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par stipulation, mais bien sans formalité aucune. Dans ce cas donc, il est tout à fait incontestable que la différence romaine entre la stipulation et le simple pacte est proclamée par tous les tribunaux comme n'existant plus chez nous. Mais il est impossible d'accorder à ce cas complétement isolé la puissance de représenter valablement et entièrement toutes les conventions, et de l'ériger en preuve irrécusable d'un droit coutumier allemand général, contraire au système de conventions romain.

Toutefois, cette assertion qu'il existe un semblable droit coutumier contient un élément de vérité; nous allons immédiatement le faire valoir et le réduire à sa juste mesure.

$ 77.

I. CONTRAT D. Effts réguliers. DROIT ACTUEL (suite).

Si donc le droit romain sur les conventions n'a été privé de sa force ni par les lois romaines plus récentes, ni par le droit canon, ni par la coutume allemande générale, dans le sens propre et véritable de ce mot, comment convient-il d'expliquer et de justifier le fait que ce système n'est plus en vigueur dans notre droit

T. II.

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actuel, alors que le droit romain, dans son ensemble, est proclamé être la base de notre droit? La réponse à cette question ressortira des considérations suivantes (a).

Il ne saurait exister aucun droit positif, comme base des affaires usuelles, sans quelque forme qui puisse s'ajouter à toute convention quelle qu'elle soit, abstraction faite de sa teneur particulière, et la rendre productive d'action. C'est une pareille forme que le droit romain avait consacrée dans la stipulation, et comme nous avons, en Allemagne, adopté le droit romain dans son ensemble, et que la stipulation en est une partie capitale et essentielle, nous devons donc, d'après les dispositions des sources écrites, admettre la stipulation.

Mais le droit de la stipulation, c'est-à-dire son efficacité exclusive proprement dite, est soumis au fait de la stipulation, c'est-à-dire à son exercice réel, fondé sur la prédominance d'une coutume nationale, comme nous le voyons en effet chez les Romains. Une semblable coutume nationale n'existait certainement pas en Allemagne, à l'époque où le droit romain y fut introduit, ni auparavant, ni depuis; par suite le droit de la stipulation ne pouvait trouver

(a) S'accordent, quant aux points essentiels, avec le point de vue ici exposé: Eichhorn, Deutsches Recht (Droit alle

mand), § 92; Puchta, Pandekten, § 230, et Vorlesungen (Cours publics), § 250.

d'application en Allemagne. Pour tourner la difficulté, c'est-à-dire pour que, de ce côté, le droit romain écrit reçût une complète application, il eût pu venir à la pensée d'un législateur allemand d'introduire la stipulation par une loi et d'en faire la condition des conventions productrices d'action, conformément au droit romain. Cette tentative était-elle désirable? La loi eût-elle développé une coutume nationale en harmonie avec ses prescriptions? On peut en douter; car il eût été possible qu'elle demeurât à l'état de lettre-morte. Mais cette question est sans aucun intérêt, puisqu'il est incontestable que jamais pareille tentative n'a été faite.

L'état de droit qui s'ensuivit doit être ainsi entendu. Nous conservâmes le principe de la stipulation productive d'action, sans sa forme propre, la demande et la réponse verbale. L'abandon de cette forme, qui s'est introduit de lui-même, a donc insensiblement converti la stipulation, entre nos mains, en un simple pacte, et nous sommes ainsi arrivés, par une nécessité irrésistible, et sans le fait du législateur, au principe: toute convention sans formalité est productive d'action. La stipulation était dès lors assimilée aux contrats consensuels et au nudum pactum (b).

(b) Un trait d'une analogie frappante se retrouve dans l'établis

sement des servitudes. Il avait lieu régulièrement, dans l'ancien

Il y a une autre et plus courte expression du même point de vue; elle a déjà été présentée plus haut (c). La nécessité de la stipulation en règle générale, comme condition d'une action, et le refus de cette même action en cas de simple pacte, forment un tout indivisible, et aussitôt que nous en retranchons la forme positive de la stipulation, la convention non solennelle devient d'elle-même productrice d'action.

C'est dans cette idée qu'il convient de reconnaître l'élément de vérité déjà signalé plus haut (à la fin du $76), dans l'admission d'un droit coutumier allemand. On peut désigner cette coutume comme purement négative, et consistant exclusivement en ce que la forme de la stipulation ne subsiste plus dans la pratique allemande. A cette absence de forme se rattachent d'elles-mêmes toutes les conséquences juridiques indiquées.

droit,par l'in jure cessio. Ga i us, Lib. 2, 29, 30. Ulpianus, tit. 19, § 11. Dans le droit dé Justinien, l'in jure cessio était devenue impossible, puisque les conditions de cette opération, qui se rattachaient soit à la constitution de la judicature, soit à la procédure ancienne, avaient disparu. C'est pourquoi on vit s'introduire de soi-même, sans l'intervention du législateur, à la place de l'in jure cessio, l'abstraction de cette opération, dépouillée désormais de sa forme positive et symbolique; cette abstraction était la

simple convention qu'on pouvait conclure à son gré et sans formalités dans le même but, ou en y ajoutant à volonté la forme de la stipulation. § 4 J. de serv. (2, 3), Si J. de usufr. (2, 4). « pactionibus et stipulationibus id efficere debet. » Ce changement important s'est accompli tacitement pour les servitudes dans leur passage de l'ancien droit aux derniers temps de l'empire; pour le système des conventions, dans leur passage du droit romain au droit allemand.

(c) Au commencement du § 76.

Le résultat pratique de la théorie que nous venons d'exposer, c'est que, dans notre droit commun actuel, le simple pacte a pris la place de la stipulation romaine, et qu'il faut appliquer à la forme de la convention productrice d'action les mêmes règles que le droit romain avait posées pour la forme des contrats consensuels et des nuda pacta (d). Nous sommes privés par là de l'avantage que les Romains trouvaient dans la forme de la stipulation pour distinguer plus sûrement la convention parfaite des simples préparatifs et acheminements vers cet état (§ 74), et nous abandonnons exclusivement au juge le soin de faire cette distinction dans chaque cas particulier. Nous sommes également privés de l'influence heureuse que la forme solennelle de la stipulation pouvait exercer, en inspirant aux parties des réflexions sérieuses, et nous leur laissons le soin de se préserver elles-mêmes de tout dommage, en n'agissant qu'avee une prudente circonspection.

A ne présenter que d'un seul côté la théorie que nous venons d'exposer, on risquerait d'induire le lecteur en erreur, et de lui faire croire que, dans notre droit actuel, les formes particulières et positives de conventions ne sauraient exercer aucune influence, tandis

(d) § 1, 2 J. de consensu obl. (3, 22), L. 1 § 2 de contr. emt.

(18, 1).
14).

L. 2 pr. de pactis (2,

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