homme, d'un homme qui, malgré ses vices et ses forfaits, est protégé et chéri par beaucoup de nobles l'orateur divise son discours en trois parties; il annonce qu'il parlera, dans la première, du blé dîmé; dans la seconde, du blé acheté; dans la troisième, du blé estimé.

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La première partie, où il est question du blé dîmé ou de dîmes, occupe seule près des deux tiers de tout le discours. Cicéron détaille, dans des narrations aussi variées et aussi intéressantes que le sujet peut le permettre, tous les vols que Verrès a faits aux particuliers et aux villes, à l'occasion des dîmes. Il faut savoir que les villes de Sicile, excepté celles qui étaient libres et franches, étaient tenues de payer au peuple romain la dîme de leurs blés. On recueillait cette dîme en nature, et on l'envoyait à Rome.

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Je vais donner mes conjectures sur la manière dont elle se

recueillait : Cicéron ne s'explique pas très-clairement sur cet article, parce qu'il parlait de choses connues de ceux qui l'écoutaient. Lorsque les blés commençaient à croître, des fermiers publics, appelés en latin decumani, et que j'appelle en français décimateurs *, prenaient la dîme à l'enchère (emebant) pour tant de boisseaux de blé : c'està-dire, ils se chargeaient de fournir au peuple romain tant * Je préférerais le mot collecteurs. (Note de l'Editeur.)

de boisseaux de blé pour la dîme qui devait lui revenir de tel champ. Les particuliers ou les villes pouvaient mettre l'enchère sur les décimateurs. Si la récolte était abondante, et si la dîme passait le nombre de boisseaux de blé pour lequel ils avaient pris la dîme, c'était autant de gagné pour eux : ils pouvaient perdre aussi à proportion de ce qu'elle était inférieure à ce nombre. Le préteur, ou quelqu'un pour lui, adjugeait les dîmes à celui ou ceux dont l'enchère était portée le plus haut: cela s'appelait vendere decumás.

Cicéron prétend que Verrès s'était associé aux décimateurs, dont le chef était un Apronius qui est peint, dans le discours, des traits les plus forts et les plus odieux. Il explique trèsbien par quelles injustices criantes les malheureux agriculteurs se trouvaient obligés de donner aux décimateurs plusieurs dîmes au lieu d'une, comment quelquefois il leur restait à peine la dîme de leur récolte. La première partie est terminée par la lecture d'une lettre de Timarchide, accompagnée de réflexions.

La seconde partie traite du blé acheté. Il y avait deux sortes

de blés achetés; une seconde dîme que les peuples de la Sicile étaient obligés de vendre dans les besoins de la république, et huit cent mille boisseaux de blé répartis sur toutes les villes de la même province, qu'on les obligeait de vendre tous les ans. Cicéron montre les vols et les rapines de Verrès, au sujet de ces deux sortes de blé.

Le blé estimé, dont il est question dans la troisième partie, était le blé que la province devait fournir pour la provision de la maison du préteur, et que celui-ci pouvait prendre en argent, au lieu de le prendre en nature. On reproche à Verrès d'en avoir exigé plus qu'il ne lui était dû, et de

l'avoir estimé bien au-delà du prix. Un moyen de défense qu'il alléguait, que d'autres avant lui avaient fait de même, est réfuté d'une manière étendue et éloquente.

Un exposé pathétique de la triste situation des agriculteurs siciliens, termine le discours.

Il est beaucoup parlé, dans ce discours, de médimnes et de boisseaux. Le médimne, selon le père Montfaucon, était une mesure de dix setiers: il fallait six boisseaux pour faire un médimne.

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