Hélas! il te sied trop bien, Tu n'en es que plus piquante Tes yeux ont plus de douceur. ༣། Pour te mieux récompenser. Combien de vœux on t'adresse ! C'est pour toi que la jeunesse Semble croître et se former. Jurent de ne plus t'aimer ! En un piége si charmant, A PYRRH A. Pyrrha, quel est l'amant enivré de tendresse, Et jure qu'à jamais il vivra sous ta loi? Quelle grotte fraîche et tranquille Est le voluptueux asyle Où ce jeune imprudent, comblé de tes faveurs, Te couvre de parfums, de baisers et de fleurs ? C'est pour lui qu'à présent Pyrrha veut être belle; Que ton goût délicat releve élégamment Ta simplicité naturelle, Et fait naître une grâce à chaque mouvement. Qu'elle attache négligemment. Hélas! s'il prévoyait les pleurs qu'il doit répandre! L'orage n'est pas loin: il va bientôt apprendre N'était pas pour long-tems à lui. Qu'alors il pleurera son fatal esclavage! Pour moi le tems m'a rendu sage ; J'ai regagné le port, et j'observe de l'œil C Il faut voir ce qu'est Horace jusque dans un simple billet, où il s'agit d'un souper chez sa maîtresse : son imagination riante l'y conduit en bonne compagnie. O reine de Paphos, de Gnide et de Cythere! Viens, quitte ces beaux lieux, quittes-les pour Glycere. Les Grâces en robe flottante, Les Nymphes à l'envi se pressant sur tes pas, Qui sans toi ne le serait pas. Quelle flexibilité d'esprit et de style ne faut-il pas pour passer de ces images gracieuses aù ton de l'ode Justum et tenacem, dont le début, si fier et si imposant, a été souvent cité comme un modele du style sublime! Un Le juste est inébranlable, Il verra, sans s'émouvoir, Le bras de Jupiter tout prêt à foudroyer: Le ciel tonne, la mer gronde, Sur lui les débris du Monde Il y a dans Horace environ une trentaine d'odes galantes ou amoureuses, qui prouvent toutes combien cet écrivain avait l'esprit fin et délicat. Ce sont la plupart des chefs-d'œuvre finis par la main des Grâces. Personne ne lui en avait donné le modele. Ce n'est point là la maniere d'Anacréòn: le fond de ces petites pieces est également piquant dans toutes les langues et chez tous les peuples où regnent la galanterie et la politesse. Elles sont même beaucoup plus agréables pour nous que les odes héroïques du même auteur, dont le fond nous est souvent trop étranger, et dont la marche hardie et rapide ne peut guere être suivie dans notre langue, qui procede avec plus de timidité, et veut toujours de la méthode et des liaisons. Peutêtre serions-nous un peu étourdis de la course vagabonde du poëte, et trouverions-nous qu'il y a dans cette espece d'ouvrage trop pour l'imagination et pas assez pour l'esprit. Sous ce point de vue, chaque peuple a son goût analogue à son caractere et à son langage; et il est sûr odes, n'étant pas faites pour être chantées, ne pas ressembler aux odes grecques et latines. doivent que nos La plupart au contraire sont des discours en vers, peu près aussi suivis, aussi bien liés qu'ils le seraient en prose. Je ne dis pas qu'il faille nous en blâmer absolument; mais ne seraient-elles pas susceptibles d'un peu plus d'enthousiasme et de rapidité qu'on n'en remarque, même dans nos plus belles? C'est ce qu'il sera tems d'examiner quand il sera question des lyriques modernes (1). (1) Parmi eux la premiere place appartient sans contredit à Rousseau. Mais en finissant cet article, peut-être n'est-il pas inutile d'observer, pour l'intérêt du goût, quel tort lui font ceux qui, rédigeant au hasard des livres élémentaires, des poétiques, des rhétoriques à l'usage des jeunes gens, les induisent en erreur, en citant, à l'abri d'un nom célebre, de très-mauvais vers dont il ne faudrait parler que pour en faire voir les défauts, bien loin de les rapporter comme des autorités. Tous ces compilateurs qui se copient fidellement les uns les autres, et dont le nombre est infini, ne manquent jamais, propos d'Horace, de transcrire le jugement qu'en a porté Rousseau dans ses épîtres. Le voici : à Non moins brillant, quoique sans étincelle, Chante les dieux, les héros, les buveurs, Et De jeunes étudians dont le goût ne peut pas encore être |