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maladie contagieuse, est une source de tentations à son ame. Jésus-Christ nous apprend à mettre toute notre vertu dans la crainte et dans la défiance de nous-mêmes. Voudriez-vous, pourra-t-on dire à une fille, hasarder votre ame et celle de votre prochain pour une folle vanité? Ayez donc horreur des nudités de gorge et de toutes les autres immodesties: quand même on commettroit ces fautes sans aucune mauvaise passion, du moins c'est une vanité, c'est un desir effréné de plaire. Cette vanité justifie-t-elle de vant Dieu et devant les hommes une conduite si téméraire, si scandaleuse et si contagieuse pour autrui? Cet aveugle desir de plaire convient-il à une ame chrétienne, qui doit regarder comme une idolâtrie tout ce qui détourne de l'amour du Créateur et du mépris des créatures? Mais quand on cherche à plaire, que prétend-on ? N'est-ce pas d'exciter les passions des hommes? Les tient-on dans ses mains `pour les arrêter? Si elles vont trop loin, ne doit-on pas s'en imputer toutes les suites? Et ne vont-elles pas toujours trop loin, si peu qu'elles soient allumées? Vous préparez un poison et subtil et mortel, vous le versez sur tous les spectateurs: et vous vous croyez innocente ! Ajoutez les exemples des person nes que leur modestie a rendues recommandables, et de celles à qui leur immodestie a fait toṛt. Mais

sur-tout ne permettez rien dans l'extérieur des filles qui excede leur condition : réprimez sévèrement toutes leurs fantaisies. Montrez-leur à quel danger on s'expose, et combien on se fait mépriser des gens sages, en oubliant ainsi ce qu'on est.

Ce qui reste à faire, c'est de désabuser les filles du bel esprit. Si on n'y prend garde, quand elles ont quelque vivacité, elles s'intriguent, elles veulent parler de tout, elles décident sur les ouvrages les moins proportionnés à leur capacité, elles affectent de s'ennuyer par délicatesse. Une fille ne doit parler que pour de vrais besoins, avec un air de doute et de déférence : elle ne doit pas même parler des choses qui sont au-dessus de la portée commune des filles, quoiqu'elle en soit instruite. Qu'elle ait, tant qu'elle voudra, de la mémoire, de la vivacité, des tours plaisants, de la facilité à parler avec grace; toutes ces qualités lui seront communes avec un grand nombre d'autres femmes fort peu sensées et fort méprisables. Mais qu'elle ait une conduite égale et suivie, un esprit égal et réglé; qu'elle sache se taire et conduire quelque chose : cette qualité si rare la distinguera dans son sexe. Pour la délicatesse et l'affectation d'ennui, il faut la réprimer, en montrant que bon goût consiste à s'accommoder des choses selon qu'elles sont utiles.

le

Rien n'est estimable que le bon sens et la vertu : un et l'autre font regarder le dégoût et l'ennui, non comme une délicatesse louable, mais comme une foiblesse d'un esprit malade.

Puisqu'on doit vivre avec des esprits grossiers, et dans des occupations qui ne sont pas délicieuses, la raison, qui est la seule bonne délicatesse, consiste à se rendre grossier, pour ainsi dire, avec les gens qui le sont. Un esprit qui goûte la politesse, mais qui sait s'élever au-dessus d'elle dans le besoin pour aller à des choses plus solides, est infiniment supérieur aux esprits délicats et surmontés par leur dégoût.

CHAPITRE XI.

Instruction des femmes sur leurs devoirs.

VENONS

ENONS maintenant au détail des choses dont une femme doit être instruite : quels sont ses emplois ? Elle est chargée de l'éducation de ses enfants; des garçons jusqu'à un certain âge; des filles jusqu'à ce qu'elles se marient, ou se fassent religieuses; de la conduite des domestiques, de leurs mœurs, de leur service; du détail de la dépense, des moyens de faire tout avec économie et honorablement; d'ordinaire même, de faire les fermes et de recevoir les revenus,

La science des femmes, comme celle des hommes, doit se borner à s'instruire par rapport à leurs fonctions; la différence de leurs emplois doit faire celle de leurs études. Il faut donc borner l'instruction des femmes aux choses que nous venons de dire. Mais une femme curieuse trouvera que c'est donner des bornes bien étroites à sa curiosité: elle se trompe, c'est qu'elle ne connoît pas l'importance et l'étendue des choses dont je lui propose de s'instruire.

Quel discernement lui faut-il pour connoître le naturel et le génie de chacun de ses enfants, pour trouver la maniere de se conduire avec eux la plus propre à découvrir leur humeur, leur pente, leur talent, à prévenir les passions naissantes, à leur persuader les bonnes maximes, et à guérir leurs erreurs! Quelle prudence doit- elle avoir pour acquérir et conserver sur eux l'autorité, sans perdre l'amitié et la confiance ! Mais n'a-t-elle pas besoin d'observer et de connoître à fond les gens qu'elle met auprès d'eux? Sans doute : une mere de famille doit donc être pleinement instruite de la religion, et avoir un esprit mûr, ferme, appliqué, et expérimenté pour le gouvernement.

Peut-on douter que les femmes ne soient chargées de tous ces soins, puisqu'ils tombent naturellement sur elles pendant la vie même de leurs maris occupés

au-dehors? Ils les regardent encore de plus prèš si elles deviennent veuves. Enfin saint Paul attache tellement en général leur salut à l'éducation de leurs enfants, qu'il assure que c'est par eux qu'elles se

sauveront.

Je n'explique point ici tout ce que les femmes doivent savoir pour l'éducation de leurs enfants, parceque ce mémoire leur fera assez sentir l'étendue des connoissances qu'il faudroit qu'elles eussent.

Joignez à ce gouvernement l'économie. La plupart des femmes la négligent comme un emploi bas qui ne convient qu'à des paysans ou à des fermiers, tout au plus à un maître d'hôtel, ou à quelque femme de charge: sur-tout les femmes nourries dans la mollesse, l'abondance et l'oisiveté, sont indolentes et dédaigneuses pour tout ce détail; elles ne font. pas grande différence entre la vie champêtre et celle des sauvages du Canada. Si vous leur parlez de vente de bled, de cultures de terres, des différentes natures de revenus, de la levée des rentes et des autres droits seigneuriaux, de la meilleure maniere de faire des fermes, ou d'établir des receveurs, elles croient que vous voulez les réduire à des occupations indignes d'elles.

Ce n'est pourtant que par ignorance qu'on mé, prise cette science de l'économie. Les anciens Grecs

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