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PRÉFACE.

EN traduisant les œuvres d'Horace je ne pensais pas plus à faire un livre que lui-même lorsqu'il les composa. Comme lui, je me laissais entraîner par l'inspiration du moment, par le charme et la variété des sujets; et, à force de choisir, je me trouvai avoir tout traduit.

Lorsque j'entrepris cet ouvrage, je n'avais pas même un Horace à ma disposition. Je le commençai de mémoire; et ce travail me fit éprouver que dans les circonstances les plus pénibles de la vie il est un noble emploi du temps qui rend à l'homme tout ce qui lui appartient de bonheur et de dignité.

Cette traduction était terminée depuis assez long-temps quand elle parut pour la première fois. Il eût été messéant au traducteur d'Horace de violer l'un des plus sages préceptes de cet auteur. Les éditions qui ont suivi font la critique de la première. Celle-ci, quoiqu'elle contienne un assez grand nombre de changemens, en réclamait certainement bien davantage. Nos goûts changent; et, après une révolution de quelques

OEUVRES

COMPLÈTES

D'HORACE.

TOME PREMIER.

Petit livret, qui n'es mien qu'à demi,
Te dois-je mettre en vue? Pourquoi non?
De quoi crains-tu l'envieux ennemi,
Lequel ne peut rabaissér ton renom?
C'est le vrai point, si les hommes de nom
Ne sont de toi et de moi malcontens.
Au fort je n'ai du tout perdu mon tems;
Car je suis sûr que ceux qui te liront,
Posé qu'en toi ne prengnent passetems,
A tout le moins profit y sentiront.

Et voici comme il répondait à ceux qui lui portaient envie :

Je leur permoy dire qu'en translatant
Y a grand'peine, et de l'honneur pas tant;
Car du profit je suis, sans en mentir,
Jusques ici encore à m'en sentir.

Le plus souvent la regle et loi du metre
Nous rend contraints d'ajouter ou d'omettre;
Ou, en voulant suivre fidelement
L'original, il nous prend tellement,
Qu'il faut user d'une grand' périphrase,
Qui veut sauver du vulgaire la phrase.
Voilà des points assez avantageux
Pour refroidir un homme courageux.

Cette traduction de Jacques Pelletier eut assez de succès pour empêcher CHARLES FONTAINE, l'un des plus infatigables traducteurs de son temps, de publier la traduction libre paraphrasée qu'il avait faite en vers français du même ouvrage.

FRANÇOIS HABERT, poëte du roi Henri II, et qui

se surnommait le Banni de Liesse, publia, en 1549 et 1551, «<les Sermons satiriques du sen<< tencieux poëte Horace, interprétés en rimes françaises, avec aucunes épîtres dudit Horace, « la vie ode du livre Ier, etc. »

tr

Si on pouvait juger d'un ouvrage par l'opinion de celui à qui il est dédié, on en croirait le seigneur de Quantilly, notaire et secrétaire du roi, qui écrivait:

Voy ces sermons, et note bien la grace
Qu'en traduisant a heu le traducteur;
Car il a fait ressusciter Horace,

Pour en français faire parler l'auteur.

Le premier traducteur des odes fut JACQUES MONDOT, bénédictin, qui publia sa traduction en 1579, non pour trancher du brave, disait-il, mais pour espier si son travail serait agréable au public. Son succès fut assez grand pour le déterminer à traduire les autres ouvrages d'Horace; mais il ne paraît pas qu'il les ait fait imprimer.

Ce fut en 1583 qu'on eut pour la première fois une traduction complète d'Horace, ou, pour mieux dire, une collection; car celle-ci n'est pas toute de la même main. LUC DE LAPORTE, qui la publia, se félicitait beaucoup de cette idée. Ce recueil contient les cinq livres d'odes, traduits par Luc de Laporte; les satires, traduites par François Habert, et paraphrasées ensuite par le même; les épîtres, traduites par un in

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