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que

habiller. Voilà le sujet de mon prologue, auquel je travaillai trois ou quatre jours avec un assez grand dégoût, tandis M. Racine de son côté, avec non moins de dégoût, continuoit à disposer le plan de son opéra, sur lequel je lui prodiguois mes conseils. Nous étions occupés à ce misérable travail, dont je ne sais si nous nous serions bien tirés, lorsque toutà-coup un heureux incident nous tira d'affaire. L'incident fat que M. Quinault s'étant présenté au roi les larmes aux yeux, et lui ayant remontré l'affront qu'il alloit recevoir, s'il ne travailloit plus au divertissement de sa majesté, le roi, touché de compassion, déclara franchement aux dames dont j'ai parlé qu'il ne pouvoit se résoudre à lui donner ce déplai sir. SIC NOS SERVAVIT APOLLO. Nous retournâmes donc, M. Racine et moi, à notre premier emploi, et il ne fut plus mention de notre opéra, dont il ne resta que quelques vers de M. Racine, qu'on n'a point trouvés dans ses papiers après sa mort, et que vraisemblablement il avoit supprimés par délicatesse de conscience, à cause qu'il y étoit parlé d'amour. Pour moi, comme il n'étoit point question d'amou rette dans la scene que j'avois composée, non seule ment je n'ai pas jugé à propos de la supprimer, mais je la donne ici au public, persuadé qu'elle fera plaisir aux lecteurs, qui ne seront peut-être pas fàe chés de voir de quelle maniere je m'y étois pris pour adoucir l'amertumeet la force de ma poésie satirique,

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318 AVERTISSEMENT AU LECTEUR.
et pour me jeter dans le style doucereux. C'est de
quoi ils pourront juger par le fragment que je leur
présente ici, et que je leur présente avec d'autant
plus de confiance, qu'étant fort court, s'il ne les
divertit, il ne leur laissera pas du moins le temps
de s'ennuyer.

LA POESIE, LA MUSIQUE.

LA POÉSIE.

Quoi! par de vains accords et des sons impuissants, Vous croyez exprimer tout ce que je sais dire?

LA MUSIQUE.

Aux doux transports qu'Apollon vous inspire
Je crois pouvoir mêler la douceur de mes chants.
LA FOÉSIE.

Oui, vous pouvez au bord d'une fontaine
Avec moi soupirer une amoureuse peine,
Faire gémir Thyrsis, faire plaindre Climene.
Mais, quand je fais parler les héros et les dieux,
Vos chants audacieux

Ne me sauroient prêter qu'une cadence vaine :
Quittez ce soin ambitieux.

LA MUSIQUE.

Je sais l'art d'embellir vos plus rares merveilles.

LA POÉSIE.

On ne veut plus alors entendre votre voix.

LA MUSIQUE.

Pour entendre mes sons, les rochers et les bois
Ont jadis trouvé des oreilles.

LA POÉSIE.

Ah! c'en est trop, ma sœur, il faut nous séparer.

Je vais me retirer:

Nous allons voir sans moi ce que vous saurez faire.

LA MUSIQUE.

Je saurai divertir et plaire;

Et mes chants moins forcés n'en seront que plus doux.

LA POÉSIE.

Hé bien, ma sœur, séparons-nous.

LA MUSIQUE.

Séparons-nous.

LA POÉSIE.

Séparons-nous.

CHOEUR DE POETES ET DE MUSICIENS.

Séparons-nous, séparons-nous.
LA POÉSIE.

'Mais quelle puissance inconnue
Malgré moi m'arrête en ces lieux ?

LA MUSIQUE.
Quelle divinité sort du sein de la nue?
LA POÉSIE.
Quels chants mélodieux

Font retentir ici leur douceur infinie?

LA MUSIQUE.

Ah! c'est la divine Harmonie
Qui descend des cieux!
LA POÉSIE.

Qu'elle étale à nos yeux
De graces naturelles !

LA MUSIQUE.

Quel bonheur imprévu la fait ici revoir !
LA POÉSIE ET LA MUSIQUE,

Oublions nos querelles,

Il faut nous accorder pour la bien recevoir.

CHOEUR DE POETES ET DE MUSICIENS,

Oublions nos querelles,

Il faut nous accorder pour la bien recevoir.

EPIGRAM MA

in novum Causidicum, rustici Lictoris filium.

Dum puer iste fero natus lictore perorat,
Et clamat medio, stante parente, foro;
Quæris quid sileat circumfusa undique turba?
Non stupet ob natum, sed timet illa patrem.

Alterum in Marullum, versibus Phaleucis antea malè laudatum.

NOSTRI quid placeant minùs Phaleuci,
Jamdudum tacitus, Marulle, quæro,
Cùm nec sint stolidi, nec inficeti,
Nec pingui nimiùm fluant Minerva.
Tuas sed celebrant, Marulle, laudes:
O versus stolidos et inficetos!

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