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Si du reste on suit partout la règle que l'interprétation doit tourner contre l'auteur d'une disposition équivoque, il ressort des principes posés que cette règle ne s'applique qu'à l'interprétation des contrats. C'est seulement dans ceux-ci, en effet, que l'auteur représente la situation des deux parties, et encourt la responsabilité citée plus haut. Par suite, les manifestations de volonté unilatérales doivent au contraire s'interpréter à l'avantage de l'auteur. C'est ce qui a lieu notamment quant à la formule d'action (l'intentio), qui doit être interprétée à l'avantage du demandeur, c'est-à-dire de l'auteur de l'acte (aa).

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I. CONTRAT. D. EFFETS.

EFFETS RÉGULIERS.

Il nous faut tout d'abord fixer l'effet normal ou régulier d'un contrat, puis citer les dérogations possibles des deux parts à cette situation régulière, qui peuvent résulter d'influences extrinsèques au contrat. Celles-ci

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aboutissent tantôt à renforcer le contrat, tantôt à l'affaiblir.

L'effet normal du contrat a pour base le contraste déjà signalé plus haut entre les obligations pourvues et celles dépourvues d'action. C'est précisément en ce qui touche les contrats, que ce contraste trouve sa plus importante et sa plus complète application, puisque les contrats donnent naissance tantôt à une civilis, tantôt seulement à une naturalis obligatio (a). Ce contraste se rattache du reste à cette autre division des conventions, également signalée plus haut, en legitimæ et juris gentium conventiones (a').

L'essence de cette théorie, perfectionnée entre les mains des jurisconsultes romains, et maintenue, quant à ses points fondamentaux, jusque dans la législation de Justinien, se résume dans les principes suivants (b).

Les legitimæ conventiones, dont l'essence propre a une origine purement civile, et, par suite, inconnue au jus gentium, peuvent, d'après leur nature, être considérées comme présentant l'efficacité la plus grande que

(a) Droit des obligations, t. 1, § 7.

(a ) V. plus haut, § 52. Il est juste de faire remarquer, sur ce point, que cette division des contrats se rapporte à leur origine, et à l'essence intime qui s'y rattache c'est en ce sens que la stipulation doit être forcément appelée une legitima

conventio; dans un autre sens, notamment sous le rapport de la capacité personnelle qui permet d'y participer valablement, elle est de bonne heure devenue, au moins en grande partie, juris gentium (§ 52 d 1).

(6) Cf. Puchta, Pandekten, § 250, et Vorlesungen (Cours publics), § 250.

soit susceptible de produire le jus civile, c'est-à-dire comme des conventions munies d'actions, des sources d'une civilis obligatio.

Toutes ces conventions portent en elles-mêmes un signe particulier, qui sert à les faire reconnaître de suite, et distinguer des autres conventions. Leur essence propre ne consiste pas, en effet, comme celle d'autres conventions isolées, dans telle disposition, tel but particulier, mais dans une forme spéciale de manifestation de volonté, compatible avec les résultats les plus divers, et pouvant donner à toute disposition, arbitrairement choisie, la plus complète efficacité (l'action). La nature de ces conventions ne saurait donc être mieux désignée que par l'expression de conventions solennelles, par opposition aux conventions n o n solennelles, dont la nature propre et l'efficacité n'a point son principe dans la forme (mais dans la disposition particulière de l'acte) (c).

La forme dont nous parlons se rattachait aux coutumes et aux tendances nationales généralement connues; elle ne s'appuyait donc pas sur les dispositions arbitraires de telle ou telle loi positive, qui n'eût pas suffi à prévenir les abus possibles (d). En conséquence,

(c) V. plus haut, § 52 q, et Système, t. 3, § 130.

(d) Ces dispositions se rencontrent très-fréquemment dans la

législation actuelle de quelquesunes de nos provinces. Mais elles n'etaient pas même étrangères au droit romain. Dans cette classe

c'était une conception populaire et commune à tout Romain, qui se trouvait engagé dans des transactions pécuniaires; ce n'était pas simplement une conception de la jurisprudence.

Mais de même que la volonté peut s'exprimer tantôt oralement, tantôt par écrit, de même ces sortes de conventions se présentaient sous une double forme: comme verborum obligatio, et comme literarum obligatio.

Les juris gentium conventiones ont une autre nature que les legitimæ conventiones. Il est vrai que la complète efficacité ( la faculté de produire une action ) est également compatible avec les premières. Mais cette efficacité n'existe pas par elle-même pour ces conventions; elle doit leur venir d'un principe extérieur ; et ce principe extérieur qui a besoin de s'ajouter à elles, et qui les renforce, s'appelle leur causa.

Je me suis exactement rattaché, dans l'exposition de cette théorie, à l'ordre d'idées d'Ulpien (e), dont je cite ici même les expressions décisives:

rentre, par exemple, l'insinuation nécessaire des donations dont la valeur ne dépassait pas 500 solidi. L. 36 C. de don. (8, 54). De même la transaction sur des aliments accordés par acte de dernière volonté, qui ne pouvait être conclue qu'avec l'approbation du préteur. L. 8 de transact. (2, 15). La différence intime entre ces deux

sortes de formes positives de contrats est très-justement relevée par Puchta, loc. cit.

(e) L. 7 pr. § 1, 2, 4 de pactis (2, 14). Les textes parallèles qui suivent, servent à expliquer et à confirmer ce point. L. 45 eod. «Divisionis placitum.... ad actionem, ut nudum pactum, nulli prodesse poterit. » L. 15 de

Pr. « Juris gentium conventiones quædam actiones pariunt, quædam exceptiones.>>

§1. « Quæ pariunt actiones, in suo nomine non stant, sed transeunt in proprium nomen contractus, ut emtio venditio.»>

§2. « Sed et si in alium contractum res non transeat, subsit tamen causa, eleganter Aristo Celso respondit, esse obligationem....

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§ 4. Sed cum nulla subest causa præter (f) conventionem, hic constat non posse constitui obligationem. Igitur nuda pactio obligationem non parit, sed parit exceptionem.»

Suivant la terminologie des textes que je viens de citer, j'admets deux classes de juris gentium conventiones les contractus, qui sont munis'd'action, et les pacta (nuda pacta), qui n'engendrent pas de droit d'action, mais une simple exception. Je me réserve cependant d'établir plus exactement cette terminologie. Si nous partons de ce point de vue, la division indiquée, et la terminologie qui s'y adapte, ne touchent en rien

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