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Toutes les deux sont comprises sous la dénomination générique d'actions criminelles, parce qu'elles ont pour cause un fait punissable suivant la loi criminelle.

L'application de la peine prononcée par la vindicte publique est le but de la première, les dommages-intérêts dus à la partie lésée sont le but de la seconde.

466. L'action publique est censée formée à par tir d'une plainte, d'une dénonciation ou de tout autre acte par lequel ou en vertu duquel un officier de police judiciaire aurait commencé des poursuites; remarque importante, à l'effet de fixer le jour où commence la prescription des affaires criminelles (arrêt de cassation inséré au Bulletin officiel pour l'année 1812, n° 8, page 333).

467. Cette action s'éteint par le décès de l'inculpé, et ne peut être exercée contre ses héritiers; mais il en est autrement de l'action civile en dommages (Code d'instr. crim., art. 2) (a).

468. L'action publique ne peut être exercée devant les juges civils; mais l'action privée, ou civile, peut l'être devant les juges criminels en même temps que la première (Code d'instr., art. 3) (b).

(a) Mais la mort d'un coupable n'éteint pas l'action publique à l'égard des complices du même fait (arrêt de la cour de cassation du 21 avril. 1815), parce que ce n'est pas le crime qui est éteint; et que la règle rappelée ici par le professeur n'est que l'application de ce grand principe de notre droit, que les fautes sont personnelles.

(b) C'est la conséquence de la différence des deux actions. Mais pour que le juge criminel se trouve saisi compétemment d'une demande en dom. mages-intérêts, il faut qu'il soit encore à même de juger la question de la

469. La partie qui s'est pourvue en réparation de dommages devant les juges civils ne peut abandonner ses poursuites pour se pourvoir au criminel; c'est un principe consacré dans tous les temps par la jurisprudence, que s'il s'agit d'intérêts privés, la voie ordinaire ouverte pour les actions civiles doit être préférée (a).

470. La seule exception qui soit admise à ce principe est établie par l'article 250 du Code de procédure civile, relativement aux poursuites en faux incident civil; mais il faut que l'objet de l'action civile soumise au juge civil soit identiquement le même que celui de l'action que l'on porterait ensuite devant les juges criminels (arrêt du 3 floréal an 10 et Nouveau Répertoire (v° plainte) (b).

471. Lorsque l'action civile est poursuivie séparément de l'action publique, l'exercice de la première doit être suspendu jusqu'au jugement à intervenir sur la seconde (C. I. C., art. 3); mais il

criminalité de l'action; car s'il n'avait plus rien à décider à cet égard, soit parce que l'infraction serait prescrite, soit parce qu'il aurait prononcé antérieurement sur le fait, et aurait ainsi épuisé sa juridiction, soit parce que le prévenu serait mort pendant l'instruction, alors il ne serait plus compétent pour juger l'action civile dont la connaissance appartiendrait exclusivement aux tribunaux civils.

(a) Le principe est que, une fois qu'une partie lésée a saisi la voie civile ou la voie criminelle, elle ne peut plus varier: electa una via, non datur recursus ad alteram (arrêts de la cour de cassation des 3 floréal an 10 et 18 messidor an 12. - BOURGUIGNON, Jurisprudence des Codes criminels, tome 1, page 49; LEGRAVEREND (3e édition), tome 1, page 69).

(b) Voir, sur cette question, la dissertation du savant M. TOULLIER, tome 9 (chapitre 6, section 3), page 249.

existe deux exceptions à cette règle, d'après les art. 235 et 327 du Code civil (a).

A son tour, l'action publique peut être suspendue en certains cas par l'exercice de l'action civile : c'est ce qui arrive lorsque l'inculpé excipe, par exemple, de la possession ou de la propriété d'une chose qui serait l'objet d'une plainte en vol (b).

472. Le jugement rendu au criminel ne détermine point nécessairement la décision à rendre au civil (c).

473. La renonciation à l'action civile ne peut arrêter ou suspendre l'action publique (C. I. C., art. 4), puisqu'il s'agit d'intérêts essentiellement distincts (d).

(a) Il ne suffirait pas qu'on eût déposé une plainte ou une dénonciation entre les mains de l'officier de police judiciaire, pour que l'action civile intentée séparément fût suspendue; il faudrait encore que cette plainte eût été suivie d'un acte de poursuite de la part du ministère public: alors seulement s'élève l'espèce de conflit résultant de la poursuite simultanée des deux actions; c'est ce que décide l'arrêt du 18 novembre 1812 rappelé par le professeur au no 462 de ce Cours, et telle est aussi l'opinion des auteurs.

(b) Cependant, depuis plusieurs années, la jurisprudence semblerait dévier de ce principe en permettant aux tribunaux de répression de juger la question préjudicielle, telle que celle de savoir si le dépôt a ou n'a pas existé, dans un délit de violation de dépôt ; au lieu de renvoyer devant les tribunaux civils pour la constatation du dépôt, pourvu qu'on suive les règles tracées par le Code civil (voir arrêt de la cour de cassation du 6 décembre 1826). Mais cette jurisprudence ne saurait être admise dans les écoles de droit; elle tend à une confusion de principes qu'une plus grande célérité dans l'administration de la justice ne saurait compenser.

(c) Ainsi, de ce que le jury aura déclaré que tel homme n'était pas coupable d'avoir commis un faux, on ne pourra, au civil, se faire une fin de non-recevoir de cette décision, contre l'inscription en faux, relativement à la pièce arguée de faux.

(d) C'est l'application de ce principe fondamental: Privatorum conventio jüri publico non derogat:

474. Cette dernière action peut s'exercer même contre un étranger; c'est une conséquence de l'article 3 du Code civil (a).

475. Le Français qui a cómmis hors de France soit un crime attentatoire à la sûreté ou au crédit de l'Etat, soit un crime contre un de ses compatriotes, peut être poursuivi en France lorsqu'il y est de retour volontairement ou par l'effet de l'extradition (C. I. C., art. 5 et 7): il en est de même des étrangers complices de crimes attentatoires à la. sûreté ou au crédit de l'Etat (art. 6) (b).

(a) Mais si le délit était commis par un étranger sur un autre étranger; sur un vaisseau mouillé en France, ou même à terre, entre gens appartenant au même équipage, ces étrangers ne seraient justiciables des tribunaux français qu'autant que le délit aurait porté préjudice à un Français: autrement, ils devraient être renvoyés devant leurs tribunaux. (Avis du conseil d'état du 28 octobre 1806.)

(b) On retrouve des dispositions semblables dans la plupart des législations étrangères; elles sont fondées sur des motifs de sûreté publique faciles à apprécier.

TITRE III.

DE LA POLICE ET DES OFFICIERS QUI L'exercent.

476. Dans le sens que le Code d'instruction criminelle attribue au mot police, ce mot désigne l'autorité chargée d'employer dans chaque lieu et dans chaque partie de l'administration générale les moyens prescrits ou autorisés par la loi et les réglemens à fin de prévenir toute atteinte soit à la sûreté du corps social et de chacun de ses membres, soit aux propriétés publiques ou privées. Cette autorité a, en outre, pour objet de mettre la justice criminelle en état de punir les auteurs des infractions qui auraient été commises.

477. De ce double objet de l'institution de la police résulte sa distinction en police administrative et police judiciaire.

478. La police administrative est l'autorité chargée de prévenir les infractions, et de prendre dans cette vue les différentes mesures qui peuvent éloigner les occasions et les motifs de les commettre. Les dispositions qui concernent la police administrative sont étrangères à l'objet de ce Cours.

479. La police judiciaire est l'autorité instituée pour rechercher les infractions que la surveillance de la police administrative n'a pu empêcher; elle ne prononce sur aucune, mais elle les constate

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