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C'était, à Rome, le seul moyen de nommer héritier. Une nomination par convention ou institution contractuelle ne pouvait avoir d'effet; pour le Romain, lier sa volonté dernière était contraire à la dignité, à la moralité. Il en était de même de la renonciation à une succession non encore déférée3.

duction de M. de Meulenaere, Gand, 1877). Les anciens donnaient une autre étymologie du mot testamentum, ou plutôt faisaient, à leur manière, un jeu de mots. Pr. J. De testamentis ordinandis III, 10: Testamentum ex eo appellatur quod testatio mentis est. Ulpien XX, 1: Testamentum est mentis nostræ justa sententia, in id solemniter facta ut post mortem nostram valeat.

3 Les pactes successoires, soit acquisitifs, soit renonciatifs, sont donc étrangers au droit romain, du moins au droit à nous connu; peut-être n'en a-t-il pas toujours été de même.

Ce n'est qu'improprement que l'on a pu voir une exception au principe dans la loi 19, au Code, De pactis II, 3 (290). Ce rescrit proclame seulement la validité des dernières dispositions de deux soldats en faveur l'un de l'autre.

En revanche, les coutumes du moyen âge et, plus encore, la jurisprudence moderne ont développé et consacré les institutions contractuelles et les renonciations, sous l'influence du droit canonique (C. 2. De pactis, au Sexte, I, 18) et aussi du droit germanique. Dans l'ancien droit français, le contrat donne un droit de succession au même titre que la loi.

Le droit commun admet aussi les pactes successoires, tant acquisitifs que renonciatifs. De même, le Code prussien. Le Code Napoléon n'admet de pacte successoire que dans le contrat de mariage, et encore seulement l'acquisitif (art. 1082-1090). Le Code autrichien admet le pacte acquisitif entre époux.

Il ne faut pas confondre avec le pacte successoire, pactum hereditarium vel acquisitivum vel renuntiativum, les conventions qui ont pour objet la succession d'un tiers encore vivant, pacta de hereditate tertii viventis. Ces conventions étaient, en général, et sont encore, selon le droit commun, nulles en tant qu'immorales et dangereuses. Une affaire de ce genre paraît toutefois n'offrir ni immoralité ni danger lorsque le

Loi des Douze Tables. Table V, 3 (Bruns): UTI LEGASSIT SUPER PECUNIA TUTELAVE SUÆ REI, ITA JUS ESTO.

Ulpien, L. 130 De V. S. L, 16: Lege obvenire hereditatem non improprie quis dixerit et eam, quæ ex testamento defertur, quia lege duodecim tabularum testamentariæ hereditates confirmantur.

Ulpien, L. 52 § 9 Pro Socio XVII, 2 : Idem (Papinianus) respondit, societatem non posse ultra mortem porrigi, et ideo nec libertatem de supremis judiciis constringere quis poterit vel (cogere socium) cognatum ulteriorem proximioribus praeferre.

Valérien et Gallien, L. 15 C. De pactis II, 3 (259): Pactum, quod dotali instrumento comprehensum est, ut, si pater vita fungeretur, ex æqua portione ea, quæ nubebat,

tiers en a connaissance et y consent; s'il a persévéré dans son libre consentement jusqu'à sa mort, l'acte peut sortir son effet; dans le cas contraire, l'héritier est frappé d'indignité (Infra § 91). Justinien, L. 30 C. De pactis II, 3 (531): Sed nobis hujusmodi pactiones odiosæ videntur et plenæ tristissimi et periculosi eventus. Quare enim, quodam vivente et ignorante, de rebus ejus quidam paciscentes conveniunt? Secundum veteres itaque regulas sancimus, omnimodo hujusmodi pacta, quæ contra bonos mores inita sunt, repelli et nihil ex his pactionibus observari, nisi ipse forte, de cujus hereditate pactum est, voluntatem suam eis accommodaverit, et in ea usque ad extremum vitæ suæ spatium perseveraverit.

Marcien, L. 2 § 3 De his quæ ut indignis XXXIV, 9: Idem erit, si quis vivi ignorantis bona vel partem bonorum alicujus cognati donaverit; nam quasi indigno aufertur.

Il n'y a rien d'immoral ni de dangereux dans une convention tout à fait générale, relative non à l'hérédité d'un tiers déterminé, mais à n'importe quelle hérédité à laquelle pourrait être appelé le contractant.

Paul, L. 3 § 1 Pro socio XVII, 2: Cum specialiter omnium bonorum societas coïta est, tunc et hereditas et legatum et quod donatum est aut quaqua ratione adquisitum, communioni adquiritur.

Ulpien, L. 11 De H. vel A. V. XVIII, 4: Nam hoc modo admittitur esse venditionem: « Si qua sit hereditas, est tibi emta, » et quasi spes hereditatis; ipsum enim incertum rei veneat, ut in retibus.

cum fratre heres patri suo esset, neque ullam obligationem contrahere, neque libertatem testamenti faciendi mulieris patri potuit auferre.

Papinien, L. 29 § 2 De donationibus XXXIX, 5: Donationem quidem partis bonorum proximæ cognatæ viventis nullam fuisse constabat, verum ei, qui donavit ac postea jure praetorio successit, quoniam adversus bonos mores et jus gentium festinasset, actiones hereditarias in totum denegandas respondit.

Marcien, L. 30, même titre : Nam ei ut indigno aufertur hereditas.

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Julien, L. 61 De V. 0. XLV, 1: Stipulatio hoc modo concepta Si heredem me non feceris, tantum dare spondes ", inutilis est, quia contra bonos mores est haec stipulatio.

Ulpien, L. 2 § 2 De vulgari et pupillari XXVIII, 6: ...Improbum esse Julianus existimat eum, qui sollicitus est de vivi hereditate.

Papinien, L. 16 De suis et legitimis XXXVIII, 16: Pater instrumento dotali comprehendit, filiam ita dotem accepisse, ne quid aliud ex hereditate patris speraret; eamque scripturam jus successionis non mutasse constitit, privatorum enim cautione legum auctoritatem non censeri.

Ulpien, L. 13 De A. vel O. H. XXIX, 2 : Is, qui heres institutus est, vel is, cui legitima hereditas delata est, repudiatione hereditatem amittit. Hoc ita verum est, si in ea causa erat hereditas, ut et adiri posset: ceterum heres institutus sub condicione si ante condicionem existentem repudiavit, nihil egit, qualisqualis fuit condicio, etsi in arbitrium collata est. § 1. Si quis dubitet, vivat testator necne, repudiando nihil agit.

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Paul, L. 18, même titre Is potest repudiare, qui et adquirere potest.

Le citoyen romain attachait le plus haut prix au droit de régler lui-même, souverainement, le sort de

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son patrimoine; la mort sans testament était redoutée; un blâme atteignait la mémoire de celui qui, pouvant tester, négligeait de le faire et se laissait surprendre ainsi par la mort. Il est permis d'expliquer ce sentiment par le désir de corriger l'exclusivisme du droit civil, désir qui devait être particulièrement impérieux après que l'émancipation fût admise. Le testament a devancé les réformes du préteur 1.

Cet état de choses suppose un complet développement de la propriété et, en général, une civilisation juridique et sociale avancée. Sans doute, le testateur n'a pas toujours été ce maître souverain, libre de disposer à sa guise; sans doute, il lui fallait, dans le principe, le consentement de ses agnats et celui de ses gentils; d'ailleurs, des devoirs spéciaux s'imposaient à lui s'il avait des enfants, une épouse en sa puissance".

La coutume a dû tenir une grande place en cette matière des testaments. On en sait, en somme, peu de chose; l'histoire du droit est forcée de recourir à l'hypothèse et à l'analogie pour résoudre nombre de problèmes délicats, dont l'examen sort de notre cadre.

2. A défaut de testament ou d'héritier testamentaire, la loi appelle à la succession de l'intestat les membres les plus proches de sa famille civile, à laquelle la famille naturelle s'est jointe et peu à peu substituée.

4 Adoption, émancipation, testament trois institutions qui se touchent et se tiennent, et qu'il importe de ne pas perdre de vue si l'on veut comprendre la famille romaine.

5 Infra, § 28 et suivants.

A défaut de famille civile, la loi appelle les membres

de la gens.

L'hérédité est dite alors légitime ou ab intestat 6.

Il n'y a d'héritier légitime qu'à défaut d'héritier testamentaire.

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Pr. J. De hereditalibus quæ ab intestato deferuntur III, 1 Intestatus decedit, qui aut omnino testamentum non fecit, aut non jure fecit, aut id quod fecerat ruptum irritumve factum est aut nemo ex eo heres extitit.

Ulpien, L. 39. De A. vel 0. H. XXIX, 2 : Quamdiu potest ex testamento adiri hereditas, ab intestato non defertur.

3. Ces deux modes de désignation de l'héritier s'excluent l'un l'autre. Ou le défunt est mort testat, ou il est mort intestat. Il n'y a pas de milieu: Nemo pro parte testatus, pro parte intestatus decedere potest.

Si le défunt a fait un testament où il a institué Titius pour la moitié de son héritage et personne d'autre, on ne le considère point comme étant mort intestat, car il n'y a pas de motif pour déclarer l'institution et, par elle, le testament nuls. La condition à laquelle les décemvirs ont subordonné la succession légitime fait ainsi défaut, et, vu l'unité et l'universalité de l'hérédité, l'institué hérite du tout".

6 L'hérédité légitime n'est pas strictement identique à l'hérédité ab intestat, celle-ci comprenant la succession prétorienne.

L'expression d'hérédité légitime se prend souvent dans un sens restreint pour désigner la succession des agnats. Legitimus est alors synonyme d'agnatus, et opposé à suus.

7 Il existe toute une littérature sur cette règle. Voyez les indications de HAUBOLD, De causis cur idem et testato et intestato decedere non possit

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