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le pignus proprement dit, soit dans le pignus prætorium, exiger la possession paisible de la chose pendant toute la durée de son droit, il ne peut cependant prétendre à l'usage et aux fruits de la chose engagée. Toutefois on peut, par une convention particuliere, établir une αντίχρησις.

Au contraire, par une conséquence même de la nature générale du droit de gage, tout créancier gagiste a, pour faire valoir son droit, une in rem actio, la quasi serviana ou hypothecaria actio contre tout tiers possesseur de la chose engagée, afin d'en obtenir la restitution.

Tout créancier gagiste a également le droit de vendre, en cas de besoin, la chose engagée, et de se payer de sa créance sur le prix. A la vérité, il paraît qu'originairement un tel jus vendendi seu distrahendi n'appartenait au créancier gagiste que quand il en était expressément convenu; mais, depuis le complet développement de cette institution, cette faculté de vendre paraît, au point de vue romain, tenir si profondément à l'essence même du droit de gage, qu'ellene pourrait en être séparée sans détruire l'idée qu'on s'en forme.

Le créancier ne peut vendre le gage que pour l'acquittement de la créance à laquelle il est affecté, et non pour d'autres créances qu'il aurait contre le même débiteur : il ne peut, pour ces dernières, exercer tout au plus que le droit de rétention.

"Mais, quant à la créance même pour laquelle la

convention de gage a été faite, la chose est affectée, non-seulement à la totalité de cette créance, mais à chacune de ses parties, suivant le principe: pignoris causa est individua.

Dans aucun cas, le créancier gagiste ne peut procéder à la vente de la chose engagée, avant qu'une partie, au moins, de la dette ne soit échuc. Mais peut-il alors faire la vente aussitôt? de quelle manière et dans quelle forme doit-il la faire ? Cela dépend des conventions particulières intervenues à cet égard. A défaut de toute convention sur ce point, les lois prescrivent exactement la procédure à suivre à ce sujet, et le créancier, en aliénant la chose, figure, en quelque sorte, comme procureur du débiteur. Ce n'est qu'exceptionnellement qu'on observe quelquefois la forme d'enchères judiciaires.

Dans les premiers temps, la lex commissoria, c'est-à-dire la clause ajoutée à la convention de gage, portant que, si la dette n'était pas payée à l'époque fixée, la chose engagée serait, sans autre formalité, immédiatement dévolue en toute propriété au créancier, était non-seulement permise, mais même très-ordinaire et presque de règle; mais, à cause des abus qu'elle entraînait, l'empereur Constantin la prohiba absolument. Il faut aujourd'hui procéder toujours formellement à la vente, et si, le créancier satisfait, il reste quelque chose de libre sur le prix, ce superfluum, cette hyperocha doit être restituée au débiteur.

Si, la chose mise en vente par le créancier, personne ne fait une offre acceptable, il est pourvu à ce cas par une impetratio dominii.

S 103.

Des rapports de droit des créanciers gagistes ou hypothécaires entre eux.

Dig., lib. XX, tit. 1, Qui potiores in pignore vel hypotheca habeantur.

Cod., lib. VIII, tit. 18, Qui potiores in pignore habeantur; -tit. 19, De his qui in priorum locum succedunt;-tit. 20, Si antiquior creditor pignus vendiderit.

Que la même chose puisse être engagée ou hypothéquée, en même temps, à plusieurs créanciers pour diverses créances, c'est ce qui n'a rien de contradictoire en soi.

Seulement il en résulte souvent une collision quand ces créanciers veulent faire valoir leur droit concurremment, surtout lorsque la chose engagée n'a pas assez de valeur pour que tous les créanciers soient entièrement satisfaits sur le prix.

Le droit romain résout cette difficulté en assignant à chaque créancier hypothécaire sa place déterminée dans un rang antérieur, égal ou postérieur à celui des autres, et en les admettant dans cet ordre au plein exercice de leur droit. Ce droit de prio

rité, en général, conformément à l'essence du droit de gage, en sa qualité de simple démembrement de la propriété, repose sur ce fondement très-simple que le droit hypothécaire le plus ancien, eu égard au témps où il a pris naissance, est, précisément à cause de cette antériorité de son existence, préférable à tous les droits hypothécaires nés plus tard. Prior tempore, potior jure.

Cependant cette règle fondamentale souffre une double exception.

Il y a d'abord certains droits hypothécaires qui, sans aucun égard au temps où ils ont pris naissance, passent avant tous les autres, même plus anciens, par un privilége qu'ils tiennent d'une disposition expresse de la loi.

Parmi ces hypothèques privilégiées, quelques-unes sont encore privilégiées d'une manière toute particulière, en sorte qu'en cas de concurrence avec d'autres hypothèques aussi privilégiées, une préférence incontestable leur est accordée. Elles ont toutes pour but de favoriser certaines personnes et certaines créances, et leur nombre a été augmenté jusqu'à l'excès, surtout dans la dernière période du droit romain.

Ce qu'on appelle hypothèque publique forme la seconde exception, suivant une ordonnance de l'empereur Léon. Ainsi un droit d'hypothèque dont la constitution ou l'existence, en général, peut être prouvée par un acte public, instrumentum publice

confectum, ou par un acte privé souscrit par trois hommes d'une réputation irréprochable, instrumentum quasi publice confectum, doit avoir la préférence, sans égard à sa date, sur toutes les autres hypothèques dont la constitution ou l'existence n'est pas prouvée par des actes de ce genre, mais seulement de quelque autre manière. Cette disposition légale a été dictée par la crainte d'une antidate frauduleuse, dont le danger est moindre dans le premier cas que dans le dernier.

Maintenant, quand plusieurs créanciers hypothécaires se trouvent en concurrence dans un cas particulier, le droit d'aliéner la chose hypothéquée n'est accordé d'abord qu'à celui qui a le droit d'hypothèque le plus fort, et qui prime tous les autres par quelqu'une des raisons ci-dessus indiquées, comme creditor potior, prior, antiquior, anterior,

Quand il a vendu et s'est payé sur le prix, sans

l'épuiser entièrement, celui qui le suit et qui se trouve actuellement en première ligne peut réclamer l'excédant, superfluum, et se payer à son tour là-dessus. Vient maintenant le créancier le plus proche, et ainsi de suite, jusqu'à l'épuisement du prix, et alors l'hypothèque des créanciers suivants leur devient inutile.

Au reste, si l'un des créanciers d'un rang inféricur, creditores posteriores, désire avoir le droit d'aliéner lui-même la chose hypothéquée, il peut l'obtenir en payant au créancier qui occupe le pre

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