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corruption feciales: on dit en effet ferire fœdus, faire un traité'. L'institution des féciaux fut établie par Numa, suivant Denys d'Halicarnasse et Plutarque, et par Ancus Martius, au rapport de Tite Live, qui fait mention des orateurs ou héraults que s'envoyèrent réciproquement, sous le règne de ce prince, les Albains et les Romains pour réclamer les choses enlevées, avec les mêmes cérémonies que les féciaux avaient coutume de le faire. Le meilleur moyen de concilier ces opinions serait de supposer que Numa, comme le racontent Plutarque et Denys d'Halicarnasse, employa le ministère des féciaux, mais que les cérémonies et la discipline de leur collége ne furent définitivement réglées que sous Ancus Martius2.

Le collége des féciaux se composait de vingt membres; on n'y admettait ordinairement que les patriciens les plus distingués, et il est constant, d'après Tite Live, que des préteurs, des consuls, des dictateurs en firent partie. Dans les premiers temps, ils étaient choisis par le collége luimême ; plus tard, en vertu de la loi domitia, vers l'an 601, ils étaient nommés dans les comices par tribus, et ils étaient à vie 3.

Ils étaient employés à faire les déclarations de guerre et à conclure les traités. Dans les déclarations de guerre ils se rendaient près du peuple dont les Romains croyaient avoir à se plaindre, pour lui demander satisfaction ad res repetundas, c'est-à-dire, pour réclamer ou des choses injustement en

1 Les féciaux étaient comme des orateurs qui parlaient aux ennemis, au nom des Romains pourquoi ce mot fécial ne viendrait-il pas de fari? corruption pour corruption, cette étymologie de Court de Gébelin nous semble préférable.

2 DEN. D'HALIC., liv. 2, ch. 19; Cic., de Officiis, liv. 3; PLUTARQ. Vie de Numa; AMMIEN MARCELLIN, liv. 19; VARR., liv. 4, ch. 15; TIT. LIV., liv. 1er, ch. 32; liv. 4, ch. 30 ; liv. 7, ch. 6, 9, 16, 32; liv. 8, ch. 22; liv. 9, ch. 5 et 45; liv. 30, ch. 43; liv. 31, ch. 8; liv. 36, ch. 3, et liv. 38, ch, 45.

3 Ils jugeaient toutes les affaires relatives aux déclarations de guerre et à la conclusion des traités. (Cic., de Leg., liv. 2, ch. 9.)

levées, ou l'extradition des criminels ou des fugitifs. Cette réclamation était faite par quatre de ces prêtres '.

Quand le peuple ennemi refusait de les entendre, ou de satisfaire à leurs réclamations, ils lui laissaient trente jours pour délibérer, et si, dans cet intervalle, ce peuple persistait dans son refus, ils retournaient à Rome, pour en référer au Sénat qui, s'il se décidait pour la guerre, les renvoyait aux frontières de l'ennemi, pour lui déclarer une guerre, pieuse et juste, pium justumque. Les féciaux après en avoir prononcé la formule solennelle à haute voix, clara voce, d'où on l'appelait clarigatio, lançaient sur le territoire ennemi, le javelot armé de fer dont ils étaient munis à cet effet 2.

Cet usage resta en vigueur tant que le théâtre de la guerre ne fut point porté au-delà des confins de l'Italie; mais quand une fois les armes romaines eurent franchi les mers, une espèce de clarigatio imaginaria fut inventée pour tenir lieu de l'ancienne coutume. Une colonne appelée colonne de la guerre, columna bellica, s'élevait devant le portique du temple de Bellone, du haut de laquelle le chef des féciaux, jetait un javelot dans une corbeille remplie de terre, placée au pied de la colonne, et qui était censée représenter le territoire ennemi 3.

Dans la conclusion des traités, le président du collége récitait la formule du serment à prêter par les deux parties 4, frappait le front d'un porc que lui présentait le camille, et

I Formule de déclaration de guerre ob eam rem ego populusque romanus populo.... N. hominibusque........ N. bellum indico facioque. (CINCIUS, de re militari, cité par AULU GELLE, liv. 6, ch. 4.) Voir à ce sujet TIT. Liv., liv. 1, ch. 32.

2 Le javelot était ensanglanté. Quelquefois ce n'était qu'un bâton brûlé par un bout. (TIT. LIV., ibid.; PLINE, liv. 22, ch. 2; ROSIN, liv. 3, ch. 21.)

3. Clarigatio imaginaria se passait aussi dans un champ destiné à cette cérémonie, et que l'on appelait ager hostilis (DION CASS., liv. 71, ch. 53; NIEUPOort, liv. 4). La colonne dont il est ici question, était située à l'extrémité supérieure du cirque. (OVID., Fast., liv. 6, v. 205.)

4 TIT. LIV., liv. 1er, ch. 24.

s'adressant à Jupiter, lui disait à peu près : O Jupiter, que celui des deux peuples qui manquera le premier à ce traité, soit frappé par toi, comme je frappe ce porc 1!

Il y avait, outre les féciaux, certains arbitres qui connaissaient des infractions faites aux traités. De plus ils étaient chargés de veiller à ce qu'il ne fût fait aucune injure aux ambassadeurs; ils avaient le pouvoir de rompre la paix même régulièrement conclue, et de casser les traités qu'ils jugeaient contraires à la dignité du peuple romain. Ils avaient en outre le droit de livrer aux ennemis les auteurs de ces traités.

Leur président s'appelait pater patratus; pater, parce qu'il devait avoir encore son père et être père lui-même, et patratus de jure jurando patrando, id est, agendo, perficiendo. Son ministère n'était point perpétuel, et il devait être renouvelé par le collége des féciaux à chaque négociation particulière. Son caractère était sacré, sa personne inviolable, même au milieu des ennemis, et, pour n'être, par imprudence ou autrement, l'objet d'aucune insulte, il portait à la main des tiges de verveine, cueillies dans un champ voisin du capitole, et destiné à la culture de cette plante, sous l'inspection de l'un des féciaux qui en prenait le nom de verbenarius 2. Les féciaux chargés de faire les traités s'appelaient cadu— ceatores, du caducée que, dans ces occasions, ils portaient au lieu de javelot.

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Le roi des sacrifices présidait en général aux sacrifices de tous les dieux. Le nom de roi lui était attribué parce que,

1 Il frappait la victime avec un caillou, privos lapides silices (TIT. LIV., liv. 30, ch. 43), porcum saxo silice percussit. (Id. liv. 1er, ch. 24.)

2 Cette verveine était arrachée avec la racine, gramen ex arce cum sua terra avulsum. (PLIN., liv. 22, ch. 3; liv, 30, ch. 9.)

sous la royauté romaine, les rois présidaient à certains sacrifices, et quelques autres ne pouvant être célébrés que par eux, il parut convenable aux Romains, après l'abolition de la royauté, d'en conserver au moins le nom pour empêcher le peuple de regretter la chose; ce titre répondait à celui de Βασιλευς τῶν ἱερῶν chez les Grecs :.

Le roi des sacrifices devait être choisi dans l'ordre des patriciens. Anciennement il l'était par le collége des pontifes et des augures, plus tard il le fut par le peuple dans les comices par centuries 2.

II occupait le premier rang parmi les pontifes; mais son pouvoir ne répondait pas à son titre; car s'il l'emportait, quant à la dignité, sur le pontifex maximus, et, par cette raison, avait la préséance sur lui dans les cérémonies publiques, telles que les festins sacrés 3, le Sénat l'avait placé, quant au pouvoir, sous l'autorité de celui-ci. Le motif en était la crainte que l'autorité de prêtre jointe au nom de roi, ne devint quelque jour préjudiciable à la liberté. Par la même raison, le roi des sacrifices n'était admis à remplir aucune fonction soit civile, soit militaire 4. Il était nommé à vie et devait avoir son domicile dans la voie sacrée, in viá sacra; son habitation s'appelait par excellence regia, et sa femme regina sacrorum 5.

I DEN. D'HALIC., liv. 1er, ch. 5; TIT. LIV., liv. 2, ch. 2; PLUT., Quest.romaines, no 63; Rosin, liv. 3, ch. 25; AUL. GEL. liv. 15, ch. 27.

2 L'an 543 de Rome, après la mort de M. Marcius, on ne nomma point de rex sacrificulus. (TIT. LIV., liv. 27, ch. 6.)

3 Super flaminem dialem in convivio nisi rex sacrificulus haud quisquam alius accumbit. (AUL. GEL., liv. 10, ch. 15.)

4 Voir TIT. LIV., (liv. 40, ch. 42) à propos de la nomination de L. Cornelius DolaAbella et son inauguration par le souverain pontife C. Servilius.

5 SUÉT., liv. 11, ch. 76; MACROB., liv. 1er, ch. 15. La regina sacrorum était chargée de quelques fonctions religieuses. (ID., ib.) Les vestales allaient à certains jours trouver le roi des sacrifices et lui disaient : Vigilas-ne rex? Vigila. (SERV. sur le 10e liv., Æneid.)

On trouve dans les anciens quelques détails sur la nature des fonctions du rex sacrificulus : il immolait un bélier dans sa maison à l'époque des fêtes agonales; il était chargé des cérémonies expiatoires à l'occasion du supplice des citoyens condamnés à mort; tous les ans, le 24 février, il se rendait dans les comices pour y faire un sacrifice solennel, après lequel il sortait du forum en fuyant le plus rapidement qu'il lui était possible, d'où ce sacrifice prenait le nom de refugium; enfin c'était lui qui indiquait au peuple les fêtes pendant lesquelles il était défendu de se livrer à aucun travail. Comme il lui était prescrit à lui-même d'éviter pendant ces jours la rencontre de qui que ce fût occupé à travailler, il devait se faire précéder, lorsqu'il paraissait en public, d'un héraut qui criait en avant de lui: Venit rex! Le contrevenant était puni d'une amende 1.

Cette dignité dura jusqu'au règne de Théodose premier, lorsque la religion chrétienne devint celle de l'État ".

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L'institution des Vestales est attribuée à Numa. Ces prêtresses étaient consacrées au culte de Vesta en grec Eorix, déesse du feu, la même que la terre, d'après ce vers d'Ovide: Stat vi terra sua, vi stando, Vesta vocatur 3.

Le culte de Vesta fut, dit-on, apporté en Italie par Énée. Il existait avant Romulus, et avant lui, il y avait des Vestales, mais probablement elles ne formèrent un collége et ne furent légalement établies que par Numa, auteur de tant d'autres institutions religieuses 4.

I MACROB. SATURN., liv. 1er, ch. 16.

2 ROSIN, liv. 3, ch. 25.

3 OVID., Fast., liv. 6, ch. 299.

4 PLUTARQ., Vie de Numa; DEN. D'HALIG., liv. 7; FLORUS, liv. 1er, ch. 2; Tır. Liv., liv. 1er, ch. 3 et 20; VIRG., Énéid., liv. 1er; ROSIN, liv. 3, ch. 19.

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