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ne sont point terminés par uue muet, comme ceux-ci :

Qu'heureux est le mortel, qui, du monde ignoré,
Vit content de soi-même en un coin retiré!

Les vers féminins sont ceux dont la dernière voyelle est un e muet qui ne se fait presque point entendre, comme dans ceux-ci :

De Paris au Pérou, du Japon jusqu'à Rome,
Le plus sot animal, à mon avis, c'est l'homme.

D. Tous les vers féminins finissent-ils par un e muet?

R. Non : cet e muet peut être suivi d'une s ou dent, comme dans les pluriels des noms et des verbes. En voici des exemples:

C'est. Dieu qui devant lui fait marcher la victoire.
Il dispose à son gré des fortunes humaines...
O monts de Gelboë! que vos sources tarissent.

D. Les vers féminins n'ont-ils pas plus de syllabes que les masculins?

R. Oui ils en ont une de plus par conséquent, dans les vers de douze syllabes, ils en ont treize; dans ceux de dix, ils en ont onze, parce que la dernière syllabe, qui se termine par un e muet, seul, ou suivi d'unes ou de nt, ne se compte pas, D. Ne trouve-t-on pas des vers qui ont plus de treize syllabes?

R. Oui il y en a qui ont jusqu'à seize

et même dix-neuf syllabes, comme dans ceux-ci :

Le Peuple aveugle et faible est né pour les grands hommes. Dieu même entre en l'âme humble, et l'âme entre en Dieu même.

Cependant elles ne sont comptées que pour douze syllabes, parcequ'il y a Élision, c'est-à-dire que ce sont des syllabes qui se mangent et se suppriment à cause des voyelles qui les suivent.

D. Quand l'Élision a-t-elle lieu?

R. Il y a Élision toutes les fois que l'e

muet se trouve à la fin d'un mot suivi d'un autre qui commence par une voyelle ou une h qui n'est pas aspirée. Comme dans les vers suivans:

Heureux qui n'a point vu le dangereux séjour
Où la fortune éveille et la haine et l'amour;
Où la vertu modeste, et toujours poursuivie,
Marche au milieu des cris qu'elle arrache à l'envie.
D. Les Élisions font-elles l'ornement
des vers?

R. Oui quand elles ne sont ni trop fréquentes ni trop recherchées; mais il y en a qui sont d'une dureté extrêmement désagréable, sur-tout le pronom le placé après son verbe. Comme dans ce vers : Et dans tous vos discours célébrez-le à jamais.

De la Césure.

D. Qu'est-ce que la Césure?

R. C'est un repos qui coupe le vers en

deux parties, qu'on nomme Hémistiche. D. Tous les vers sont-ils susceptibles d'un Hémistiche?

R. Non il n'y a que les vers de douze et de dix syllabes.

D. Où se place-t-il dans les vers det douze syllabes?

R. Il se place après la sixième syllabe. Comme dans ces vers:

Que, libre de tout soin, I en ce séjour champêtre,
J'aime à m'entretenir, I de l'auteur de mon être!

D. Où se place-t-il dans ceux de dix syllabes?

R. Il se place après la quatrième. Comme dans ces vers :

Du peu qu'il a le sage est satisfait.

Ah! qu'il est doux de faire des heureux!

D. Que faut-il pour que la Césure soit exacte?

R. Il faut qu'elle coupe imperceptiblement le sens, de manière qu'elle procure un petit repos qui ne fasse cependant pas trop attendre le reste du vers. C'est encore un des préceptes de Boileau :

Que toujours dans vos vers le sens, coupant les mots, Suspende l'hémistiche, en marque le repos.

D. Quand est-ce que la Césure est vicieuse?

R. La Césure est vicieuse, 1° quand le

sens exige que le mot où est la césure et celui qui le suit soient prononcés de suite et sans pause. Ainsi, la Césure cst vicieuse dans ces vers:

Mon père, quoiqu'il eût la tête des meilleures

Ne n'a jamais rien fait apprendre que mes heures.

2° Quand la syllabe qui porte la Césure se trouve au milieu d'un mot: comme dans ce vers :

Laisser un faible souvenir quand on n'est plus.

5o La Césure ne vaudroit encore rien si elle était marquée par un e muet, quand même cet e muct serait suivi d'une de nt. Ainsi, ce vers ne vaut rien :

Elle connoît seule ce secret qu'on ignore.

ou

Cependant si la dernière syllabe du premier Hémistiche finissait par un e muet qui s'élidât avec la voyelle initiale de l'Hémistiche suivant, alors le vers serait bon : comme dans les vers suivans:

Ami Marot, l'honneur de mon pupître,
I

Mon premier maître, acceptez cette épître...

De la Rime.

D. Qu'est-ce que la Rime?

R. La Rime n'est autre chose qu'un même son placé à la fin des mots qui terminent

les vers; mais ces mots doivent être différens quant à la signification.

D. Quelles sont les règles générales de la rime?

R. les voici: 1°. le retour du même son à la fin des vers, et non les mêmes lettres, forme la rime. Ainsi, repos rime avec animaux, moment avec amant; mais triompher ne rime pas avec enfer, ni mer avec aimer.

Il faut aussi remarquer que les mots terminés par une s, par un x, et par un z, ne riment point avec ceux qui ne seraient pas terminés par aucunes de ces trois lettres. Ainsi, étables ne rime point avec présentable.

2o. Un même mot répété à la fin de deux vers, ne rime point, à moins qu'il n'ait une signification différente. Aiusi, point répété à chaque fin de vers ne rimerait pas : mais pas. négation, el pas, action de marcher, rimeraient fort bien.

5o. La rime d'un mot simple avec son composé est reçue lorsqu'ils ont une signification différente : comme arme avec alarme, donner avec pardonner,

4° Les vers de douze et de dix syllabes ne doivent point rimer avec leur hémistiche, ni avec celui du vers qui les précède ou qui les suit immédiatement.

Il y a cependant des cas où on le tolère;

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