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CHAPITRE IV.

Du Budget des Communes.

Sous le Bas-Empire, les communes ou cités étaient tenues non seulement des charges locales, mais encore d'une grande portion des charges de l'État, sous forme de prestations en nature ou de services personnels. On a peut-être un peu exagéré la ruine du régime municipal dans cette période, surtout pour l'Orient. Mais, nonobstant l'opinion récemment exprimée par M. Jullian (426), le système communal était partout en pleine décadence aussi bien en province qu'en Italie, au point de vue politique et financier, d'après le savant et judicieux Bethmann-Hollweg 427).

Il convient de présenter ici un aperçu rapide des recettes et des dépenses de chaque cité, Res publica. Cela permettra de mieux comprendre ensuite le fonctionnement de la comptabilité communale.

SECTION 1.

Recettes du trésor municipal.

Les ressources du patrimoine communal se

composaient de deux éléments principaux, savoir les revenus des domaines et des capitaux d'une part et d'autre part les taxes locales ou vectigalia, indépendamment des produits accidentels ou extraordinaires.

§ I.

Des revenus du domaine communal et des capitaux.

A

Parmi les biens communaux, Bona publica ou Civitatis, les uns étaient comme le forum, les temples, les places, les voies publiques, in usu publico, affectés à un service public et à l'usage commun. (428). Ils étaient inalienables et ne produisaient en général aucun revenu. Les autres au contraire comme les emplacements, Area, ou les terres arables, Agri, les pâturages, Puscua, ou les forêts, Saltus, les lacs, mers, étangs, étaient susceptibles d'exploitation exclusive et par conséquent d'alićnation ou d'exploitation; ils étaient regardés comme in patrimonio populi, et loués à des sociétés ou à des particuliers. En outre la commune pouvait posséder des capitaux mobiliers, Pecunia publica, provenant de dons ou de legs (429) ou

d'économies faites sur les revenus de toute nature, ou du produit des amendes et autres ressources extraordinaires.

Occupons-nous d'abord des biens communaux proprement dits. Depuis longtemps les cités étaient propriétaires de biens communaux, Bona publica, qu'elles avaient obtenus lors de la fondation de la colonie (430) ou que Rome leur avait laissés lors de leur annexion, ou qu'elles avaient acquis ultérieurement. Elles en avaient perdu beaucoup sous l'empire et le bas-empire (v. Hegel, p. 72 et s.). Parmi ces possessions, se trouvaient des terres cultivables, Agri ou Agri fructuarii, situées soit dans le territoire du municipe soit en dehors et parfois au-delà des mers (431). Ces biens, Prædia municipum, étaient affermés tantôt à court terme, cinq ans à des coloni, tantôt à long terme ou perpétuellement à des particuliers, Agri vectigales en sorte que le bail passait aux héritiers (432) et qu'on avait douté si c'était une vente. L'opinion négative avait prévalu, suivant Gaïus, mais néanmoins le préteur protégea le fermier d'abord par des ordonnances possessoires, interdicta, puis par une action in rem (433), et ce droit devint sous l'empire ce qu'on appela l'emphythéose, Emphyteusis (434). Elle fut réglementée par

l'empereur Zénon (435), et ce nom particulier substitué au Jus in agro vectigali ou Jus vectigale, qui permettait à l'emphytéote d'aliéner, et au bailleur ou propriétaire de revendiquer, seulement en cas de commise pour cause de défaut de paiement du vectigal, pendant trois ans d'après les constitutions de Justinien, ou d'exercer le droit de préemption, en cas d'aliénation, et au défaut de toucher leur droit de mutation, Laudemium, de 2 010 ou maximum (436). Ce genre de contrat permettait aux personnes morales, comme les cités et les temples qui ne peuvent surveiller par elles-mêmes la culture, de trouver un mode d'exploitation utile et fructueux, et même le défrichement de leurs landes ou patis. Les prairies, Prata publica, pouvaient être affermés de la même façon. Quelquefois des fermiers, conductores ou mancipes prenaient à bail aux enchères publiques, par adjudication des Pascua ou Saltus communaux, sauf à recueillir un droit de dépaissance tarifé, Scriptura, sur ceux qui y menaient leurs têtes de bétail (437). Le produit des baux ou adjudications passés par les magistrats municipaux ou au Bas-Empire par le Curator reipublicæ, ou par un des décurions à titre de Curator, était versé entre les mains du questeur

de l'Erarium municipal ou ou Arca municipalis. La cité pouvait affermer de même la location de ses étangs, lacs ou carrières moyennant un vectigal (438). Parfois la ville préférait laisser ces landes livrées à la dépaissance commune des bourgeois (439), et on appelait ces terres Communia ou Compascua ou Pascua publica (440).

Quelquefois on affermait aussi l'exploitation des bains publics de la ville à un entrepreneur (441), ou bien on les exploitait en régie par un receveur ou Actuarius, qui exigeait le vectigal des baigneurs, Balneare ou Balneaticum (442). A Antioche le soin des bains formait une charge de décurions, Leitourgia (443). La cité percevait un vectigal pour la location des boutiques, tabernæ, ou pour la jouissance d'une prise d'eau aux aqueducs ou réservoirs communaux, vectigal pro aquæ forma (444), enfin un droit de place, Solarium, pour l'occupation temporaire ou non d'un terrain communal (445).

B.

Souvent la commune possédait des capitaux mobiliers provenant de diverses sources, comme par exemple l'argent promis pour des jeux d'après l'usage, ou payé ob honorem par un magistrat,

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