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1. La décision du maître des monnaies sur la valeur nominale de quelque espèce de monnaie que ce soit, est publiée quelquefois sous forme de loi, mais souvent aussi sous une tout autre forme, par exemple, par une simple indication sur les monnaies (§ 41). Dans ce dernier cas, le motif présenté plus haut n'a pas même une apparence de fondement.

2. Dans les autres cas il faut sans doute reconnaître que cette apparence existe. Toutefois une loi qui prononce sur la valeur nominale n'a pas nécessairement ce sens qu'elle enchaîne la volonté des habitants et fixe la décision des juges. La preuve que ce sens ne doit pas nécessairement, ni par conséquent être donné géDéralement à la loi, ressort de cette circonstance que parmi les lois qui se prononcent sur la valeur nominale d'une espèce de monnaie, plusieurs disent expressément que les habitants et les juges doivent s'y conformer (nous allons en parler plus explicitement), tandis que d'autres expriment le contraire (§ 41, a), en sorte que des lois de ce genre sont également susceptibles de deux interprétations tout à fait opposées. Quand donc une loi qui prononce sur la valeur nominale laisse ce point dans l'indétermination, nous ne sommes pas autorisés à l'interpréter en ce sens que le juge serait par là enchaîné; car nous introduirions arbitrairement dans la loi une prescription d'une nature toute positive.

3. D'un autre côté, on ne peut pas nier qu'il ne soit possible de publier des lois qui contiennent des dispositions aussi rigoureuses, et même qu'on n'en ait publié très-souvent. Le but d'une prescription de ce genre et l'action qu'elle exerce s'appellent le cours forcé m de la monnaie. Là où il existe une loi de cette nature, il est hors de doute que le juge est obligé de l'appliquer, toute disposition légale devant être exécutée sans restriction, alors même que le juge devrait la considérer comme blamable, rigoureuse et inique.

Quelques exemples, empruntés à la réalité des faits, indiqueront plus clairement ce que signifie le cours forcé; il est à propos de faire remarquer d'abord qu'il ne se présente pas souvent et n'offre pas une importance particulière quand il s'agit de la monnaie de métal, au lieu que, pour le papier-monnaie, la possibilité d'en faire l'application avec ses dangereux résultats, ne souffre pas de limites.

On a établi le cours forcé dans des proportions trèsétendues à propos des assignats et des mandats français, et on n'a pas reculé devant l'emploi des moyens les plus violents pour faire exécuter cette mesure (§ 41). A la suite de la dernière révolution, on a rétabli, en mars 1848, le cours forcé pour les billets de banque1 (d);

(d) Les codes Français par Tripier. Paris, 1851, p. 1410 1. 1 En français dans l'original.

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toutefois cette mesure a été rapportée en août 1850.

Comme en Prusse, à la suite des désastres de la guerre de 1806, le papier-monnaie était tombé au-dessous de la valeur nominale, la législation varia plusieurs fois sur le cours forcé. En l'année 1813, il a été définitivement abrogé, et, depuis cette époque, la législation n'a plus varié (e).

En Autriche, à côté des réductions légales et réitérées du papier-monnaie, le cours forcé a éprouvé plusieurs espèces de modifications. Par la Finanzpatent du 1er juin 1816 (§ 1, 16), il était dit qu'on ne créerait plus jamais de papier-monnaie avec cours forcé, et en particulier que les banknotes nouvelles qu'on émettait alors ne devraient pas avoir cours forcé. Mais c'étaient précisément ces banknotes qu'on munissait du cours forcé en l'année 1848, d'abord en vertu d'une simple décision ministérielle, puis en vertu d'une patente impériale qui confirmait cette première décision (e1). Ainsi ce cours subsiste encore aujourd'hui pour ce papier-monnaie émis tout récemment, et il subsiste avec des effets si énergiques que l'Etat lui-même, au grand détriment de ses créanciers, paie en papier-monnaie, d'après la valeur nominale, les intérêts de ces dettes

(e) V. plus bas § 46, t, u.

(e) K. Franz Gesetze (Lois de l'empereur François) de 1812 à

1817. Vienne, 1819, p. 359. N o back, p. 1402, 1477, 1879.

publiques, dont la dénomination usuelle semble exclure l'emploi de toute autre monnaie que la monnaie de métal (les métalliques') et dont les titres promettent en termes exprès de la monnaie conventionnelle.

Il n'est pas possible de confondre avec les lois que nous venons de citer, et qui interviennent arbitrairement dans le système monétaire, maintes autres lois, qui ont effectivement une tout autre signification. Ainsi le Landrecht (droit national) prussien décide que les sommes dont on parle dans les conventions, doivent s'entendre de la monnaie d'argent qui a cours (f). Cette loi renferme une simple interprétation de conventions, et non pas une règle qui contraindrait la volonté des parties; c'est ce qui résulte très-clairement de cette circonstance, qu'à côté de ces conventions on en tolère d'autres qui s'en écartent, et qu'on déclare très-valables (g). Il en est de même de certaines lois sur le changement du titre de la monnaie, dont nous parlerons plus bas avec plus de détails (note m).

4. L'examen auquel nous venons de nous livrer et les éclaircissements plus détaillés que nous avons donnés sur les lois qui établissent le cours forcé, nous

(f) A. L. R. (D. n. g.), I, 11, § 779, 1, 5, § 258, I, 16, § 76. (9) A. L. R. (D. n. g.), I, 11,

• En français dans l'original.

§ 778, I, 12, § 450, 451, I, 5, § 257, I, 16, § 74.

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permettent de préciser davantage et en même temps de restreindre davantage aussi la question que nous discutons en ce moment, et qui est de savoir si on doit prendre la valeur nominale comme le montant véritable d'une dette d'argent. La question est d'abord de savoir si on doit conseiller au législateur de traiter la valeur nominale comme il le fait, en prescrivant le cours forcé. Puis à cette première question s'en rattache une seconde, beaucoup plus importante en pratique, qui consiste à se demander si, en l'absence d'une loi sur le cours forcé, la nature seule de la monnaie doit faire considérer la valeur nominale comme l'objet véritable d'une dette d'argent. Si le juge devait se guider d'après cette idée, le résultat pratique serait, en définitive, absolument le même que dans le cas où il existe un cours forcé légal.

a

Ces deux questions doivent péremptoirement recevoir une solution négative, parce que la valeur nominale ne constitue pas le véritable objet d'une dette d'argent. La preuve complète de cette assertion ne peut, d'ailleurs, être donnée que plus loin, quand nous examinerons la valeur courante. Mais ici on peut déjà faire valoir deux motifs capitaux, qui feraient hésiter beaucoup à traiter la valeur nominale comme l'objet des dettes d'argent, et surtout à lui attribuer légalement un cours forcé.

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