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s'y opposoit [a]. Il emploie les paroles du célébre rhéteur, qui servent de texte à chacune de ses dissertations, afin d'avoir l'air de répondre à ses adversaires, par occasion, comme il le dit lui-même.

geur

Les neuf premières Réflexions sont consacrées à réfuter Charles Perrault, de l'académie françoise, qui n'attaquoit pas mieux les anciens qu'il ne défendoit les modernes. Le vendu goût y fait preuve d'une logique sûre, d'un vrai savoir, d'un zèle énergique pour les chefs-d'œuvre de l'antiquité; mais on regrette d'y rencontrer plus fréquemment les expressions de l'humeur et du mépris que celles d'une raillerie fine, dans laquelle il excelloit. Son admiration pour l'Iliade et pour l'Odyssée ne lui permettoit guère de discuter froidement avec les détracteurs de ces deux poëmes. Sept ans après, oubliant l'aigreur de ce long débat, il se montre avec tous ses avantages dans une lettre écrite au même Perrault. Il y fixe le véritable point de la controverse qui les avoit divisés [b].

La dixième Réflexion a pour objet de dé

[a] Voy., p. 154, son Avis aux lecteurs, que suppriment les éditeurs qui ne se conforment pas à ses intentions. [b] Voy. cette lettre, tome IV, page 375.

montrer, contre l'opinion du savant Huet, la sublimité des paroles si connues de la Genèse : << Dieu dit, Que la lumière se fasse; et la lu« mière se fit, etc. » Le critique s'adresse à Le Clerc, parcequ'il étoit plus facile d'engager le combat avec ce journaliste, qu'avec un évêque dont la dignité prescrivoit des égards.

La onzième Réflexion est une apologie de ce vers du récit de Théramène, dans la tragédie de Phedre:

Le flot qui l'apporta recule épouvanté.、

La Motte avoit censuré d'une manière spécieuse ce vers, que nous avons tâché de défendre contre des objections plus solides de La Harpe [a].

Enfin la dernière Réflexion offre l'analyse de ces vers d'Athalie, qui, sous le rapport du sublime, placent Racine à côté de Pierre Corneille :

Celui qui met un frein à la fureur des flots, etc.

La traduction du Traité du Sublime étoit une entreprise remarquable par son importance et par les difficultés que présentoit un texte

[a] Voy. le deuxième alinéa de la page 338.

plein d'altérations et de lacunes. Elle n'existoit alors dans aucune langue moderne. Les ressources de l'helléniste françois consistoient dans la version latine de Gabriel de Pétra, dans les notes de Langbaine et de Le Febvre [a]. Son travail obtint le succès que l'on devoit espérer d'une instruction approfondie et d'une rare sagacité: il fixa les regards de l'Europe savante sur l'immortel rhéteur. Longin, il est vrai, trouva dans le traducteur de ses préceptes un interprète plus judicieux qu'élégant; mais Homère, Sapho, Eschyle, Euripide, d'où la plupart de ses exemples sont tirés, trouvèrent un poëte qui en reproduisit les diverses beautés. Cette différence se conçoit aisément : Despréaux mettoit sa gloire à perfectionner ses vers; pour lui la prose étoit un délassement. La sienne est toujours claire, souvent négligée, quelquefois traînante et même incorrecte. Plusieurs pages, néanmoins, écrites avec agrément, prouvent que l'arbitre de la poésie françoise auroit pu devenir un prosateur habile, s'il n'avoit pas consacré tous ses efforts à surmonter les obstacles que lui opposoit notre versification.

[a] Voy. la préface du traducteur, p. 360 et suiv.

Nous avons respecté les intentions du traducteur, dans l'ordre que nous avons suivi pour ses Remarques sur Longin; et nous n'avons pas cru, malgré des exemples contraires et récents, qu'il nous fût permis d'y rien retrancher. Comment peut-on se croire autorisé à supprimer les raisonnements dont il s'appuie? n'ont-ils pas autant de poids que tous ceux qu'on leur substitue?

Nous aurions craint de toucher même aux remarques de Dacier et de Boivin, que Despréaux a recueillies soigneusement, telles qu'on les lit dans l'édition de 1713. Il n'a fait aucune mention de celles de Tollius, publiées en 1694, les jugeant, selon toute apparence, peu dignes d'attention [a]. Brossette les a cependant insérées dans son commentaire, en 1716, et la plupart des éditeurs l'ont imité.

Les éclaircissements de Saint-Marc pour l'intelligence du Traité du Sublime sont la partie, sans contredit, la plus utile de l'édition qu'il a donnée en 1747. C'est le fruit d'un savoir indigeste, comme tout ce qui est sorti de sa plume; mais ce laborieux commentateur a du moins le mérite d'avoir rassemblé les re

[a] Voy. sur Tollius les notes a et b, page 287.

cherches de ses devanciers, et d'avoir consulté des érudits consommés dans l'étude de la langue grecque. Au milieu des matériaux qu'il accumule, l'œil le plus attentif distingue avec peine ceux que le goût peut mettre en œuvre. Pour y parvenir, il faut une persévérance que le sentiment du devoir est seul capable d'entretenir. Aussi le travail de Saint-Marc est-il peu connu, même de la plupart de ceux qui sont appelés à le juger. La Harpe en parle avec une indulgence qui ne lui est pas ordinaire [a], et qui fait présumer qu'il a voulu sur-tout infirmer le jugement trop rigoureux de Clément de Dijon, son ennemi, sur le commentateur de Despréaux [b]. Il devient donc nécessaire de donner une idée exacte d'un commentaire très recherché, mais qui a plus de partisans que de lecteurs.

Indépendamment des remarques qu'il cueille de toutes parts, Saint-Marc profite des notes que Claude Capperonnier, son parent[c], avoit écrites à la marge d'un exemplaire de l'édition de Tollius, et qui étoient les esquisses

[a] Cours de littérature, 1821, tome I, page 100.
[b] Sixième lettre à M. de Voltaire, 1774, page 154.
[c] C'est de lui que nous parlons page 325.

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