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ici entre les actions dommageables positives et les simples omissions dans des circonstances où l'on aurait pu prévenir le dommage en agissant.

En effet, partout et dans toutes les circonstances, on est responsable pour ses actions nuisibles positives, qu'elles soient l'effet d'un dol ou d'une simple faute, et que, dans ce dernier cas, la faute reprochée à l'auteur de l'action soit plus ou moins grande, pourvu, cependant, qu'il y ait faute. La raison en est que tout préjudice causé par une action positive, facere, est en contradiction directe avec le principe général du droit : neminem læde. Là-dessus se fondent les dispositions de la lex Aquilia et le délit qu'elle réprime, le damnum injuria datum, dont il sera parlé plus bás.

Il en est autrement de la simple inaction, de l'omission. Personne n'est obligé, par un principe général du droit, envers tous ses concitoyens, à une activité positive, à des soins attentifs, pour détourner le dommage dont ils peuvent étre menacés, en un mot, à une diligentia. C'est seulement par exception, dans les cas où, par , par des raisons particulières, certaines personnes ont acquis le droit spécial d'exiger une telle diligentia, c'est seulement alors que l'omissio diligentice, constituant une faute, culpa, qui, dans ce cas, comme omissio diligentiæ, s'appelle aussi negligentia, rend responsable celui à qui elle est reprochée.

Régulièrement, un semblable droit d'exiger la

diligentia ne s'établit que par des rapports obligatoires spéciaux entre des personnes déterminées, et c'est le genre de ces rapports obligatoires qui détermine jusqu'où s'étend l'obligation à la diligentia.

D'abord, on est toujours responsable d'un dol véritable, même dans le cas d'omission: dolus semper præstatur.

Mais, au contraire, quant à la faute d'omission, sur la question de savoir jusqu'à quel point on en est tenu, jusqu'à quel point il faut præstare culpam, le droit romain distingue deux degrés de faute, la lata et la levis culpa.

On est tenu de la première toujours et en vertu de toute sorte d'obligations; on n'est tenu de la dernière que quelquefois et en vertu de certaines obligations, surtout, mais non exclusivement, en vertu de toutes celles dont on attend soi-même un avantage.

On comprend sous le nom de lata culpa, soit le tort causé sciemment, en tant qu'il ne rentre pas dans l'idée du dol proprement dit, soit le tort causé par une simple imprudence, une simple inattention, quand elle est grossière.

Celui qui doit præstare levem seu omnem culpam est responsable des moindres méprises, des moindres inadvertances, et conséquemment n'est exempt de toute responsabilité que quand, pour l'affaire en question, il s'est comporté absolument comme un

un

bonus paterfamilias, c'est-à-dire comme homme soigneux et attentif a coutume de se conduire en pareil cas. On n'exige jamais davantage de quelqu'un, et un dommage qui arrive malgré cela est considéré comme purement accidentel.

Au reste, quelquefois, dans l'appréciation de la faute, on a égard aux habitudes individuelles de la personne, à la manière dont elle se conduit ordinairement pour ses propres affaires, et l'on ne lui impute, comme injuste, sa conduite à l'égard des autres dans le cas particulier, qu'autant qu'elle a été plus négligente pour les affaires d'autrui qu'elle n'a coutume de l'être pour les siennes propres. On n'attend et l'on n'exige alors d'elle que talem diligentiam, qualem in suis rebus adhibere solet.

Il ne faut voir qu'une forme particulière de la culpa, dans la demeure, mora, c'est-à-dire le retard injuste et imputable apporté à l'exécution d'une obligation, soit qu'il consiste en ce que, comme débiteur, on ne satisfait pas à son engagement en temps opportun, mora debitoris, ou en ce que, comme créancier, on refuse injustement de recevoir la prestation dûment offerte, mora creditoris.

Maintenant, quand on a éprouvé le dommage dont on peut exiger, d'un autre, la réparation, son évaluation, æstimatio, l'appréciation des dommages intérêts, id quod interest, se fait différemment suivant les circonstances, savoir tantôt au moyen d'une estimation émanée du juge, tantôt au moyen de

l'affirmation assermentée de la personne qui demande l'indemnité, jusjurandum seu juramentum

in litem.

$ 110.

De l'obligation de

payer

des intérêts.

Dig., lib. XXII, tit. 1, De usuris et fructibus et causis et omnibus accessionibus et mora.

Cod., lib. IV, tit 32, De usuris.

Il ne peut être question d'une véritable obligation de payer des intérêts que pour les dettes d'un capital, c'est-à-dire quand on doit une somme de res quæ numero, pondere, vel mensura consistunt. Car c'est de ce capital, sors, caput, qu'on paye les intérêts, usuræ, fænus, comme une sorte de loyer pour l'usage, usus, du capital, que le débiteur a eu pendant un certain temps, ou dont, au moins, il a privé le créancier; et ces intérêts consistent en choses de la même espèce, savoir en certaines fractions du capital, exactement déterminées à raison et du montant de ce capital, et de la durée du temps pendant lequel le créancier a été privé de son usage. Les Romains prenaient ici pour base de leur calcul la somme de 100 et le temps compris entre les calendes d'un mois et celles du mois suivant, et

c'est à cette base que se rapporte toute leur terminologie.

Quoique le droit romain ait connu et admis de très-bonne heure les intérêts, tout créancier d'un capital ne peut cependant pas, sans autre motif, exiger des intérêts de son débiteur, mais il faut toujours pour cela une cause particulière d'obligation. Cette cause particulière dépend soit de la volonté propre du débiteur, quand il s'engage valablement à payer des intérêts, soit d'une clause testamentaire qui lui impose cette obligation, soit d'une disposition générale de la loi suivant laquelle tout débiteur d'un capital doit, dans telles circonstances, être tenu de payer des intérêts. Ainsi notamment la demeure, mora, doit obliger le débiteur d'un capital à payer des intérêts moratoires, usuras moræ, mais seulement dans les bonæ fidei negotia.

Dès les premiers temps, le penchant des Romains à la cupidité, à l'avarice, fit que les riches créanciers abusèrent de l'intérêt pour opprimer de pauvres débiteurs, et cela donna lieu à diverses dispositions législatives qui restreignirent l'intérêt, et menacérent de peines particulières ceux qui violeraient ou éluderaient la défense et se rendraient ainsi coupables d'usure, usuraria pravitas. La prohibition absolue de l'intérêt ne fut que transitoire. Mais on établit les règles suivantes.

1o Le créancier ne doit pas excéder un certain taux d'intérêt fixé par la loi comme maximum. Ce

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