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Une autre observation historique générale, c'est que tous les pouvoirs de famille sur des personnes libres perdirent peu à peu de leur sévérité, surtout depuis le régime impérial, et que même quelquesuns finirent par disparaître complétement. Cela est vrai absolument de la manus mariti, et au moins, jusqu'à un certain point, du mancipium, puisqu'il n'est resté de ce dernier que des traces fort insignifiantes.

Celui qui se trouvait soumis à un de ces droits ne pouvait avoir sur une autre personne, ni un droit de la même espèce, ni un droit de l'une des deux autres espèces (1).

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La même personne ne pouvait jamais être en même temps assujettie à plusieurs de ces pouvoirs à la fois.

La patria potestas et la manus mariti ne pouvaient appartenir qu'à un homme; le mancipium, au contraire, comme analogue à la dominica potestas, pouvait aussi appartenir à une femme.

Les hommes comme les femmes pouvaient être in patria potestate ou in mancipio. Au contraire, les femmes seules pouvaient se trouver non-seulement in manu mariti (cela va sans dire), mais même en général in manu.

La patria potestas et la manus mariti ne pou

(1) Cela n'est peut-être pas exact pour la manus, car il paraît qu'un fils de famille pouvait l'avoir sur sa femme.

(Note du traducteur.)

vaient jamais compéter à plusieurs personnes à la fois et en commun sur le même individu, mais bien le mancipium, à ce qu'il parait, par analogie de la puissance dominicale.

Enfin la patria potestas et la manus mariti, comme simples rapports de famille, s'éteignaient toujours à la mort de celui qui les exerçait. Au contraire, le mancipium, imitant plutôt la dominica potestas, passait comme elle aux héritiers de la personne qui en était investie.

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De la division des hommes en homines sui vel alieni

juris.

Inst., lib. I, tit. 8, De his qui sui vel alieni juris sunt.
Dig., lib. I, tit. 6, De his qui sui vel alieni juris sunt.

Cette division des hommes se rattache très-naturellement à ce qui précède immédiatement.

Effectivement, si quelqu'un n'est assujetti à aucun pouvoir de famille, à aucun jus du genre qui vient d'être indiqué, mais se trouve seulement soumis à la puissance publique de l'État, on dit qu'il est homo sui juris, suæ potestatis.

Au contraire, celui qui est dépendant de quelqu'un de ces pouvoirs privés s'appelle homo alieni juris, ou alieno juri subjectus.

Le nom général pour un homme libre, qui n'est soumis à aucun jus, est paterfamilias, materfamilias, quoique, dans une acception plus étroite, cette expression désigne particulièrement l'exemption de la patria potestas.

Par opposition, celui qui est assujetti à la patria potestas, et par conséquent alieni juris, s'appelle filiusfamilias, filiafamilias.

CHAPITRE III.

DU STATUS CIVITATIS EN PARTICULIER.

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Notion du droit de cité; manière de l'acquérir et de le perdre.

Il est dans la nature des choses que plus un État est puissant. et jaloux de sa grandeur et de son indépendance, plus d'ailleurs la constitution politique accorde à chaque citoyen une part directe au gouvernement, plus aussi s'élève la valeur l'importance du droit de cité. De là le prix qu'on attachait dans l'origine au second status, le status civitatis, dont la perte constituait la capitis diminutio media. Celui qui ne l'avait pas s'appelait pere

grinus ou hostis, et il fut, dans le fait, pendant longtemps, réputé privé de tout droit, comme un ennemi.

Les droits particuliers compris dans le droit de cité étaient les uns d'une nature politique, puisque la participation au gouvernement de l'État en dépendait, par exemple le jus suffragii et le jus honorum; les autres plutôt d'une nature privée, notamment le jus commercii et le jus connubii. Cependant ces derniers avaient aussi, surtout dans les premiers temps, un côté politique important. Le droit de cité romaine était acquis :

1° Par la naissance, quand les parents, ou au moins celui dont l'enfant suit la condition, étaient citoyens romains;

2° Par l'affranchissement sous certaines conditions;

3o Par une concession spéciale, accordée originairement par le peuple et le sénat, plus tard par l'empereur, tantôt en faveur de populations ou de villes entières, tantôt en faveur de particuliers.

Le droit de cité se perdait pour des populations entières par le retrait prononcé comme punition, pour les particuliers par la capitis diminutio media, par la renonciation volontaire, et, au moins dans les derniers temps, par suite de quelques peines.

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Degrés intermédiaires entre cives romani et peregrini.

Dans l'origine il n'y avait, à proprement parler, aucun degré intermédiaire entre les cives romani et ceux qui n'avaient pas le droit de cité; car on ne pouvait rien voir de semblable même dans la distinction de castes si tranchée entre les patriciens et les plébéiens, puisque ces derniers, quoique politiquement subordonnés, d'après la constitution de l'État, avaient cependant la plénitude du droit de cité.

Mais, après que la république, par les conquêtes, les traités et les affranchissements, comme aussi par l'extension du commerce, eut acquis peu à peu une foule de nouveaux sujets et d'alliés, qui tous aspiraient à participer à la cité romaine, il ne resta que l'alternative, ou de leur accorder à tous le droit de cité tout entier, parti auquel répugnaient la politique et l'orgueil romains, ou d'établir une gradation entre des peregrini, ceux qui n'avaient aucune participation au droit de citoyen et au jus civile qui en dépendait, mais seulement au jus gentium, et ceux auxquels on concédait une part limitée, plus ou moins grande, au jus civile, surtout aux avantages privés qu'il conférait. Tels étaient les socii, les latini

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