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les oraisons funébres, les discours académiques. Il faut pour ce genre des expressions magnifiques, des tours hardis, des périodes nombreuses, des figures brillantes, en un mot, toutes les richesses de l'éloquence; mais la vérité doit être la base des uns et des autres.

D. Quest-ce que le genre Délibératif? R. C'est celui qui s'occupe de tout ce qui est honnête ou utile, avantageux ou préjudiciable; c'est par lui qu'on balance les avantages ou les inconvéniens d'une entreprise. Il s'agit, par exemple, de déclarer la guerre pour venger une injure reçueil faut examiner avec soin ce qu'il ya à craindre, et ce qu'il y a à espérer; quelles sont les ressources de l'état et celles de l'ennemi; si le dommage auquel on s'expose, ne sera point plus grand que celui qu'on a reçu.

D. Quelle éloquence est particulière au genre délibératif?

R. Il faut, dit Cicéron, que l'orateur y parte toujours avec dignité; que des pensées judicieuses fassent l'ornement de son discours, plûtôt que des expressions fleuries.

D. Quest-ce que le Genre Judiciaire ? R. C'est celui qui traite de ce qui regarde les lois; de toutes les causes où il est question d'accuser et de défendre. Il faut

fixer l'état de la question qui a pour 'objet le fait, le droit et le nom. La question de fait tombe sur l'action. Un homme a été tué. L'accusateur dit : C'est vous qui avez tué. L'accusé répond: Ce n'est pas moi. Il s'agit de prouver le fait. La question de droit roule sur les dispositions de la loi. La loi condamne-t-elle le prévenu? Telle est la question de droit. La question de nom a pour objet de décider la qualité de la chose. Par exemple, telle démarche d'un soldat est-elle désertion? ne l'est-elle pas ? Il ne s'agit que du nom : quand il sera décidé, toute contestation finit.

CHAPITRE II.

De la Disposition.

D. Qu'est-ce que la disposition? R. C'est un arrangement juste, naturel et régulier de toutes les parties qui composent le discours. Quelque belles, quelque vives que soient les pensées, si elles n'ont cette proportion et celte symétrie que demande et qu'inspire la nature, il n'en résultera qu'un chaos rebutant, qu'une masse informe, faite pour choquer et pour déplaire.

D. Combien distingue-t-on de parties dans un discours?

R. Il y en a cinq: L'Exorde, la Narra

tion, la Confirmation, la Réfutation et la Péroraison.

ARTICLE PREMIER.

D. Qu'est-ce que l'Exorde?

R. C'est un tableau abrégé de tout ce qui doit faire le sujet du discours.

D. Quelles sont les qualités de l'Exorde? R. Il doit être propre, ingénieux, modeste, et proportionné au sujet.

1° Il doit être propre, c'est-à-dire tiré du fond du sujet, et tellement fait pour l'orateur, que la partie adverse ne puisse

s'en servir.

2° Il doit être modeste, c'est-à-dire écrit de manière à donner bonne opinion des talents de l'orateur.

3° Il doit être ingénieux, c'est-à-dire qu'il en faut bannir tous les ornemens qui ont un air trop recherché, les manières trop impérieuses, et les promesses trop hardies, en un mot, cacher l'art sous l'apparence du naturel.

4° Enfin, il doit être proportionné au sujet, c'est-à-dire ne pas se servir d'expressions recherchées pour exprimer une chose simple.

D. Combien distingue-t-on de sortes d'Exordes?

R. Il y a deux sortes d'exorde, le brusque, et le tempéré. Le brusque est fait pour

les passions véhémentes et pour les grands événemens. L'orateur, agité de pensées tumultueuses, éclate tout-à-coup, et saisit ses auditeurs par un enthousiasme violent et imprévu. Tel est l'exorde de la première Catilinaire de Cicéron :

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Jusqu'à quand, Catilina, abuseras-tu ⚫ de notre patience? Jusqu'à quand ta har› diesse effrénée et furieuse bravera-t-elle notre juste ressentiment? Quoi! ni la garde qui veille à la sureté publique, ni la crainte du peuple, ni ton arrêt déjà » prononcé dans le cœur de tous les gens › de bien, ni le respect dû à ce lieu sacré, ni l'aspect de ces augustes sénateurs,n'ont ⚫ pu ébranler ton insolente audace! Ne ⚫vois-tu pas que tes complots perfides sont ⚫ dévoilés; que la conjuration est décou

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verte; qu'aucun de nous n'ignore ce que ⚫ tu as fait cette nuit et la nuit précédente; » à quelle coupable assemblée tu as pré» sidé; quelles résolutions plus coupables encore y ont été prises? O temps ! ô ⚫ mœurs! le Sénat le sait, le Consul le ⚫ voit, et ce traître respire! Il met dans ⚫ le sénat un pied téméraire; il prend part aux délibérations de ce corps vénérable; il jette sur chacun de nous des regards sanguinaires ; il marque de l'œil la place où il veut enfoncer le poignard! »

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L'Exorde tempéré est celui par lequel

on entre paisiblement en matière. Tel est l'exorde de l'Oraison funèbre de la reine d'Angleterre, par Bossuet..

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Celui qui règne dans les cieux, et de qui relèvent tous les Empires; à qui seul appartient la gloire, la majesté et l'indépendance, est aussi le seul qui se glorifie › de faire la loi aux Rois, et de leur donner, quand il lui plaît, de grandes et de ter>> ribles leçons. Soit qu'il élève les trônes, >> soit qu'il les abaisse, soit qu'il communique sa puissance aux princes, soit qu'il ⚫ la leur retire et ne leur laisse que leur propre faiblesse, il leur apprend leurs ⚫ devoirs d'une manière souveraine et digne de lui; car en leur donnant la puissance, il leur commande d'en user comme » il fait lui-même pour le bien du monde; et il leur fait voir, en la retirant, que , toute leur majesté est empruntée; et que, ⚫ pour être assis sur le trône, ils n'en sont ⚫ pas moins sous sa main et sous son autorité suprême. C'est ainsi qu'il instruit les Princes, non seulement par des discours, mais encore par des effets et par des exemples. Entendez, ô grands de la terre; apprenez votre devoir, arbitres du monde!

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D. Comment l'Orateur doit-il considérer le sujet qu'il a à traiter?

R. Il doit examiner devant qui il doit

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