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ODE III.

A MELPOMÈNE.

O Melpomène, le mortel

Qui vit sur son berceau rayonner ton sourire,
De ces jeux que Corinthe admire
N'enviera pas la gloire, et le prix solennel
Auquel un char brûlant aspire.

On ne le verra point, grandi par ses exploits,
D'un laurier ceignant l'auréole,

Pour avoir châtié l'insolence des rois

Monter vainqueur au Capitole.

Mais Tibur, et sa source et ses bords enchantés,
Ses bois pleins de mélancolie
Illustreront ses vers chers au luth d'Eolie.

Rome, la reine des cités,

Déjà, daigne parmi ses poètes vantés

Placer ma renommée obscure;

Déjà de l'envieux je sens moins la morsure.

O toi, qui de la lyre d'or

Règles les doux soupirs; qui peux, libre et féconde,
Aux muets habitants de l'onde

Donner l'accent du cygne et son rapide essor,
Muse, tu me vaux l'avantage

De me voir signalé du doigt, sur mon chemin,
Comme l'Anacréon romain :.

Si mes chants sont goûtés, leur gloire est ton ouvrage.

ODE IV.

DRUSI LAUDES.

Qualem ministrum fulminis alitem
(Cui rex Deorum regnum in aves vagas
Permisit, expertus fidelem
Jupiter in Ganymede flavo),

Olim juventas et patrius vigor
Nido laborum propulit inscium;
Vernique, jam nimbis remotis,
Insolitos docuere nisus

Venti paventem; mox in ovilia
Demisit hostem vividus impetus;

Nunc in reluctantes dracones
Egit amor dapis atque pugnæ :

Qualemve lætis caprea pascuis
Intenta, fulvæ matris ab ubere

Jam lacte depulsum leonem,
Dente novo peritura, vidit :

Vidêre Rhætis bella sub Alpibus
Drusum gerentem Vindelici; quibus
Mos undè deductus per omne
Tempus Amazoniâ securi

ODE IV.

ÉLOGE DE DRUSUS.

Tel on voit cet oiseau, ministre du tonnerre,
Qui sur le peuple ailé reçut du roi des Dieux
L'empire d'un chef glorieux,

Pour prix du bel enfant qu'il ravit à la terre;

La vigueur de sa race et l'instinct jeune encor Ont lancé hors du nid son novice courage;

Les vents, sous un ciel sans orage,

L'ont soutenu tremblant dans son premier essor :

Bientôt sur les troupeaux, débiles adversaires, Rapide on l'a vu fondre en son vol assuré; Puis de sang, de gloire altéré,

Combattre le serpent qui se tord dans ses serres :

Ou tel que dans les prés en fleur, un lionceau,
Que sa mère a chassé de sa rude mamelle,
Bondit, et sous sa dent cruelle

Se dispose à broyer un innocent chevreau :

Tel les Alpes ont vu, près des sources du Rhône, Drusus porter la guerre aux Rhètes insoumis, Qui vont brisant leurs ennemis

Sous la hache d'acier dont s'armait l'Amazone.

Dextras obarmet, quærere distuli;

Nec scire fas est omnia; sed diù

Latèque victrices catervæ,
Consiliis juvenis revictæ,

Sensere quid mens ritè, quid indoles Nutrita faustis sub penetralibus

Posset; quid Augusti paternus In pueros animus Nerones.

Fortes creantur fortibus et bonis ; Est in juvencis, est in equis, patrum Virtus; nec imbellem feroces Progenerant aquila columbam.

Doctrina sed vim promovet insitam, Rectique cultus pectora roborant : Utcumquè defecere mores, Dedecorant benè nata culpæ.

Quid debeas, ô Roma, Neronibus, Testis Metaurum flumen, et Asdrubal Devictus, et pulcher fugatis

Ille dies Latio tenebris,

Qui primus almâ risit adoreâ,
Dirus per urbes A fer ut Italas,

Ceu flamma per tædas, vel Eurus

Per Siculas equitavit undas.

De cet usage antique où rechercher l'auteur?

C'est le secret du Temps: mais ce peuple terrible,

Toujours et partout invincible,

Dans un jeune héros reconnut son vainqueur.

Il sentit ce que peut une ame haute et belle
Nourrie, en un palais, de préceptes vivants,
Et sur les Nérons ses enfans

Ce que peut de César la grandeur paternelle.

Le brave est fils du brave; un généreux coursier
Garde de ses aïeux l'audace héréditaire;

Né pour le combat, dans son aire

L'aigle n'engendre point le timide ramier.

Mais un courage inné grandit par la culture;
Dans de nobles leçons il trempe sa vigueur :
Livrée à sa fougueuse ardeur

Les vices flétriraient la plus belle nature.

O Rome, des Nérons l'astre heureux te conduit :
Vois Asdrubal mourant aux rives du Métaure;
Songe à ce beau jour, dont l'aurore

De nos calamités a dissipé la nuit;

A ce premier des jours où nous rit la Fortune,
Quand l'horrible Africain courait dans nos cités,
Comme en nos bois épouvantés

Court la flamme, ou l'Eurus dans les champs de Neptune.

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