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plus redoutables et plus nombreux. Enfin, que voir dans ce monstre marin gisant sous le navire? sinon le terrible Léviathan de l'Écriture, le démon, qui excite toutes les tempêtes et qui cherche à faire sombrer le vaisseau de l'Église. Mais sa position même indique l'impuissance de ses efforts et la fureur du désespoir 1. Nous le demandons est-il un livre plus intelligible, plus complet, plus éloquent que cette simple gravure?

:

En bénissant l'art chrétien si fidèle à sa mission, nous nous dirigeâmes vers les Catacombes des Saints-Gordien et Epimaque. Pendant la persécution de Julien l'apostat, Rome comptait au nombre de ses jurisconsultes, un magistrat nommé Gordien. Fort attaché au paganisme, il entreprit de le défendre dans une dispute avec un prêtre nommé Januarius. Gordien fut vaincu, et, conséquent avec lui-même, il embrassa courageusement la vérité qui venait de luire à ses yeux; cinquante-trois personnes de sa maison imitèrent son exemple. Bientôt il lui fallut signer sa foi comme on la signait alors, avec du sang, et il la signa.

Alors Rome put voir un de ses plus graves citoyens garrotté comme un vil malfaiteur, meurtri et déchiré avec des lanières garnies de plomb, puis, attaché à la colonne d'ignominie, recevoir tranquillement le coup de hache qui lui abattit la tête. Chose utile à méditer! ces cruautés, dignes de Néron, étaient ordonnées par Apronien, préfet de

Roma subterr., lib. v, c. ix, p. 244.

Rome, issu de l'illustre famille dont un des membres avait, par son martyre ou par sa charité, donné son nom à la Catacombe que nous venions de quitter. Pendant la nuit du 10 mai de l'an 362, les chrétiens enlevèrent le corps du saint martyr et le déposèrent dans le cimetière de Saint- Epimaque. Alexandrie d'Égypte avait été le théâtre des combats de ce nouvel athlète. Mais dans sa jalousie maternelle, Rome avait voulu posséder le corps de son noble enfant, et l'illustre témoin de la foi dans les régions lointaines, venait de prendre place dans la grande cité des martyrs, lorsque Gordien partagea sa demeure et la gloire de lui donner son nom 1.

Aux gloires de cette Catacombe, dont l'origine est incertaine, il faut ajouter, suivant l'opinion bien établie de Bosio, les illustres martyrs Sempronius, Olympius, Exupérie et Théodulus, que le pape saint Étienne, accompagné de son clergé et de nombreux fidèles, y déposa lui-même, pendant la nuit, à la lueur des flambeaux, au milieu des chants et de la pompe que pouvait permettre l'horrible persécution de Valérien 2.

On peut aussi nommer le glorieux athlète de

1 Bar., Annot. ad Martyr., 10 mai; Bosio, Roma subterr., lib. IV, c. 111.

2 Eadem nempe nocte adveniens S. Stephanus Episcopus cum clericis, et religiosis viris, hymnis ex more redditis, eorum corpora, hoc est sanctorum Sempronii et sociorum, abstulerunt et sepelierunt juxta Viam Latinam, milliario primo. Ms. Cod. Vat. 4.

la foi, saint Némésius, qui reçut des mains du même pontife une sépulture honorable dans ce même cimetière sur lequel il avait reçu la palme de la victoire. Plus tard son corps, ainsi que celui de sainte Lucille, sa fille, furent transportés, avec ceux des autres martyrs nommés plus haut, dans l'église de Sainte-Marie-la-Neuve, à l'extrémité du Forum. Ils y reposent aujourd'hui, et le pèlerin qui vient les vénérer peut voir l'éternelle fécondité de l'Église catholique qui, dans le même temple, réunit aux martyrs des premiers âges les enfants non moins glorieux de sa vieillesse. Nous savons déjà que Sainte-Marie-la-Neuve possède le corps de sainte Françoise Romaine, l'honneur de son sexe, la gloire de son siècle et l'orgueil de la Ville éternelle.

17 Janvier.

Catacombes de la Voie Latine (suite). - Catacombes des Saints-Simplicius Histoire. - Peintures des Catacombes, partie historique.

et Servilien.

- Abraham.

-

- Absence de crucifix dans les Catacombes. - Différentes espèces de croix. - Joseph. Moise. Quatre circonstances de sa vie, souvent représentées. — Pharaon.

Arche d'alliance. - Samson.

- David.- Élie, Catacombe de Saint-Tertullien.

Histoire.

En corrompant les pères du genre humain, le démon inocula son cruel venin à toute leur postérité. Vainqueur du roi de l'univers, il acquit aussi une influence fatale sur les créatures soumises à son

empire. Tous les peuples furent persuadés de ce dogme aussi terrible qu'il est incontestable. De là, dans tous les lieux éclairés par le soleil, des sacrifices, des expiations, des conjurations, des purifications, afin de soustraire les créatures à l'action malfaisante du prince des ténèbres. Héritière de la vérité, l'Église catholique ne pouvait laisser périr ce dogme, d'autant plus important à conserver, qu'il est une des bases de l'ordre providentiel. Chaque année Rome manifeste sa foi, sur ce point, en bénissant solennellement les animaux. Le jour de SaintAntoine est choisi pour accomplir ce devoir; sans doute parce que le patriarche du désert sut triompher avec éclat de l'immonde ennemi qui cherche à souiller, en les corrompant, toutes les œuvres de Dieu. Quoi qu'il en soit, pendant que la foule se portait, partie sur l'Esquilin où se faisait la bénédiction; partie aux églises de Saint-Antoine-ai-Monti, de Sainte-Marie-des-Miracles, de Saint-Jean-desFlorentins, et des religieux Antoniens à-la-Colonnade-de-Saint-Pierre, pour invoquer le puissant Thaumaturge, nous reprîmes le chemin de la Voie Latine.

Un mille au delà du cimetière de Saint-Epimaque, se trouve la Catacombe des Saints-Simplicius et Servilien. Elle fait corps avec la précédente, et passe pour la plus ancienne de cette région : son origine remonte au règne de Trajan. Citons quelques-unes de ses gloires. La conversion de sainte Flavie Domitille avait fait grand bruit à Rome et à la cour impériale. On rechercha les motifs qui

avaient porté la jeune princesse à sacrifier son rang, ses espérances et sa vie, pour embrasser une religion proscrite.

Parmi ceux qui se livrèrent à cette étude, et qui avaient entendu de leurs oreilles les paroles de la jeune martyre, et vu de leurs yeux ses oeuvres miraculeuses, on cite les saints Simplicius et Servilien. Convertis à la foi, ils refusèrent désormais aux dieux de l'empire le culte qu'ils avaient coutume de leur rendre. Arrêtés pour ce fait, par ordre d'Anianus, préfet de la ville, rien ne put ébranler leur résolution, et ils eurent la tête tranchée. Les chrétiens recueillirent leurs corps et les déposèrent dans un jardin qui leur appartenait, situé à deux milles des murailles, sur la Voie Latine. Les saints martyrs y devinrent comme deux fontaines d'où sortit, pendant bien des siècles, une vertu puissante pour la guérison de l'âme et du corps'.

Faut-il compter parmi les glorieux habitants de la même Catacombe les saints Quartus et Quintus, dont les corps ont été transportés à Capoue? ou bien leur sépulture forme-t-elle un cimetière séparé, quoique voisin du premier? Sur cette question secondaire, les archéologues romains ne sont pas d'accord. Quoi qu'il en soit, le lieu précis où ils furent inhumés, s'appelait Ad centum aulas,

Quorum corpora christiani posuerunt in prædio eorum Via Latina, milliario secundo, in quo loco exhuberat virtus martyrii eorum usque in præsentem diem. · Ado, In Martyr., die

20 april; id., Martyr. Rom., 20 maii.

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Boldetti, lib. 11, c. xvm; Bosio, lib. iv, c. iv.

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