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avec les citoyens romains. Il arriva aussi tout naturellement qu'une partie considérable de ce jus gentium, qui jusque-là avait été réellement étrangère au droit romain dans sa forme propre originaire, y fut formellement admise comme un complément nécessaire, parce que le besoin de cette extension se faisait sentir, surtout depuis qu'en appliquant ces dispositions aux peregrini on avait appris à en apprécier l'utilité. De là la notion du jus gentium nonseulement comme droit dés peregrini, mais aussi comme droit des Romains, le droit des Romains se composant désormais techniquement de deux parties constituantes, le jus civile et le jus gentium, qui se complétaient mutuellement. Il est cependant certain que tout le jus gentium ne fut pas dès lors introduit dans le droit romain. Au contraire, le droit propre des peregrini en resta toujours rigoureusement distinct.

L'idée que les Romains attachaient au jus naturale, qu'ils nomment quelquefois à côté du jus gentium, est singulièrement incertaine et flottante, puisque tantôt il se présente comme synonyme du jus gentium, tantôt comme la partie de ce droit qui repose en quelque sorte sur un instinct communaux hommes et aux animaux, quod natura omnia animalia docuit, tandis que le reste du droit repose plutôt sur la raison humaine et la nature propre de l'homme.

S 17.

Division du droit, d'après ses sources, en jus scriptum et non scriptum.

Dans une manière de s'exprimer que les Romains avaient empruntée des Grecs, comme ils le disent eux-mêmes, et transportée dans leur langue juridique, ils divisaient, dès une époque assez ancienne, tout le droit positif en jus scriptum, quod ex scripto venit, et en jus non scriptum, quod ex non scripto venit. Cette division se rattache, il est vrai, à la naissance et au développement du droit par des lois promulguées et par des coutumes, mais il ne faut pourtant pas, ainsi qu'on le fait souvent, la prendre comme techniquement équivalente à la division en droit provenant des lois et droit provenant des coutumes; car, bien que toutes les lois publiées appartinssent, d'après la manière de voir des Romains, au scriptum jus, tout le droit coutumier ne rentrait cependant pas indistinctement dans le jus non scriptum : il s'agissait plutôt de savoir si, pour telle ou telle source du droit, la cause de sa force positive était fondée ou non sur un document écrit.

Une autre division, basée sur un motif tout différent, purement historique, et qui n'embrasse pas à beaucoup près toutes les sources du droit, c'est la

distinction entre la lex proprement dite, d'une part; et id quod legis habet vigorem, ainsi que id quod legis vicem obtinet, d'autre part. Aussi, dans ce qui va suivre, sans nous attacher préférablement ou exclusivement à l'une de ces divisions, qui, en général, n'offrent aucun intérêt pratique, nous traiterons, dans un ordre plus naturel, des sources du droit particulières à cette période.

$ 18.

Des lois proprement dites, leges populi, plebiscita et senatusconsulta.

Nous trouvons dans cette période trois corps politiques différents formellement investis de la puissance législative, et le rapport de ces trois pouvoirs entre eux fut, pendant un temps, incertain et variable, comme tout l'ensemble de la constitution politique de cette époque.

La puissance législative la plus incontestée était exercée par le populus, l'universalité des citoyens romains, patriciens et plébéiens, dans les centuriata comitia. Ce n'était point là une nouvelle institution de la libera respublica, mais une institution conservée du temps des rois comme un antique élément de la libre constitution originaire: seulement c'étaient aujourd'hui les consuls ou certains autres magistratus populi qui proposaient au peuple les

nouvelles lois sur lesquelles il devait voter. Maintenant, comme ces magistratures, au commencement de cette période, étaient encore toutes réservées aux patriciens; comme, en outre, toute l'organisation des centuries, fondée sur le census, amenait ce résultat que les patriciens, quand ils s'entendaient contre les plébéiens, avaient toujours la prépondérance; comme, enfin, d'après la constitution d'alors, les résolutions prises par le populus à la majorité des voix devaient être approuvées par le sénat, corps purement patricien, avant qu'elles obtinssent force obligatoire de loi, comme leges populi, populi scita, il en résultait évidemment que cette puissance législative du populus était subordonnée à l'influence aristocratique des patriciens.

L'insignifiance politique du rôle que jouait la plebs dans les comices par centuries fut précisément la cause principale qui la poussa, dès le commencement de cette période, à tâcher d'obtenir par la force une puissance législative propre et indépendante. En effet, les tribuns, quoique cela ne rentrât pas dans leurs attributions originaires, commencèrent bientôt à présenter des propositions de nouvelles lois à la plebs, rassemblée, pour d'autres objets d'intérêt commun, dans les tributa comitia. Si ces propositions étaient adoptées à la majorité des voix, elles prenaient le nom de plebiscita. Ces résolutions, n'ayant pas besoin de l'approbation ultérieure du sénat, étaient donc indépendantes de toute

influence directe des patriciens, et par cette raison ceux-ci refusèrent d'abord de reconnaître à ces pébliscites une force obligatoire pour leur ordre. L'application des plébiscites aux patriciens paraît donc être restée indécise pendant un certain temps, jusqu'à ce que, par des efforts successifs, les plébéiens eussent fait prévaloir la maxime ut plebiscita universum populum tenerent, et introduit par là une égalité parfaite entre les leges populi et les plebiscita, en vertu de laquelle ces derniers eurent aussi legis vigorem.

L'union et l'assimilation politique des patriciens et des plébéiens ayant achevé de s'établir avec ses conséquences diverses, le caractère originairement si tranché des plébiscites, comme pures lois de la plebs, disparut à peu près complétement dès le milieu de cette période, et, par les mêmes motifs, il ne put plus être question d'une prépondérance des patriciens dans les comices par centuries. Aussi la différence entre ces deux sortes de lois finit par n'être plus que de forme, sans avoir désormais aucune valeur politique. Si, du reste, les plébiscites forment pour le droit privé une source plus abondante que les leges populi, cela tient soit à la position des tribuns de la plebe vis-à-vis les magistratus juri dicundo, soit à d'autres circonstances plus accidentelles.

Aux résolutions du peuple entier, les leges proprement dites, se réfèrent directement les expres

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