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de deux chefs ou préfets élus par ce grand corps parmi les membres du rang d'anciens préteurs (176), mais sous le titre de præfecti ærarii Saturni. A la suite de brigues électorales, ils furent remplacés en 731 (de Rome ou 23 de J. C.) par deux fonctionnaires désignés par le sort, parmi les préteurs et qui prirent le nom de prætores ærarii ou ad ærarium (177). C'était rapprocher la juridiction contentieuse en matière financière de la juridiction civile ordinaire.

Comme ils étaient chargés en outre de la garde des archives, qu'il fallait rétablir ou compléter, Tibère leur adjoignit à cet effet, en l'an 16 de notre ère, une commission spéciale de trois magistrats extraordinaires (178) (Curatores, tabularum publicarum ou tabularii publici) qui n'avaient pas encore accompli leur tàche en l'année 46 de J.-C. (179).

La nécessité d'activer la rentrée d'un arriéré considérable conduisit les administrateurs qui guidaient l'empereur Claude à instituer, en 44, dans cette vue, d'autres triumvirs extraordinaires (180). Puis le sort ayant paru peu propre à désigner les chefs du trésor, cet empereur crut devoir restituer cet office à des questeurs, mais choisis au sein de leur collège, par l'empereur et pour trois ans, sous le titre de Questores Erarii Saturni avec promesse d'honneurs tout spéciaux pour récompenser leur bonne gestion (181). Une réforme définitive s'accom

plit enfin sous Néron qui, en 56 de J.-C.. combinant les systèmes antérieurs, confia cet office à deux sénateurs de rang prétorien, élus par le prince pour trois ans au moins et qui prirent le titre de préfets du trésor de Saturne (præfecti ærarii Saturni) (182). On revint, il est vrai, en 69, à des préteurs (183), mais les préfets leur succédèrent bientôt et on les voit fonctionner encore en 80 et ultérieurenient jusqu'à la fin du IIIe siècle, Les questeurs conservèrent cependant quelques attributions secondaires, car on rencontre dans les inscriptions des Quæstores ab ærario Saturni (184) sous Hadrien et Sévère. Enfin on voit sous Diadumène, un rationatis ou procurator mis à la tête des préfets de l'ærarium (185).

La mission de ces préfets du Trésor peut être assimilée à celle de caissier central de notre Trésor public. Ils avaient pour correspondants et subordonnés les questeurs des provinces du Sénat qu'on peut comparer à nos trésoriers-payeurs généraux.

Il appartenait aux préfets de l'ærarium de poursuivre la rentrée et d'effectuer la perception des recettes ou créances de ce trésor, comme aussi d'opérer les paiements entre les mains des créanciers, sous les conditions prescrites par les lois et les règlements. Auguste lui-même, dans son Index rerum gestarum (186), déclare avoir fait verser des sommes considérables dans les mains des chefs de l'ærarium. M. Mommsen (187)

leur reconnait aussi le droit de passer euxmêmes les baux des biens du trésor public, mais il est plus probable que, dans l'origine au moins, ils durent se borner à y assister.

De même que sous la République, les directeurs du trésor de Saturne ne pouvaient percevoir que les recettes autorisées par le budget censorial ou par un vote spécial du Sénat, après l'ordonnance de recouvrement émanée des conseurs, des consuls ou d'autres magistrats compétents, à moins d'une autorisation directe donnée aux préfets du trésor par une loi particulière. S'il y avait eu bail (censoria locatio) des revenus du domaine ou des revenus indirects, les préfets agissaient en vertu du bail contre les adjudicataires, leurs cautions (prædes) ou contre les détenteurs d'immeubles engagés (prædia subsignata), en se faisant envoyer par le préteur en possession des biens des débiteurs du trésor.

Il en était de même pour les condamnés à une peine entrainant confiscation (publicatio). Les préfets faisaient procéder à une vente en masse du patrimoine (sectio bonorum), aux enchères publiques moyennant l'engagement de payer un prix fixé par l'adjudication, et un dividende des dettes du condamné. Enfin les directeurs du trésor agissaient par voie d'exécution civile contre les contribuables en retard. La loi de Malaca(188), en exposant les engagements et le mode de poursuite des adjudicataires des baux communaux,

dit incidemment qu'eux, leurs cautions et les biens engagés seront traités comme si ces personnes et ces biens avaient été engagés au peuple romain devant les magistrats qui président à l'Erarium. En cas de non paiement, les duumvirs avaient le droit de vendre le patrimoine des débiteurs et leurs biens affectés et de fixer la loi de la vente sur décret des décurions; le cahier des charges devait être celui que les préfets de l'Erarium dresseraient en vertu de la lex prædiatoria pour les cautions et immeubles engagés.

Quant au contentieux de l'Erarium, il conviendra d'en parler à l'occasion du contrôle judiciaire ou administratif des finances.

Les questeurs, dans les provinces du Sénat, subordonnés et correspondants du trésor public. conservèrent nécessairement leurs anciennes attributions relatives aux biens et droits appartenant à ce trésor (189). C'est au IIIe siècle seulement qu'on les voit disparaître et remplacer complètement par des intendants impériaux (190), procuratores ou rationales Cæsaris. Néanmoins le prince s'étant emparé déjà d'une grande partie des agri publici et du produit des confiscations (191) et même des lois caducaires à partir du règne d'Antonin Caracalla (192), puis des portoria eux-mêmes (193), les intendants établis dans ces provinces à côté des questeurs, (194) obtinrent seuls compétence pour percevoir les revenus fiscaux. Mais nous n'irons pas jusqu'à décider,

avec Mommsen (195), qu'ils reçurent également le droit de toucher les impôts de l'Erarium. Des textes formels de Dion Cassius et d'Apulée (196) prouvent que les questeurs continuèrent à percevoir le tribut mis en recouvrement par le gouverneur, mais non touché par lui comme l'a cru Walter (197). Car le questeur avait sous ses ordres et dans ses attributions, comme précédemment, la caisse de la province (arca provincia), (198) et seul le maniement des deniers. Pour cela, il tenait à son service des scribes dont il devait payer le traitement au nom de l'ærarium, des teneurs de livres, tabularii, des arcarii ou dispensatores, caissiers, etc., en un mot tout un personnel dont il fournissait l'état au trésor public. Sous Tibère le recouvrement de l'impôt foncier cessa d'être affermé à des publicains (199).

Le régime des comptables du trésor militaire dut être, à l'origine, semblable à celui des trésoriers de l'Erarium Saturni, dont il fut d'abord considéré comme une annexe. Ce qui le prouve, c'est que l'administration de cette caisse fut confiée à trois préfets (200) désignés par le sort et, pour trois ans, parmi les sénateurs eux-mêmes, mais de rang prétorien (201). Plus tard seulement le prince les nomma directement, comme au temps de Dion Cassius (202). Mais l'empereur eut ab initio une infiuence exclusive sur cette caisse dont il avait fourni le capital

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