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voir des droits, par opposition à res, qui désigne un être qui n'est pas capable d'avoir des droits, mais qui est seulement susceptible d'être l'objet des droits.

Ce n'est pas tout homme, comme tel, qui est, au point de vue romain, capable de droit, persona, mais seulement l'homme qui a un état, status, caput, c'est-à-dire les qualités particulières qui sont la condition fondamentale de la capacité de droit.

Mais, comme la capacité de droit peut être conçue dans un degré supérieur ou inférieur, plus parfait ou plus imparfait, on peut aussi imaginer plusieurs états, status, et les Romains, en particulier, admettaient trois états, qui sont l'un à l'autre dans un rapport tel, que l'état d'un degré supérieur suppose essentiellement l'existence de celui qui est au-dessous, tandis que celui-ci peut être conçu sans l'autre. d'un état, status, qu'on avait, s'appelle capitis deminutio, ou minutio.

La perte

Le status libertatis, dont la perte constituait la capitis deminutio maxima, consistait en ce qu'on était liber homo et non servus. Celui qui n'avait pas même ce status n'était pas persona (1),

(1) Ceci ne me semble pas exact : un esclave était sans doute, sous un rapport, considéré comme une chose, puisqu'il comptait dans les biens de son maitre, et qu'il pouvait être aliéné ainsi qu'un cheval, un bœuf; mais il était, sous un autre rapport, regardé comme une personne, car il pouvait jouer un rôle, être valablement partie dans un negotium juris, contracter, être nommé légataire, héritier : quoique le profit fût pour son maître, c'était bien l'esclave qui était la personne contractante, légataire, etc. (Note du traducteur.)

mais seulement res, et n'était capable d'aucun droit.

Le status civitatis, dont la perte, salva libertate, constitue la capitis deminutio media, consistait en ce qu'un homme libre était en même temps civis romanus. De cette qualité dépendait, non pas absolument toute capacité de droit, puisque le peregrinus était capable, au moins, du jus gentium, mais la capacité de participer au jus civile.

Enfin le status familiæ consistait en ce que le citoyen appartenait aussi à une familia particulière, et était ainsi capable de certains droits auxquels les membres de cette famille pouvaient seuls prendre part. Celui qui changeait ce status familiæ, en cessant d'appartenir à cette famille, subissait une capitis deminutio minima.

Comme, du reste, la prétention à un état est au nombre de ces droits que, d'après leur nature, on peut faire valoir contre tout le monde, les Romains accordent aussi, à ce sujet, des actiones in rem, qui ont pour but la reconnaissance du status, et qui, précisément à cause du caractère préjudiciel du status lui-même, forment des actiones præjudiciales.

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Des hommes considérés simplement comme tels. Dig., lib. I, tit. 5, De statu hominum.

Quoique, au point de vue du droit romain, la

qualité d'homme (homo) n'attribue pas par ellemême nécessairement le caractère de la personnalité et de la capacité de droit, cependant cette qualité est importante en droit, parce que les hommes seuls, et seulement pendant qu'ils existent, peuvent avoir et conserver un état, status.

Est considéré comme homme tout individu né d'un être humain, avec un développement suffisant, et vivant, en tant qu'il n'est pas un monstre, mons

trum.

Mais, même en supposant l'existence de cette dernière condition, la qualité d'homme, avec la plénitude de ses effets juridiques, ne commence qu'au moment de la naissance accomplie. L'embryon, le fœtus dans le sein de sa mère, l'enfant à naître, nasciturus, n'est point encore considéré juridiquement comme un homme en soi, homo, mais seulement comme une partie de la mère, pars viscerum matris. Cependant on prend provisoirement en considération son existence future probable, et l'on pourvoit d'avance à ses intérêts par la maxime: nasciturus habetur pro jamnato, quotiens de commodis ipsius quæritur.

Du moment de la mort, l'homme cesse d'exister comme tel.

Les hommes peuvent, indépendamment de leur état, status, différer beaucoup entre eux d'après leurs qualités naturelles ou sociales (ce qu'on appelle status naturales), c'est-à-dire, suivant leur âge,

leur sexe, leur santé, leur considération ou leur honneur, etc. Mais il paraît plus convenable au but de ce cours de ne noter ces différences qu'à l'occasion des rapports de droit sur lesquels elles influent ou dont elles dérivent.

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Des personnes juridiques.

L'idée d'une personne, persona, se présente de la manière la plus simple dans l'unité naturelle d'un simple individu humain capable de droit. Une personne pareille, la seule dont il ait été question jusqu'ici, est nommée ordinairement personne physique ou naturelle.

Mais on arrive facilement de là à l'idée de ce qu'on appelle une personne juridique, morale, ou civile, qui ne consiste pas dans un seul individu humain, mais dans plusieurs hommes qui sont unis par un lien juridique, de manière à former une unité revêtue du caractère de la capacité de droit et de la personnalité. Cette idée de personne juridique s'offre déjà à nous dans l'idée générale que nous nous faisons de l'État; mais on peut la suivre encore dans beaucoup de rapports moins étendus, moins élevés, tant de droit public que de droit privé. Il y a de commun entre ces divers cas, 1° qu'un certain nombre d'hommes qui existent les uns avec les

autres en même temps, ou les uns après les autres en différents temps, sont conçus comme formant une unité, une personne; 2° qu'ils sont ainsi conçus en vue d'un but juridique, de droit public ou privé; 3o que l'État, comme la grande unité collective, la grande universalité, veut qu'on reconnaisse les universalités subordonnées avec le caractère de la personnalité. Nous trouvons des exemples dans les nombreuses corporations, communautés, de droit public et de droit privé, universitates, corpora; puis dans le prince, comme représentant de la puissance de l'État; dans les fonctionnaires publics, comme représentants du pouvoir de leur charge, dans le défunt et l'héritier considérés comme une seule personne en conséquence du principe que le premier est représenté et continué par le dernier, etc.

C'est par suite d'une simple habitude de langage, qui, du reste, n'est pas sans justesse, que quelquefois, dans nos textes, on désigne comme la personne investie du droit, certaine chose, certain bien, notamment un immeuble, par exemple dans l'expression servitus quæ prædio debetur. Si la chose est ici nommée directement comme le sujet du droit, l'explication en est que, dans ce cas, par des raisons particulières, l'acquisition et la conservation d'un droit sont attachées à l'existence et à la durée de cette chose, et que l'exercice de ce droit se mesure sur les besoins de cette même chose. Mais ce qui démontre que ce n'est pas aux choses, mais bien,

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