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au nombre de ceux à qui il offrait la bonorum possessio, même ceux qui étaient déjà appelés par le droit civil à l'hereditas, et assigna à chacun, dans l'édit, sa place déterminée, en indiquant l'ordre et le rang dans lequel il devait être appelé.

par

Dans le principe, la bonorum possessio n'était accordée à ceux qui la demandaient que dans des cas particuliers, causa cognita pro tribunali, et des décrets spéciaux; mais il se forma par là peu à peu des règles et des principes fixes, qui prirent place dans l'édit d'une manière permanente. Ainsi s'établit l'edictalis bonorum possessio, et les cas où il était encore besoin de la decretàlis bonorum possessio devinrent de plus en plus rares.

Le préteur, fidèle à sa tendance générale, dans le développement de son nouveau système de succession, se tint le plus près possible de l'hérédité civile, en sorte que la bonorum possessio ne se présentait que comme une extension, une modification de l'hereditas, exigée par les besoins des temps. De là, pour la bonorum possessio, la double délation en vertu d'un testament et ab intestat; de là la division en bonorum possessio secundum seu juxta tabulas et en bonorum possessio intestati, à laquelle se rattache également, à l'imitation de l'hereditas, la bonorum possessio contra tabulas.

Comme, en règle générale, le préteur admettait maintenant à la bonorum possessio, sans causæ cognitio préalable, ceux qui, en invoquant l'édit,

la demandaient, petebant, agnoscebant, il pouvait facilement arriver qu'il se présentât pour la même succession plusieurs ayants droit, soit de ceux qui fondaient leurs prétentions sur le droit civil, l'hereditas, soit de ceux qui les appuyaient sur le droit prétorien, la bonorum possessio. Il s'agissait alors de savoir si ces successeurs prétoriens pouvaient faire prévaloir leurs prétentions contre les successeurs civils, ou s'ils devaient leur céder et se voir enlever par eux la succession, en être évincés. En effet, le préteur ne garantissait nullement d'avance à ceux à qui il promettait la bonorum possessio, qu'ils pourraient et devraient conserver les biens, mais il laissait la décision sur ce point dépendre ultérieurement des circonstances. Cependant il s'établit bientôt là-dessus une règle fixe. Lorsque la bonorum possessio était promise aux héritiers civils, il fallait voir quelle place leur assignait l'édit, si c'était avant ceux qui ne pouvaient s'appuyer que sur le droit prétorien, ou au même rang, ou seulement après. A cela se rapporte la division en bonorum possessio cum re et bon. poss. sine re.

Du reste le bonorum possessor, même quand sa bonorum possessio était cum re, en sa qualité de successeur prétorien, n'était pas heres et par conséquent véritable représentant du défunt, comme cela avait lieu dans la succession civile. Mais le préteur non-seulement le protégeait dans sa possession de la succession par l'interdictum quorum bonorum

ci-dessus mentionné (1), mais le traitait, en général, comme héritier, heredis loco, heredis vice, puisqu'il lui accordait les mêmes droits et lui imposait les mêmes devoirs qu'à un heres, avec quelques modifications que la différence des positions avait nécessairement introduites. Seulement, et cela était tout à fait dans l'esprit du droit prétorien, la propriété quiritaire du défunt ne passait pas au bonorum possessor, qui n'avait les choses héréditaires qu'in bonis, jusqu'à ce qu'il eût accompli l'usucapion. Cette différence tombe d'elle-même dans le nouveau droit, depuis la fusion de la propriété quiritaire et de la propriété naturelle. Le bonorum possessor ne pouvait non plus agir et être actionné qu'utiliter, tandis que les actions directes compétaient à l'héritier et contre l'héritier.

C'est ainsi que, pendant un certain temps, le droit de succession chez les Romains se trouva composé des deux systèmes, l'hereditas et la bonorum possessio; la manière dont ils se combinaient ensemble et se complétaient mutuellement, dont ils s'emboîtaient et s'engrenaient l'un dans l'autre, s'il est permis de parler ainsi, reposait sur des principes la plupart très-artificiels et très-compliqués. Mais,

(1) Ceci n'est pas parfaitement exact; cet interdit offre seulement. le moyen d'acquérir la possession effective à laquelle la bonorum possessio obtenue du préteur donne droit. (Voy., ci-dessus, la note 1 de la pag. 395.)

(Note du traducteur.)

dans le cours des temps, après que le nouveau droit civil eut commencé à faire, dans les principes de l'hereditas, des changements dictés par le même esprit qui avait donné naissance à la bonorum possessio, les deux systèmes de successions se rapprochèrent toujours davantage l'un de l'autre. Enfin on en vint au point qu'ils ne furent plus placés l'un en regard de l'autre comme deux systèmes différents et indépendants, mais qu'il n'y eut plus que l'hereditas modifiée en quelques points particuliers par la bonorum possessio.

La voie la plus simple et la plus directe pour atteindre le but de ce cours élémentaire nous paraît être celle-ci : nous n'exposerons pas le système de la bonorum possessio en lui-même, séparément de celui de l'hereditas; mais, après une introduction historique générale, embrassant l'ensemble des successions, quand, parvenu aux théories particulières de la matière, nous rencontrerons les points où se montre la bonorum possessio, nous expliquerons son influence sur l'hereditas et la fusion qui a pu s'opérer entre elles.

CHAPITRE II.

DE LA DÉLATION DE LA SUCCESSION D'APRÈS UN

TESTAMENT.

$ 175.

Notion générale du testament.

Déjà, suivant le droit des Douze Tables, peut-être même plus tôt, il était libre à tout citoyen indépendant et pubère d'exclure, dans le cas particulier, l'ordre légal de succession, qui régulièrement aurait eu lieu sans cela, en substituant sa dernière volonté individuelle à la volonté générale du législateur, c'est-à-dire en se nommant à lui-même son futur héritier.

La testamenti factio dans le sens large, c'est-àdire la capacité de figurer honorablement dans la confection d'un testament romain, soit comme testateur, soit comme héritier, soit comme légataire, soit comme témoin, fut, dès les premiers temps, considérée comme un des droits les plus importants que comprenait le droit de cité, et comme étant publici juris, quoique tenant en apparence, par sa nature, au droit privé.

Toutefois le droit romain ne permettait de disposer ainsi personnellement, individuellement, de

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